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Robert Geuljans le 13 Août 2011 dans
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Esclafidou « seringue d’enfant en sureau »(Puisserguier); Place des Esclafidous » « une placette à Nîmes », L’Esclafidou « gazette de Colognac ».
Michel Massol, auteur de « L’esclafidou et autres bélicoques » (Nîmes, Lacour), m’écrit:
« Il est évident que pour nous, habitants de Vauvert et de la région bas gardoise, l’esclafidou était une arme d’enfant à laquelle nous jouions encore dans les années 60. mais plus tard, terminus…Ce n’était pas une sarbacane, mais une espèce de pompe à vélo en sureau creusé et lorsqu’on emmanchait une branche dans ce cylindre préalablement garni de 2 petites boules provenant d’un micocoulier ( les bélicoques), sous l’effet de la compression, l’une des 2 partait, projetée par l’air ainsi comprimé dans un « pop » de bon aloi. L’arme avait une portée d’une quinzaine de mètres et, à bout portant, dans le lobe de l’oreille par exemple, ça faisait pas du bien !!! Arme saisonnière par excellence (il fallait attendre que le micocoulier veuille bien sortir ses fruits de la taille d’un petit pois), elle a été abandonnée rapidement, de sorte que la génération de mon petit frère (6 ans de moins que moi ne l’a pas utilisé ). »
Ci dessous un chasseur qui lance des projectiles d’argile sur les oiseaux avec un esclafidou. Dans un texte d’Avignon de 1646 est attestée la forme esclafadou avec le sens « mousquet ».
sarbacane
L’abbé de Sauvages connaît plusieurs expressions: « esclafi la parâoulo « articuler distinctement », lou lià tout esclafi « il lui a tout découvert » (S) et un esclafidou est « une bonde d’un bassin d’une pièce d’eau », la bonde étant un bouchon de bois. Sous la forme esclafidor Alibert donne aussi le sens « canonnière de sureau ». Le premier sens donné ci-dessus doit être oublié puisque les enfants ne jouent plus à cela. L e nom de la placette à Nîmes doit faire référence à une vanne.
esclafidou à Plantiers(Gard)
et le nom de la gazette de Colognac témoigne d’un esprit d’ouvert.
L’étymologie est une histoire ancienne et compliquée parce qu’il s’agit de mots qui viennent
- 1) d’une onomatopée qu’on trouve dans les langues romanes et ouest-germaniques : klapp qui signifie « coup, claque ».De cette onomatopée viennent des mots comme ancien occitan clap « clapet’, et clapar « frapper »; par métonymie ancien languedocien clapa « tache »; français éclabousser. Voir aussi le mot clapo « sonnaille » et le lien vers néerlandais klappen « frapper, applaudir »/ le flamand klappen « parler, bavarder ». En allemand existe un groupe de mots avec des sens proche de « coup, claque; bavarder etc. » dont la base est une forme klaff, voir Grimm . Il n’est pas impossible que cette forme allemande klaff soit à l’origine des mots franco-provençaux et occitans comme esclafar « écraser, giffler qn » et esclafir « éclater » et notre esclafidou.
- 2) L’autre possibilité est qu’esclafidou vient de la racine préromane klappa « pierre plate ». L’esclafidou des Plantiers ci-dessus est en fer, mais j’en ai vu beaucoup dans la Vallée d’Aoste qui étaient des simples pierres plates. Il me semble qu’une évolution sémantique « bonde, vanne » > « sarbacane » qui fonctionne avec un bouchon est convaincante. L’étymon serait plutôt la racine préromane klappa « pierre plate » , qui a donné aussi esclapo « éclat de bois »; esclapa « fendre du bois » ancien languedocien esclapaire « bûcheron ».
Le fait que les dérivés de l’onomatopée klaff et ceux de la racine préromane klappa ont souvent des sens très proches rend le solution difficile.
Toutes les formes avec un –f– comme esclaffar se trouvent dans le FEW dans l’article klapp onomatopée FEW II,734;
L’article suivant klappa « pierre plate » est l’étymon d’une grande famille de mots commune aux langues ouest-germaniques et romanes. L’esclafidou des Plantiers pose donc un problème. La place des Esclafidous à Nîmes aussi?