cat-right

Caoucalla

Caoùcalla s.f. « corneille » (Hérault,Marcel de Serres d’après Rolland), déjà en ancien occitan : caucala (Rouergue, Raynouard, qui ajoute : cf. anc.catalan cucala); Cacouleto (Gers, Cénac-Montaut), Mistral donne pour le languedocien caucaleto « corneille ».

D’après le FEW il s’agit d’une onomatopée formée indépendamment dans ces localités. Mais caucalla ressemble phonétiquement beaucoup à un groupe de mots germaniques, comme néerlandais kauw « choucas » moyennl. cauw « corneille », ancien allemand kaa, norvégien kaje, anglais chough.
Le FEW suppose une origine franque*kawa pour les formes du Nord : ancien français choe « choucas », anglo-normand chouwe. En franco-provençal nous trouvons une forme tsawa « corneille » qui prolongée avec une suffixe –ia est aussi attestée en dauphinois et en provençal chauvio « corneille », chayo (Alpes Maritimes), chavo (Toulon, Rolland).

Nous avons ici un groupe de noms d’oiseaux internationaux; en plus des noms germaniques, il y a portugais cava, lithuanien kovas, russe régional kava, tchèque kavka, irlandais cág. Le nom le plus courant en occitan est gralha, graula .

Nous pouvons conclure que, comme pour le chant du coq, nos oreilles perçoivent certains sons à travers un filtre imposé par la langue. Un Français distingue difficilement les  [i] de l’anglais dans bit et beat . J’ai vu à Nîmes un restaurant qui s’appelle  IT! au lieu de EAT.
Cela vaut aussi pour les couleurs (pensez au vin rouge) et c’est un sujet d’études sémantiques très révélateur. L es Français distnguent marron, châtain, brun; pour un Néerlandais c’est tout du bruin.

Mais ce qui est plus important c’est que notre culture nous impose également des notions comme président, liberté, laïcité, sécurité sociale, et identité nationale … Le président  de la république française a une fonction totalement différente de celle du Presidente della repubblica  italiana, dont vous ne connaissez probablement même pas le nom. . Et les « valeurs de la République » ne sont pas les mêmes en France et en Italie.

Des sujets de débats interminables et un obstacle probablement infranchissable à la traduction automatique.

acatar, recatar

Acaptar, acatá 1.v.tr. « ranger, couvrir ». 2. v.r. « se baisser, s’accroupir, se tenir coi ». Pour des raisons phonétiques le FEW  suppose une forme latine *coactitare « presser, serrer » à l’origine des formes occitanes et franco-provençales avec un -t-, comme p.ex. en Lozère cata « couvrir » ou acata « couvrir »  attesté à Avignon.   Au XVIe siècle acaptage, acatage signifie « couverture ,  vêtements d’hiver »  en  languedocien. A St.-André-de-Valborgne (Gard) le catage s.m. est « l’édredon ».(Thesoc). Il n’y a pas si longtemps on invitait un visiteur   à  Manduel  ainsi:  « Achevez d’entrer, enlevez les acatages et remettez-vous « .

A la même famille appartient le mot recaptar, recatar « ramasser quelque chose qui traîne » .
Le sens du verbe réfléchi se recatà « s’endimancher;  se marier » (Manduel) n’a rien à voir avec le sens du verbe transitif! ! mais est lié au sens ‘vêtements’ du mot acatage
En français régional nous trouvons récate « provision de bouche; plat de résistance » que Lhubac explique ainsi : »ce qui a été mis de côté par précaution ».  Nous le retrouvons en ancien occitan recatar « cacher  » (Avignon, 1465). Recata (Manduel), lang. recate « économie, soin » , et à Millau cato-musso ‘ colin-maillard ‘ proviennent tous d’un sens « mettre de côté ».

Est-ce que  récaté « être mort » (Lhubac) s’est développé à partir du sens « couvrir »?

Le sens  « se tapir  comme un chat »  (Andolfi) me semble de l’étymologie populaire en le rapprochant du mot cat chat ).Cf. cach.

A la même famille de mots appartient acapta, acato « pierre de couronnement » (terme de maçon) , celles qui forment le cordon d’un mur de clôture ou de terrasse; on le fait avec de grandes et larges pierres surtout pour affermir des murs en pierre sèche » (abbé de Sauvages). C’est la pierre qui couvre. Dérivé du verbe acatá.

Je ne connais pas l’origine du -p- dans la graphie dite classique dans acaptar, recapta.

Christian Laval, informant fidèle, m’écrit:

Bonjour,
L’autre jour ma mère m’a dit: « Je l’ai récaté« …
A Montpellier « récater » s’entend comme « mettre de côté« , « cacher« , « garder pour plus tard »; ce qui confirmerait l’origine supposée: « L’étymologie est d’après le FEW un verbe non-attesté *coacticare « cacher »« 
Bonne continuation.

Afanar

Afanar (s’), afaná (s’), afanamar (s’),   v.tr. et intr. « se fatiguer, se hâter » (s’afana sens jamais entancha lou trabalRouquier2 p.9), comme fr. ahan.

On suppose que l’origine est un latin *af(f)anare « se fatiguer », mais ce sens n’existe ni en italien affanno ni en espagnol où le mot a le sens de « douleur, souffrance ». Il n’est donc pas impossible que ce dernier est le sens d’origine, étant donné que l’évolution sémantique « douleur, souffrance » > « travail » est assez courante. Latin labor (> labeur) signifie d’abord « peine », et secondairement « travail ». Labor est de la même famille que le grec loobè « mauvais traitement, outrage ». Français travail vient de tripalium « torture, souffrance » ,  le néerlandais arbeid et l’allemand Arbeit « travail », mais aussi « peine, douleurs de l’enfantement ».

Ancien occitan afan s.m. « effort, tâche pénible, peine, fatigue »; afanador n. m. « homme de peine, manœuvre »; afanamen s. m. ‘effort, travail’.

Le verbe  afanar  signifie en ancien occitan

  1. 1. v. tr. a). ‘fatiguer’; b). ‘produire (par son travail)’ c). ‘mériter’ d.) ‘faire souffrir, affliger’ e). ‘aspirer à, désirer vivement’.
  2. 2. v. pr. a.) s’a. alc. ren ‘gagner (par son travail)’ b.) ‘se donner du mal’ …… etc.

Allez voir le site du Dictionnaire de l’Occitan Médiéval. Pour chaque signification moult exemples!

Rapar

Rapar « saisir, enlever » en ancien occitan (12e siècle) en occitan moderne plutôt arrapar « arracher, enlever ». Les peuples germaniques qui ont envahi l’empire romain ont laissé pas mal de traces dans le vocabulaire des régions où ils se sont installés. Les Burgondes dans l’est autour de Lyon et les Wisigoths dans le Midi. Par la suite les Wisigoths ont occupé une grande partie de la péninsule ibérique..

   

Le royaume de Bourgogne + la Savoie                              Le royaume des Wisigoths

Vous trouverez une belle carte de l’ensemble des migrations des peuples germaniques ici.

  • Rapar est un de ces mots germaniques. Il vient de rapôn « arracher, prendre, voler », (en néerlandais rapen « prendre, saisir », allemand raffen, rappen idem.) Nous le trouvons en occitan, en franco-provençal, en Italie arrapare et en iberoroman rapar 1.voler 2. raser. Rapar est attesté depuis le XIIe siècle, mais c’est surtout arapar « arracher, enlever » et s’arapar « donner dans un piège » qu’on trouve en (ancien) occitan. Il y a pas mal de dérivés comme rapador, rapaire« ravisseur », rapin « croc » (Nice), gascon raput « qui s’accroche », derabar « arracher », dérapà un terme de marine « quitter la prise sur le fond et laisser dériver le navire » (marseillais, qui a donné en français déraper). Voir aussi desrabar.
  • Ar(r)apar est présent dans tout le domaine occitan et franco-provençal. Les significations sont toujours liées à la notion de « arracher, enlever, saisir », comme par exemple le grenoblois arrapan « grippe-sou; malheureux », ou le nom du « gallium arapine » l’arrapoman. qui colle à la main , alleurs c’est le fruit de la bardane, la garance sauvage ou le pariétaire (Valleraugue). Mistral donne d’autres combinaisons, dans son Trésor, vol.I,p.137. Ceci est un lien direct vers la page du Trésor. Consultez aussi la page 138!
  • A partir du sens de rapar « saisir » s’est dévéloppé le sens « grimper, ramper » aussi bien en franco-provençal qu’en occitan. A Lyon un ropîou est un grimpeur, à Marseille un rapaïon « un sentier à pic dans les pierres ».
  • Rapugar, rapugaire. Un groupe spécial est formé par Rapa, rappa « rafle du raisin; grappe  » et Rapuga v.a. « grapiller »; rapugo « la rape, rafle ou marc du raisin » en franco-provençal et en occitan. Il s’agit très probablement d’une dérivation à partir du verbe rapar, qui rattache cette région au catalan rapa « grapillon », à l’espagnol rapa « fleur de l’olivier » et aux parlers italiens.
    Un visiteur de Manduel me signale: un rapugaire est un grapilleur. Dans le temps, vendanges terminées, on voyait dans les villages venir les rapugaires de Nîmes1. A Barcelonnette rapugas au figuré: « des restes »
  • Il semble qu’il n’y ait pas de lien direct avec le mot ancien picard ou champenois rapes « marc de raisin » pour lequel  on peut supposer un lien avec le mot allemand Rappe « grappe sans les raisins » utilisé dans la région de la Moselle, du Nahe et du Rhin jusqu’en Suisse. Emprunté (?) par l’anglais rape « rafle ».


allemand Rappen // anglais rape

  1. Une chanson Li Rapugaire du 19e siècle, mélodie + texte  en PDF