Magnolia. C’est en 1703 que Ch. PLUMIER, dans son Nova plantarum americanarum genera, p. 38 a donné le nom magnolia à cette arbre à fleurs pour honorer Pierre Magnol, le grand botaniste et directeur du Jardin botanique de Montpellier . Le nom a été repris par Linné, qui avait de très bonnes relations avec les frères de Sauvages et l’université de Montpellier. Ce n’est pas de l’occitan, mais j’ai été surpris par cette étymologie et le nom Magnol a bien un consonance occitane.
Voir l’article dans Wikipedia http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Magnol.
Pierre Magnol 1638-1715 agniolia
Magnan (forme adopté par le français TLF), magna, magnaou « ver à soie »; magnaghié ou magnassié « ouvrier chargé de l’éducation des vers à soie » (S). L’abbé de Sauvages ajoute qu’il préfère pour le français le mot magnaguier à nourrissier « parce qu’il est plus expressif et déjà reçu à Alais, un des centres où l’on entend le mieux cette éducation ».
Magnanerie (TLF), magnaghieiro (S) n’est pas seulement le bâtiment ou le local mais aussi « la construction des pieds droits & des tables sur lesquelles on place ces insectes ». (Ce dernier sens n’est pas mentionné dans le TLF qui ajoute pour le sg. le sens « sériciculture »). Pour l’abbé de Sauvages le mot magnagerie est le mot languedocien pour ‘l’art d’élever les vers à soie » et il mentionne comme mot français, inventé un siècle plutôt, la serodocimasie qui n’a pas pu s’imposer depuis.
et
Déjà en 1756 l’abbé de Sauvages a écrit que le mot magna, magnaou vient de l’italien mignato. En 1898, C.Nigra suivi par Sainéan et d’autres, a repris cette étymologie, probablement sans connaître le dictionnaire de notre cher abbé. D’après eux l’origine serait magnatto « ver à soie » des dialectes du nord de l’Italie ou du mot italien mignatta « sangsue ». Les deux mots remontent à une racine miñ- qui est à l’origine des noms du chat. A l’appui de cette hypothèse il cite les dénominations de la chenille issues de mots désignant le chat, telles que en Italie du Nord gat(t)a, gattina, gattola, ancien français chatte-peleuse, anglais caterpillar, et français chenille.
Je pense que les images suivantes montrent clairement que l’association ver à soie /chat, chaton est directe et n’a rien à voir avec la chenille.
chatons cocons de vers à soie chenille
Une autre proposition vient de Gamillscheg qui rattache magnan directement à l’italien magnatto « ver à soie » (que je n’ai pas pu retrouver avec ce sens précis) d’où le français maignat, magniaux du XVIe siècle, transformé en magna par étymologie populaire, association à magnar « manger », parce que le ver à soie mange énormément de feuilles de mûrier. En tout cas j’ai trouvé dans un lexique du patois de Venise un magnat(t)o participe passé de magnare « manger »: « Anke io ho magnatto la carbonara ieri sera!! » Il semble que le verbe magnare signifie justement ‘manger beaucoup’! : Magnare a ufo est Mangiare ingordamente ; Magnare anca le broze de San Roco est Mangiare in modo insaziabile, consumare tutto ; Magnare fora tuto est Dilapidare ogni sostanza, consumare.
Dans la première édition de son dictionnaire de 1756, l’abbé de Sauvages donne une liste de mots languedociens qui se rapportent à la sériciculture. Si cela vous intéresse, vous pouvez les voir en cliquant p.Sauvages 286, p.Sauvages 287, pSauvages 288 (avec Adobe Reader . Si non téléchargez-le!).
L’abbé était un fin connaisseur de la sériciculture. Il a fait beaucoup de recherches à ce sujet pour aider les Cévenols. Voir à ce propos ma page Sources, liens s.v.Sauvages. Il avait entendu parler du magnifique ouvrage de Anna Maria Sibylla Merian, 1647-1717 sur les insectes de Suriname, (Voir Wikipedia), dont il y a deux exemplaires à la bibliothèque nationale et dont vous pouvez voir les illustrations grâce à la bibliothèque d’Amsterdam, qui a fait un très beau travail de numérisations. Magnez-vous!! C’est magnifique. En très haute résolution. Une petite aide pour comprendre le néerlandais : beeld « image », beschrijving « description », terug « retour », vorige « précédent », volgende « suivant ».
Tous les dessins de Merian sont coloriés à la main ! Un dessin superbe intitulé metamorphosis sur votre écran, en cliqant ici.
Une page intéressante sur la magnanerie dans le Roussillon, spécialement à Cattlà.
ShareMagnin « ferblantier, chaudronnier ambulant » (Camargue). Magnin est la forme typique de l’occitan à l’est du Rhône et du francoprovençal. La forme magnin a été introduite par les chaudronniers ambulants provenant des vallées alpines du Piémont italien où magnin a été formé à partir de la forme magnan par changement de suffixe. Il est devenu assez tôt un nom de famille, attesté dès le XIVe s. à Grenoble. D’après un site il y a actuellement plus de 6500 Magnin‘s en France.
Magnan est la forme de l’ancien français et des patois de la langue d’oïl.
L’étymologie de magnin n’est pas tout à fait clair. Je résume l’article *manianus > ancien français magnan dans le FEW qui discute les différentes propositions parce qu’il montre que l’étymologie moderne doit tenir compte des facteurs historiques, géographiques, phonétiques et sémantiques. Les attestations jouent également un rôle important.
Madur ‘mûr’. vient du latin maturus « mûr ».
Le maintien du -d- provenant du -t- latin est caractéristique pour le niçois, le provençal, le languedocien et le gascon, à l’exclusion d’une partie du limousin et du dauphinois1 et rattache cette zone au catalan et à l’espagnol maduro contrairement à l’italien maturo qui a maintenu le -t- d’origine.
Voir la carte mûr, mûre de l’ALF carte 891 pour la limite de cette évolution. Le lien ne fonctionnait pas, je vous conseille donc de suivre les instructions que vous trouverez dans la page que Lexilogos consacre à l’Atlas linguistique de la France. .
L’anglais mature « mûr » et maturity « maturité » ont été empruntés directement au latin.
Madurá « mûrir » vient du latin maturare « mûrir ».
Voir FEW VI/1,533 maturus
Moi-même locuteur Auvergnat et ami de nombreux locuteurs dans toute l’Auvergne, j’ai également eu de nombreuses fois l’occasion d\'échanger avec des patoisants limousins, et je peux vous certifier que cette source est absolument fausse… De plus, j’ai pris le temps de mettre le nez dans les quatre dictionnaires suivants afin de vous le démontrer plus clairement :
• Omelhièr (auvergnat)
madure/madura/madurar
• Bonnaud (auvergnat)madûr/madüra/madürâ
• Karl-Heinz Reichel(auvergnat)
madûr/madüra/madürâ/amadürâ
• Lavalade (limousin)madur/madura/madurar
Même les parlers de transition oc/oïl — dits du croissant — maintiennent ce -d- intervocalique, c’est dire à quel point ce phénomène est loin d’être une particularité provenço-languedociano.
• Lexique de Maurice Roy (Croissant/Fresselines 23)
madu/madure/madura
Et nous n’avons qu’évoqué le cas de madur\ !
Mais il en va évidemment de même pour des mots comme : badalhar (bailler), bordadura (bordure), chadena (chaine), chadeira/chadiera (chaise, chaire), coifadura (coiffure), fada (fée), levadura (levure), machadura (bleu, hématome), padela (poêle), etc…
Ainsi que le -d- intervocalique de -ada- correspondant au -ée français : armada (armée), bofada («soufflée» = soufle), bramada («bramée» = cri ), butida (poussée, impulsion), jornada (journée), moneda (monnaie), maisonada (maisonnée), mudar (muer), tombada (tombée), etc…
Macip, mancip «serviteur, employé, jeune homme », macipa « jeune fille », mancipeta « fillette ». Il y a beaucoup d’attestations en ancien occitan, la première date de 1188 mancip « clerc de notaire ».
Etymologie : latin mancipium « acquisition légale », > « esclave acheté » et mancipia « esclave femme ». Le sens « jeune homme, jeune femme » est probablement dû à l’influence du verbe émancipare « affranchir de la puissance paternelle ou tutelle ».
Catalan macip m. ‘Esclau. | Home, esp. jove, al servei d’altri, encarregat de fer alguna cosa. l’aprenent’. (DIEC). C’est-à-dire ‘esclave’ ou ‘apprenti’ !
Maset « petite maison de campagne, petite ferme; maisonnette rustique où l’on va passer le dimanche » est un dérivé en –ittu de mas « ferme, maison, demeure ». D’après les dictionnaires de français, entre autres par Littré, ce dérivé est caractéristique pour la région de Nîmes – Avignon. Un visiteur me signale le sobriquet mazetié pour les Nîmois qui allaient chaque dimanche dans leur mazet‘. Cette photo vient du site de G. Mathon qui consacre une page intéressante au maset nîmois.
Lou Maset du Jardin de la Fontaine
L’origine est le participe passé mansus du verbe latin manere « rester, habiter » qu’on trouve comme substantif dans des textes et des inscriptions depuis le Ve siècle avec le sens « maison » et « domaine ».
Le mot a également existé dans le nord de la France, comme en témoignent de très nombreux noms de personnes (Dumas, Delmas) et de noms de lieu (Metz, Meix, Mas), mais il y a perdu beaucoup de terrain depuis la disparition du système féodal concernant la propriété (un sujet à approfondir!) Mas n’est vraiment indigène que dans le Midi, où il s’est maintenu jusqu’à nos jours avec le sens « ferme ». Il faut dire que les agents immobiliers en abusent depuis que les prix ont flambé.
En français il a été emprunté à l’occitan au XIVe siècle.
Le mas du Valdeyron à Valleraugue où j’ai habité pendant 20 ans
Autres dérivés: masada, masaria « tour d’une ferme, hameau »; masatgier « campagnard »; masièr, masièra « qui habite un mas »; masuc « petite construction montagnarde où les bergers d’Auvergne s’abritent et font leurs fromages en été »; masagé « campagnard » forme rencontrée par un visiteur dans un état civil du XIXe siècle de la région d’Albi : masagé de Rafialou, d‘Ambialet.
Pa(n)kezo, pankero et pa(n)let « belette ». Le premier type se retrouve dans les parlers espagnols, en Navarre et en Aragon paniquesa ou à Benasque paniquera. L’origine de cette composition curieuse serait panis + caseus « pain + fromage ». Le deuxième qui vient de panis + lactem est limité au gascon.Il y a deux tentatives d’explication de ces noms.
panis +caseus
Si le sujet Tabou linguistique vous intéresse, lisez S.Freud, Totem und Tabou. Cherchez euphémismes, tabou avec Google.