Chapar, chapaire
Chapaire « mangeur; fendeur de bois ». Le premier sens est confirmé par Joanda dans la Gazette de Nîmes, qui le traduit « qui aime manger beaucoup, comme un golarut ». . Le deuxième vient d’Alibert, dans son article Chapar « broyer avec les dents; mâcher; manger; ronger; bafrer; hacher; se fendre ». Dans cet article nous trouvons en plus chapada « coup de folie » .
Je ne voyais pas les liens sémantiques entre les deux significations principales. Comment lier un « mangeur » à un « fendeur de bois »? La solution de ce petit problème se trouve dans les localisations et l’étymologie. Chapar « manger, mâcher, mastiquer » est languedocien et gascon, du département de l’Hérault jusqu’à la côte, tandisque chapar « fendre (le bois) » est provençal.
Chapar-1 « mâcher (bruyamment) » représente d’après le FEW d’une onomatopée tšapp-, tšab-, qui vit dans l’Est et le Sud des parlers galloromans. Le sens le plus répandu est « clapoter, barboter » comme dans le dérivé languedocien chapot « flaque d’eau » et le toulousain chapoteja v.a. »remuer de l’eau ». A la même famille appartiennent également champourla « patauger » et tsonbouta « agiter un liquide dans une bouteille ». Le deuxième sens « mâcher » etc. est languedocien et gascon. Le troisième « parler, bavarder » ne se trouve que tout à fait à l’Ouest, comme dans le Gers chapouta « parler à tort et à travers ».
Chapar-2 « fendre du bois avec la hache » n’est attesté que dans le dép. de la Bouche du Rhône. A Ussel chapà est » maltraiter, assomer de coups ». Avril donne pour Marseille chapaire « celui qui fend le bois » et chapaduro « fente d’un vase fêlé; folie ». Fêlé est un synonyme de fou . Cette évolution sémantique est compréhensible. D’après le FEW chapar-2 fait partie de la famille *cappare « châtrer, couper », un dérivé de capo « chapon ».
Capoular « couper menu » en Limagne « tailler la vigne » et le dérivé capoulado « hachis », en font partie également.
Encapar, entsapar « battre la faux »est très bien attesté dans tout le domaine Ouest de l’Occitan (Thesoc) est composé de in- + cappare. L’encap est « la petite éclume pour battre la faux ».
Surtout en franco-provençal nous trouvons entsaplar et en occitan encaplar qui font supposer un étymon *cappulare. Il est possible que les faucheurs (fauchés ?) des régions alpines qui venaient travailler en Provence, ont introduit les formes avec –l- dans les parlers occitans.
Un visiteur m’écrit :
À Toulouse, j’entendais plutôt, vers 1935-45, le terme » CHAPAÏRE » de chaper = manger goulûment. On appelait aussi gentiment un gamin qui s’empiffrait » uno chapetto » en milieu populaire.
J’ai un lexique indiquant le verbe » morfiar » = bâfrer : cela évoque l’argot » se morfaler « .