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Plan

Plan s.m. « surface plate », adj. « bon, bien; lisse, plat « . Etymologie :  latin planus « plat, uni ».

En langue d’oïl il y a eu confusion entre les représentants de planus  devenu [plain] et  plenus [plein] avec une prononciation identique. (Cf. le mot  néerlandais plein  « place ».)  Cela ne  s’est pas produit en occitan plan<mais > plen.

Les expressions citées par Alibert planponh « une poignée de main pleine » et plan-cant « plein chant » sont donc des emprunts au français. D’autre part l’adjectif plan n’est attesté en français que depuis 1520 et pourrait être un emprunt à l’occitan et non pas au  latin comme prétend le TLF. qui écrit  que l’expression plan-plan « doucement » vient du provençal, où plan « doucement » est attesté depuis la 2e moitié du XIIIe siècle, dans le roman Flamenca.

Dans le  Compoix de Valleraugue est mentionné un  plan cayriel. Je pense que cela veut dire : « un plan  « surface plate » où peut passer une charrette » un  cayriel,   dérivé de carrus « voiture » emprunté par le latin au gaulois. J’ai l’impression que le scribe a voulu franciser le mot (déjà ancien) occitan (camin ou pon) carral « praticable aux voitures ».  Comparez aussi ancien occitan Planil, planayo, planoulet « petit terrain plat ».

Une autre possibilité : cayriel = cairel  « un plat pavé » d’après Alibert. Dans ce cas l’étymon est latin vulgaire *quadrellus « carreau ». Voir Carrel.

Pichon, pitchoun

Pichon, pitchoun et pichouline « petit » viennent d’ une racine pitch- dont nous trouvons des représentants en occitan, en franco-provençal et plus au nord jusqu’en franc-comtois et dans l’Ouest jusqu’au Nord de la Loire. En dehors du galloroman  nous le retrouvons  dans les parlers italiens, par exemple le ligure pchitu, jusqu’en serbo-croate et en albanais.(Z 15, 112;Z 54,488).

Une variante se trouve déjà au Ier siècle chez Martial pisinnus qui s’en sert avec le sens « garçon ». Les formes avec –i-,   pitch , sont beaucoup plus fréquents que les formes avec –e- petch-, pech-.

Le dérivé le plus connu à Manduel est La Pitchouline, le bulletin de communication de la mairie. Ailleurs c’est une « variété d’olive, bonne pour être confite » En marseillais la pichoulino a un bout pointu et on la mange marinée. Elle est mentionnée comme olive picholine dans le dictionnaire de l’Académie de 1835, le  masculin  picholin désigne l’arbre.  A Bayonne un pitchoun est un « gagne-petit, rétameur ».

La picholine : Originaire de Collias, petit village gardois, c’est la principale variété française d’olives vertes mais c’est lorsqu’elle est bien noire et pleine d’huile qu’on la ramasse pour en faire la fameuse huile d’olive Picholine. Huile de si bonne qualité qu’elle est en passe d’obtenir l’appellation d’origine contrôlée.

pati-coufi, patin-coufin

Pati-coufi ou patin-coufin « et patati et patata ». Les deux formes se trouvent dans le Midi. L’abbé de Sauvages donne aussi l’expression patin-patourlo qu’il traduit par « pati-pata ou bredi-breda , mots inventés pour exprimer la trop grande rapidité de quelqu’un à s’exprimer & pour s’en moquer ».

Il s’agit d’une onomatopée comme la forme française.   Voir le TLF s.v. patati

A Marseille est attesté le verbe apatia « repaître, rassasier; rendre commun, vulgariser » et à Puisserguier l’adjectif apatiat « trivial ».

Dans les sites de lexilogos et ABC de la langue française, vous trouverez des discussions à ce propos.

Remarque I. Bredi-breda  fait partie d’une famille de mots  dont l’origine est brittus  « breton ». Voir le TLF s.v. bredouiller.

Remarque II. Une autre onomatopée est blabla. A Pézenas est édité Le journal local des délocalisés. French English magazine. avec le titre Blablablablablah….

No comment.

Pantais

Pantais s.m.« rêve, songe; râle (Foix); respiration pénible, oppression; asthme (Rouergue) ».  Une amie originaire de la région de Cannes, me précise qu’un pantais est un ‘rêve pénible’.

Pantais, attesté depuis le XIIe siècle, est un dérivé du verbe pantaisar ‘rêver’. L’étymon de pantaisar est le grec phantasioun ‘avoir des visions’. Le verbe n’est pas attesté en latin, ce qui s’explique par le fait qu’il s’agit probablement d’un mot de la langue populaire emprunté à une période ancienne et qui n’a pas été accepté par la langue latine classique.. De là aussi les formes avec un p- au lieu d’un f-, que nous retrouvons dans le nord de l’Italie pantezar (Venise) et en catalan panteixar ‘respirer péniblement’.


un pantais

En ancien occitan pantais a déjà les sens « inquiétude, souci, angoisse, trouble, confusion », et même « cauchemar ». Quand on a un vrai cauchemar, on a le sentiment de suffoquer, de respirer avec peine. Voir l’article cauchemar dans Wikipedia.  En occitan pantaisar est « faire un mauvais rêve », en ancien français panteisier, pantoiser devient carrément « avoir l’haleine courte, respirer avec peine ». Français rester, laisser pantois veut dire « rester hors haleine ».  Dans l’ouest de l’occitan la forme pantaissa prend aussi le sens de « haleter ». Béziers connaît deux formes pantaiá « rêver » et pantaissá « haleter ». A la même famille de mots appartiennent encore le toulousain pantegá « être essoufflé, aveyronnais pontugá , et en  français panteler comme les emprunts breton pantes « asthmatique »et basque pantatsj « poussif ».
Anglais to pant « haleter  » et le subst. pant  « halètement » ont été empruntés au français. to be panting for breath « être tout essoufflé ».  Cf. Harper.

 

cliquez sur l’image  pour (a)voir le cauchemar.

Pisar

Pisar « battre les chataignes » du latin *pinsare « broyer »‘.

Autrefois on frappait des sacs revêtus d’une peau de mouton et remplis de chataignes sur un billot. Dans une page d’images  du Musée des vallées cévenoles il y a un dessin de l’utilisation  d’un  sà pisadou. En languedocien appelés des sa pizadou  ou pisador,   dérivé d’un verbe *pinsiare « piler, broyer », devenu  pizar en ancien provençal, qui a donné dans le Gard et en Ardèche  pisár avec une spécification du sens « décortiquer les châtaignes en les battant ».

Un pizaire devient ainsi « celui qui décortique les châtaignes ».

A la même famille de mots appartiennent  piza « auge en pierre à huile », attesté dans le Gard au XIVe siècle, piso « auge ; lavoir » (Alès) et pisouót « petite auge pour la volaille »(Aveyron).

Français piser « battre la terre » est emprunté au lyonnais à l’époque de Voltaire. Nous constatons de nouveau que les mots s’adaptent aux besoins des locuteurs.

Une description intéressante dans Le-Musee-des-vallees-cevenoles  à Saint-Jean-du-Gard.

Pila

Pila « mortier, abreuvoir, récipient de pierre pour l’huile » comme le  latin pīla « mortier ». Ancien occitan pila « mortier; récipient en pierre dans lequel on conservait l’huile; vase de pierre servant de bénitier; mesure publique pour les grains ». Marseille pièlo « auge pour les bestiaux » ; pile « réservoir aux huiles dans une savonnerie »  Diderot, (Encyclopédie 14, page 721b Planche-II-Pile-a-huile; (une très belle planche en PDF)   et Planche II description la description des planches en format PDF ).  Diderot  décrit là la fabrication du Savon de Marseille.

La question d’un visiteur de l’Aude qui me demande:

Connaissez vous le sens exact et l’étymologie du mot PIALE ?
Dans la montagne noire audoise on semble l’utiliser pour désigner un abreuvoir ou un bac à eau en pierre alimenté par une source détournée.

m’oblige à reconnaître que je n’ai toujours pas complété l‘index occitan. L’évolution phonétique de pīla  avec un -i- long suivi d’un -l- dans certains  parlers est un peu curieuse:  pīla  a abouti à piela , piala , par exemple piello à Aix-en-Provence, piero « auge » dans le Var, pyelo « auge; lavoir » dans le Gard, piala   dans l’Aude, mais pilo  dans la Hte-Vienne et le Périgord.

Le sens « évier » se retrouve en catalan, « auge » en espagnol et portugais.

Même si le mot est mentionné dans quelques dictionnaires du français (TLF pile 4) , il n’est indigène que dans le Midi.

pile à savon de Marseille

Pauta

Pauta « patte », n’a pas la même origine que l’occitan (?) pata « patte ». (Voir TLF s.v.patte) .

Il semble que la famille *pauta « patte » est d’origine préceltique.

Nous trouvons des représentants de *pauta dans le Nord-Ouest de la Gallo-Romania (Flandres, Picardie, et en anglo-normand poe au XIIe s.) et en occitan (cf. Thesoc pour la répartition actuelle de pata/pauta), en catalan pota « patte », en néerlandais poot, et avec adaptation de l’initiale en allemand Pfote.  L’ancien français poe pote  est passé en anglais paw et le mot occitan est passé en basque potika   « à 4 pattes ». A Toulouse a pautos est « à 4 pattes », mais de pautos « à plat ventre ». En Vendée et le Poitou la pote est la « cane ».

Il y a de nombreux dérivés comme pautada « poignée » , paoutal  « coup de poing » (Tarn), paoutou « main, paume », languedocien paoutejá, pautinejá « manier ». Français potelé « gras, rebondi » en parlant des mains est également un dérivé de pote « patte, main », cf. TLFpote 1 .

Un  composé avec ad : s’apaoutá « tomber sur les mains ».

La « renoncule des prés » est désignée par paoutlubo , loupauto ou paouto de lou. D’après le Thesoc ce dernier désigne « l’achillée mille feuille » dans l’Allier; voir le mot  tranuga Alibert l’écrit lopauta, lopipauta.   

              tranuga =

 

Patis, patus

Pati ou patis, patus signifie d’après Alibert « pâtis; pacage, préau, cour intérieure, basse-cour, cloaque, fumier, place, loge à porcs ».

Les premières attestations, du XIIe au XIVe siècle, viennent de Nîmes, Montpellier et Mende: pati « pâturage communal », mais « cour d’une maison » à Carcassonne,  » lieu où chacun peut jeter les objets dont il veut se débarrasser » à Marseille. Dans les parlers modernes nous trouvons des sens secondaires comme « espace non cultivé autour d’une grange » dans le Dauphiné, « basse-cour; lieu d’aisance » en provençal, « lieu où l’on rassemble les ordures d’une maison » à Marseille (A.Brun dans « Le Français de Marseille » 1931) et « lieu d’aisance » (attesté par le dictionnaire d’Achard de 1785 et par A.Brun). Pour l’abbé de Sauvages le pati est la « basse cour ». Pati est aussi attesté à Toulouse et dans le Béarn.

Vous trouverez u ne attestation récente de la basse plaine de l’Aude dans les commentaire. (Cliquez sur  le titre patis, opatus pour voir les commentaires en bas de page).

Dans des textes rédigés en latin du moyen âge on trouve fréquemment des mots qui n’existaient pas à l’époque des Romains. Les clercs donnaient souvent une forme latine à des mots utilisés dans la région. Ainsi on trouve dès le XIIe siècle le mot patuum avec le sens « pâturage communal » dans des manuscrits écrits dans les  départements  de la Vaucluse, des Bouches du Rhône, du Gard, de l’Hérault et de la Lozère. Par exemple : dans un manuscrit Comptes des clavaires de Montagnac du XVe siècle.

 

 

 

 

Le Paty de la Trinité est un village d’Arles. En Camargue un pati est une ‘Lande de terre, recouverte d’herbages ou viennent paître taureaux, chevaux et moutons; terre inculte, mauvais pâturage ».

Le commentaire d’un visiteur montre bien que la langue est vivante et s’adapte à l’environnement. Il m’écrit:

Pour moi, au XVII ème siècle, controuvé par de nombreux documents patus signifie l’espace inculte, piétiné par le passage des hommes et bêtes rentarnt à la maison ou au bercail, situé au ras des bâtiments, propre à rien sinon à la circulation . Un exemple dans un document familial :

Noble Jean Charles ….seigneur du dit lamothe (en astarac qui est en gascogne ndlr) tient et possède noblement une maison patus jardin terre bois et prés

tout tenant appellée maison seigneuriale  confronte levant  midi chemin public ….. du fief … contient 5 arpents et 14 places

la hiérarchie des terres (les vignes y sont absentes…) est claire : patus désigne un espace intime, réduit en taille, privé de tout rapport et cependant indispensable.  De plus je ne pense pas forcément que patus , utilisé en gascogne , soit un mot gascon..Bien à vous

Le FEW   hésite  à attribuer à la famille patis, patus une origine grecque   patos « petit chemin, blé battu; boue, saleté, excréments; sol » un dérivé du verbe pateo « fouler avec les pieds »,  pour des raisons d’ordre phonétique.

Pour des raisons d’ordre phonétique, l’étymologie de l’occitan pati ne peut pas être le même que celui du français pâtis « paturage »  qui est un dérivé de pastus le participe passé de pascere « paître », puisqu’en occitan le -s– devant un -t- en latin s’est conservé  jusqu’à nos jours, comme par ex. dans  testa « tête », pascas « pâques » etc.