cat-right

Saou

Saou s.f. et français sel ont la même étymologie, latin sal qui est masculin ou parfois neutre. La différence entre saou et sel est que sel est masculin, tandis que saou est féminin L’occitan fait partie d’une grande zone qui comprend d’un côté le piémontais et le lombard ainsi que le roumain et de l’autre le catalan et l’espagnol. Le masculin se retrouve en portugais, italien et sarde. En latin sal était neutre ou masculin. La même racine indo-européenne sal- est à l’origine des formes germaniques, allemand Salz, anglais salt,néerlandais zout, grec halos etc. Saou trissa « sel fin » voir tris, trissa

Un tableau cubiste? non une saline de la Camargue !

Trissa; tris

Trissar « piler, broyer, fouler aux pieds » voir tris ci-dessous.

Trisson, trissou(n), trissadou (S) « pilon du mortier »; estrissar « broyer, écraser les mottes de terre ». Composé : trisso-moutos « maillet pour émotter », ancien occitan atruissar « opprimer moralement ». Il y a quelques attestations du dérivé trissouiro, trissadouiro(s) avec le sens « dents ».

Tris, trissa adj. « pilé, broyé », saou trisso « sel fin », est un dérivé du verbe trissa « piler, broyer » issu du latin *tritiare « frotter, piler, broyer ». Les représentants de *tritiare se trouvent en espagnol triza, hacer trizas « casser en mille morceaux », catalan estrijolar
« broyer »,  en occitan et dans l’Est de la Galloromania jusqu’en Champagne et les Ardennes. Le -ss- dans beaucoup de formes galloromanes doivent s’expliquer par une assimilation à l’adjectif tris.
D’autres mots qui ont la même origine : trissou(n), trissado, (etc. cf. Thesoc) « pilon, mortier », trissadouiros « les dents » à Marseille, trissagi « action de piler »; un composé en Dauphiné: trisso-krousto « un gros mangeur ».

Voir aussi le verbe triar « trier, choisir » et trida adj. « arable, meuble ».

Français triturer < latin triturare est un emprunt du XVIe s. au latin classique.

acatar, recatar

Acaptar, acatá 1.v.tr. « ranger, couvrir ». 2. v.r. « se baisser, s’accroupir, se tenir coi ». Pour des raisons phonétiques le FEW  suppose une forme latine *coactitare « presser, serrer » à l’origine des formes occitanes et franco-provençales avec un -t-, comme p.ex. en Lozère cata « couvrir » ou acata « couvrir »  attesté à Avignon.   Au XVIe siècle acaptage, acatage signifie « couverture ,  vêtements d’hiver »  en  languedocien. A St.-André-de-Valborgne (Gard) le catage s.m. est « l’édredon ».(Thesoc). Il n’y a pas si longtemps on invitait un visiteur   à  Manduel  ainsi:  « Achevez d’entrer, enlevez les acatages et remettez-vous « .

A la même famille appartient le mot recaptar, recatar « ramasser quelque chose qui traîne » .
Le sens du verbe réfléchi se recatà « s’endimancher;  se marier » (Manduel) n’a rien à voir avec le sens du verbe transitif! ! mais est lié au sens ‘vêtements’ du mot acatage
En français régional nous trouvons récate « provision de bouche; plat de résistance » que Lhubac explique ainsi : »ce qui a été mis de côté par précaution ».  Nous le retrouvons en ancien occitan recatar « cacher  » (Avignon, 1465). Recata (Manduel), lang. recate « économie, soin » , et à Millau cato-musso ‘ colin-maillard ‘ proviennent tous d’un sens « mettre de côté ».

Est-ce que  récaté « être mort » (Lhubac) s’est développé à partir du sens « couvrir »?

Le sens  « se tapir  comme un chat »  (Andolfi) me semble de l’étymologie populaire en le rapprochant du mot cat chat ).Cf. cach.

A la même famille de mots appartient acapta, acato « pierre de couronnement » (terme de maçon) , celles qui forment le cordon d’un mur de clôture ou de terrasse; on le fait avec de grandes et larges pierres surtout pour affermir des murs en pierre sèche » (abbé de Sauvages). C’est la pierre qui couvre. Dérivé du verbe acatá.

Je ne connais pas l’origine du -p- dans la graphie dite classique dans acaptar, recapta.

Christian Laval, informant fidèle, m’écrit:

Bonjour,
L’autre jour ma mère m’a dit: « Je l’ai récaté« …
A Montpellier « récater » s’entend comme « mettre de côté« , « cacher« , « garder pour plus tard »; ce qui confirmerait l’origine supposée: « L’étymologie est d’après le FEW un verbe non-attesté *coacticare « cacher »« 
Bonne continuation.

Adobar

Adobar v.tr. »accomoder, préparer, arranger, apprêter » a la même étymologie que le français adouber « armer chevalier » : le germanique *dubben « frapper ». L’évolution sémantique est bien expliquée dans le TLF s.v. adouber qui fait la remarque générale suivante: « Malgré la diversité des domaines dialectaux où il est fait usage de adouber, on y trouve toujours le sens de accommoder, raccommoder, mettre en état. »

Mirepoix

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La dormeuse de Mirepoix me signale le mot adoubairie, adouvairie dans le Compoix de Mirepoix de  1766. Il s’agit toujours   d’ habitations de tanneurs. Les nombreux exemples donnés par le DOM s.v. adobar ss.  confirment que cette famille de mots est très usuelle pour les tanneurs.

Le verbe adobar, adoubar est un exemple parfait de la flexibilité sémantique des mots. Le sens s’adapte aux besoins de ceux qui parlent. Adobar a pris les significations suivantes en occitan :

  • préparer, arranger. Dans l’Ariège (!) aussi « préparer le pré à être fauché ».
  • raccomoder
  • remettre un membre démis, rebouter
  • frapper, abîmer de coups (languedocien)
  • assaisonner (voir daube ci-dessous)
  • châtrer (uniquement en occitan : une attestation en ancien occitan: … e fo per causas per far enguens per far adobar ·i· caval. DOM)
  • tanner
  • vanner, cribler
  • Divers: coiffer (Briançon); ôter les fils des haricots verts (Nice); relier des futailles (Languedocien, S1 )

Pour l’abbe de Sauvages (S1) un adoubairé de boutos est un « relieur de tonneaux », un adoubairé de souliés un « saveteur ambulant » et un adoubairé de pels un « peaucier, mégissier ». D’après le Dictionnaire de l’Occitan Médiéval, l’adobaria est le nom de l’atelier des tanneurs.

daube provençale

 

Daube. Pour les Catalans adobar signifie aussi « cuire la viande à l’étouffée dans une marinade richement aromatisée » et ils parlaient d’une viande en adop ou a la doba. La cuisine catalane a eu une grande influence en Italie où est adoptée la dobba « à l’étouffée ». Au 17e siècle la daube a été introduite en France, dobo « étuvée » à Marseille, douogo « daube » en Aveyron. (Voir TLF daube).