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Aire,airiel

Aire, airiel

‘avec plusieurs membres quarantes deux cannes cinq pans aire airiels trelhatz et pollallier du coté du couchant trente quatre cannes’. (compoix Valleraugue 1625 tome 2 page 26)

Etymologie : latin area « espace libre, sol uni ». Eira ou aira en ancien occitan signifie « lieu vide et libre autour de la maison »        ( XIe siècle) mais déjà à la fin du XIIe aussi « aire à battre le blé ».

Plus tard a été créé le dérivé airée ou ayrie « quantité de gerbes qu’on met en une fois sur l’aire pour la battre », yerado ou eyrado dans le Gard, et naturellement on s’en est servi pour désigner cet espace et le verbe enairá « mettre le blé sur l’aire ».

Dans beaucoup de villages occitans nous trouvons une Rue des Aires ».

La forme airiel, airiel du Compoix n’a été attestée nulle part ailleurs à ce que je sache, mais je pense que le destrador local a voulu bien distinguer la place libre autour de la maison et l’aire à battre le blé.


le cercle est l’aire à battre le blé

Afenassar

Affenacé « ensemencé en pré » dans le Compoix de Valleraugue 1625: Pièce du long du Vallat arrosable nouvellement affenacé contenant pred . L’attestation du Compoix de Valleraugue est la première ! Voir le DOM s.v. afenatge « redevance de foin »

Provençal afenassa  » ensemencer un champ en pré « ,  Marseille afenassar, languedocien afénassa déjà chez l’abbé de Sauvages 1756 sont dérivés du latin fenum ‘foin’.  Le final pour le participe passé est bien sûr une francisation.

Ce n’est pas la même chose que français affener. (afenar et ses dérivés en languedocien, voir Alibert.) également dérivé du latin fenum. En occitan affenaje est  » l’action d’ensemencer en pré  » et le verbe français affener signifiait autrefois  » faucher  » Voir le TLF.

Cot, acout « pierre à aiguiser »

Cot s.f. « queux, pierre à aiguiser » et  français queux s.f. représentent le latin cōs, cōtem « pierre à aiguiser », comme l’italien cote  et le catalan cot. (FEW II, 1242) En occitan nous trouvons les formes cout(s), cot, acou(t), toujours avec le sens « pierre à aiguiser surtout (la faux) ».  Pour l’abbé de Sauvages co  est synonyme d’ esclafidou  (S1)

La forme queux du français a subi des déformations dues à l’homonymie avec queue du latin coda.

 

 

dalhaïre

L e dalhaire avec la cot. Remarquez le coufié, codier, codil sur sa hanche.

A Marseille et en ancien provençal est attesté le mot escoudo « marteau de carrier, servant à briser les pierres », qui doit dériver d’un verbe escoudar avec le sens « former la pierre à partir du bloc ». Le latin avait déjà créé le dérivé cotarium « coffin du faucheur » mot prononcé coufié, koudié, koutyé en occitan, couié à Champsaur, écrit « codier, codil d’après Alibert. Mistral donne une dizaine de graphies différentes suivant les régions.

La forme languedocienne coudiou, coudièou (Gard) est expliqué par le linguiste Gamillscheg comme une influence des faucheurs lozériens qui venaient faucher dans la plaine. En effet en Lozère cotarium devient régulièrement coudyo, transformée par les employeurs de la plaine en coudiou.   Cet article  qui doit être très intéressant est publié en 1922 dans la revue Archivum Romanicum t.6 (1922). Numérisé mais pas consultable…

Voir aussi l’article codou, code  « caillou ».

Gamillscheg (E.). Wetzstein und Kumpf im Galloromanischen. Arch. rom. 1922, t. 6, n o1, p. 4

Abes, àbet

Abes, àbet s.m.pl. « balles de blé ou d’autres céréales » (St-Pons, Capestang), abets (Aude, Toulouse), a(w)ets (Hte-Garonne). L’accent est sur le a-. L’origine est un mot latin apex, apicem  « sommet, pointe, tout objet de forme conique ». Les attestations sont relativement rares, une vingtaine, et étendues sur une région qui va de l’Hérault au Gers, auxquelles s’ajoutent probablement les mots basques abotz « criblures » et agotz « balle de blé ».1

Grâce au commentaire d’un visiteur,  une attestation  de l’Ariège  et une correction importante du sens. Ci-dessous une image d’ abets sur l’andain, et d’autres de balles d’épeautre et de blé :

 abets sur andain              balle d'épeautre     balle de blé Les balles  volent!

Je me demande toujours comment il a été possible qu’un tel mot latin avec un sens très spécifique a été transmis de génération en génération pendant 20 siècles, dans des villages qui sont tellement éloignés les uns des autres. Mais il est possible que des attestations nous manquent. Si vous connaissez le mot, contactez moi.

Claude Achard2  a eu la gentillesse de me contacter :

Abets : « Les faibles seront aux abets, c’est-à-dire la balle et les barbes qu’on emporte par gros ballots fort peu pesants » Raymond Escholier, Gascogne.p. 68.
“Àbets, abë, balles de céréales, vannures ; balle de grains, menue paille ; ballot de fourrage ; l’abe dou blad, la balle du blé, celle de l’avoine, voy. poussës ”. (DOUJAT, 18 ; LAGARDE, 21 ; CANTALAUSA, 30 ; de SAUVAGES, I.3 ; MISTRAL, I.6. GARY, 2 ; VESTREPAIN, 303 ; ACADEMIA, 3). Aver la clau dels abets, avoir la clé des menues pailles, ne pas être l’homme de confiance à qui on confie la clé du grenier à blé. (ALIBERT, 65).

Le mot apex a été réintroduit dans le milieu des paléontologues pour désigner le sommet des coquilles de certains fossiles, comme les ammonites. Je vois dans le TLF que cette remarque est la conséquence d’une déformation professionnelle et que apex a beaucoup d’autres significations.

                              

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  1. Le spécialiste du basque, M.Morvan, m’écrit :  « Que abotz et agotz soient apparentés en basque cela ne fait aucun doute (alternance b/g classique). En revanche il est plus difficile de les faire venir du latin apex « sommité », sans que ce soit impossible. Le passage du e latin à o basque n’est pas évident, mais ne me choquerait pas trop.  »
  2. Auteur de Les uns et les autres. Dictionnaire satirique pour le département de l’Hérault er quelques contrées d’Occitanie. Ed.Dolmens, 2003. 742 p.

Abalhar ‘gauler, abattre les noix’

Abalhar « gauler, abattre les noix ». D’après le Thesoc abalhar est courant dans les dép.19, 24, 46, 47, 82; abalhaire « celui qui gaule », seulement en Dordogne. L’étymon est le latin baculum « bâton », qui s’est conservé uniquement chez les Ch’ti (mi), baille « barrière » (Flandres, Rouchi, Picard). En occitan existe aussi  le verbe  dérivé abalha « gauler » dans les départements indiqués du sud-ouest.

A Colognac (Gard) a été relevé bacular « suisse, bedeau » nommé ainsi parce qu’il portait la crosse, le bâton de l’évèque. C’est un emprunt au latin d’Eglise bacularius « bedeau »

Français baguette   emprunté à l’italien , a la même étymologie.

abalhaire bacular