Rèssar, serrar, resegar, setar
Rèssar « scier » et rèssa « scie » viennent d’un latin rĕ + sĕcare « couper ».
Scier dans la Gaule romane du sud et de l’est par J. Gilliéron et J.Mongin, Paris, 1905 est une étude importante de géographie linguistique1. Voici la carte tirée de cette étude (c’est moi qui ai inséré les verbes à l’infinitif):
Cette carte peut être actualisée avec les données du Thésoc sous scier, scie, scieur, scierie et sciure, qui confirment et complètes celles de l’ALF, par exemple les villages Lembeye, Pontacq et Sedzere dans les Pyrénées Atlantiques ont le type serrar
D’après cette étude le type serrar, du latin serrare « scier » avait occupé autrefois tout le territoire du sud. Au cours des siècles le type ressegar ou segar issu du composé re + secÁ re « couper » et le type ressar issu du composé rÉ + secare ont supplanté serrar dans une grande partie du sud, mais il en reste des îlots dans les Pyrénées orientales (domaine catalan; serra est aussi le verbe courant en Catalogne), dans les Hautes -Pyrénées, un seul point dans le département des Landes et trois zones du domaine franco-provençal.
La cause de cette fragmentation est d’après Gilliéron l’homonymie de serrar « scier » et serrar « fermer ». Mais von Wartburg n’est pas du tout d’accord avec cette explication. Serra et resecare ont très bien pu exister dans la même période; les Romains disaient déjà serra secare. Il conteste également l’hypothèse de deux accentuations re + secÁ re et rÉ + secare pour expliquer les formes ressar et resegar. D’après von Wartburg il s’agit de même phénomène que nous trouvons dans le verbe disjejunare qui a donné déjeuner et dîner. Si vous voulez en savoir plus consulter=z le TLF.
Le type setar du latin sectare « couper » l’a supplanté dans le nord de l’occitan.
En ancien occitan, vers 1540, est attesté le sens « supprimer, défalquer » pour le verbe resecar.
Plus intéressant est l’ancien occitan rezegue « risque que courent les marchandises en haute mer » attesté à Marseille et à Montpellier vers 1300 et en latin médiéval resegum en 1200 à Marseille. Cette zone fait partie d’un domaine plus étendu qui va du Nord de l’Italie à la Catalogne. L’origine serait un rĕsĕcum « récif » dérivé du verbe rĕsĕcare, qui a donné riesgo « lutte » > « risque » et risco « récif » en espagnol (Corominas). L’évolution sémantique « récif » > « risque » se trouve aussi en allemand Klippe , néerlandais klippen « récif » > « danger, risque ».
un cargo échoué depuis octobre dernier sur un récif …
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- Je saisis l’occasion de dénoncer la pratique de Google, qui ne trouve que les « reprint » que vous pouvez acheter et oublie que vous pouvez le lire gratuitement sur le site d‘Internet archive. Profitez-en! ↩