cat-right

Na

Na « dame », ou damna.  L’étymologie est le latin domina devenu très tôt domna  en ancien occitan. D’après Alibert actuellement seulement dans la langue littéraire. Je viens de recevoir une publicité pour:

« Na Balfet »,lo primièr roman de Sèrgi Viaule.Las edicions Princi Negue.

Une visiteuse du Tarn me donne les compléments d’information suivantes:

On trouve quelques noms de lieu avec cette appellation : Na Delmas par exemple qui indique que le propriétaire était une femme. (veuve le + souvent ) Vous avez répertorié cela: Na de Dama ou Damna. Quand le propriétaire était un homme dans la plupart des cas on nomme le lieu : « en » {én} Ex: En Guilhèm, En Teste etc… je n’ai pas trouvé « en »
ds le site .
Dans plusieurs villages quand on parle de  » la Dòna  » il s’agit de la Rivière
Le Pégorier mentionne dona  comme toponyme dans l’Aveyron pour le XIIe siècle, et sous une forme francisée  done en occitan et dans les Alpes. Sous la forme na  en Gascogne en partculier.  Dona  « narcisse » dans le Dauphiné.
D’après le FEW dama  « narcisse des poètes » est aussi attesté en Savoie et dans la Drôme.  Sous la forme daou(a)neto  à Bagnères (Hte Garonne) et madona  à Barcelonnette. Beaucoup d’autres plantes ont des noms commençant par dama-
Certains animaux  sont aussi appelés dame, notamment la belette  en Gascogne: daounabere, daoune bere. 

A Marsillargues (34) dama est la « chouette » . A Castries (34) et Lafitte-sur-Lot (47) c’est la dama blanka. A Galargues (34) la damassa. (Thesoc). Une explication de cet emploi de dame se trouve probablement dans la symbolique des oiseaux. Voir les Bestiares du Moyen Age. Sur le symbolisme de la chouette, cliquez ici.

Voir aussi l’article damojano.

FEW bandjwan

L’article BANDWJAN « donner un signe »

En consultant les statistiques de mon site, je constate que la page FEW est de plus en plus souvent regardée. Le FEW est

le plus grand DICIONNAIRE ETYMOLOGIQUE qui existe.
Büchi (Eva) / Chambon (Jean-Pierre), 1995.
« « Un des plus beaux monuments des sciences du langage » : le FEW de Walther von Wartburg (1910–1940) », in : Antoine (G.) / Martin (R.) (éd.), Histoire de la langue française 1914-1945, Paris, CNRS-Éditions, 935-963.

Rien de comparable n’a été fait pour aucune autre langue. Voici un deuxième exemple de l’énorme travail qui a été entrepris par Walther von Wartburg et son équipe. Mieux encore sera de suivre ce lien : Une présentation du FEW avec des

  • Aides à la lecture: 1. l’ordre géolinguistique (pour télécharger la carte cliquez! ) 2. bibliographie des sources qui sera publiée en 2008
    3.Un glossaire allemand- français.
  • Projets en cours : 1. la refonte de la lettre B et 2. la possibilité de télécharger 14 articles ! 3. Promesse de publication sur le web d’un index onomasiologique.

Voici ma petite contribution: à gauche l’article du FEW, à droite mes explications. Chaque article du FEW est composé de deux ou trois éléments : après l’étymon 1. les formes et les significations 2. l’histoire de cet étymon du latin jusqu’à nos jours, de ses dérivés et composés, et l’explication de l’agencement des formes et des sens et si besoin 3.des notes à la fin.

Il y a un ordre fixe dans l’ordre des mots donnés, applé le « strich ». L’apprentissage de la consultation du FEW demande quelques efforts, mais cela vaut la peine. La localisation précède la forme et le sens, la date et éventuellement la source la suivent. Les formes du moyen âge en premier, suivi des formes et des sens des temps modernes. Toutes les abréviations, comme Apr., Nice, awaadt. Hérém. sont expliqués dans le Beiheft. Par exemple Béz. = Béziers et la source pour le parlers de cette ville est Jean Laurès, Lou campestre. Montpellier 1878.

 

bandwjan (gotique, burgond) « donner un signe  »

I. Ancien occitan bandir verbe actif …. Nice bandi; ancien occitan bandir …. ancien vaudois, Suisse(avec le même sens), ancien occitan (même forme) « bannir », …(1369  les comptes d’Albi), en Gruyère.  Dans les patois modernes: , Valais bandi ……, Hérémence (Suisse) même forme = bandi …., Vallée d’Aoste même forme, sens « bannir », centre du Dauphiné …..
Dep. des Hautes Alpes même forme, sens « lâcher.. », Nice bandi « bannir; chasser », Béziers, Puisserguier bandi, marseillais bandir « exiler » dans le dictionnaire d’Achard, Aix-en-Provence bandi meme sens, dans le dictionnaire de S.A.Pellas, Alès même forme, sens « chasser… », Puisserguier « meme forme + mêmes sens; bannir », béarnais bandi « bannir ».
Dérivés. Nice ………..Ancien dauphinois (=avant le 16e s.)bandeis ..; Evolène (Valais) …………., Vaudois (= les villages vaudois dans le Piemont) …………………………………..(Source: Roletto; Archivum Romanicum 23, p.414). Ancien béarnais banidor ……………………..Ancien occitan bandimen subst.masc………..
ancien béarnais bandiment « …… », moyen français , même forme « ban » source le dictionnaire de Cotgrave; marseillais bandissament « exil » source Achard.
Latin médiéval (7e-14e s.) ……..(Wallis = Valais); …………………………………………………………Lourties (Valais)
Lallé (un hameau de la commune St.Jacques, Htes Alpes, Gap, St Firmin) Source: D.Martin, Dictionnaire du patois de Lallé. Gap 1907-9. eibandir « ….. ».  ………Ancien occitan ( source : Raynouard M. Lexique....; Levy E. Provenzalisches …; etc.) desbandir « .. ». Ollon (Vaud). …

 

 

 

Composés. Nice, bearnais…………………..Anien occitan forbandir « bannir » (Levy, Petit dictionnaire provençal-français)………………………………….Toulouse ….. ….(G = P.Goudelin Oevres 1887, voir Mistral), Cahors…..Caussade, Agen …….., Aveyron …………Béarn……..
Bayonne ….. L.F = la source, …………..
Rhodanien (= provençal de la vallée du Rhône).
Npr. = ocitan moderne. Source principale : Mistral.

 

II.1. Français moderne bandy subst. masc.. « ………. » ( 1640 d’après Dictionnaire Général; Richelet Dictionnaire de 1759) bandit (depuis le dictionnaire de Miege), le sens « homme…. » depuis le Dictionnaire de l’Académie 1740), Suisse « …. », Vallée d’Aoste « … ». Albertville …
……….Lantigné en Beaujaulais ( J. Descroix Glossaire du patois de L. Paris 1946) ………………….Français moderne… ………………………….(Dictionnaires de l’Académie 1798-…) ……………………………………………………………………………….

…… (depuis le Dictionnaire de l’Académie 1835). Dérivés (en galloroman) Français moderne……..(depuis le dictionnaire français -allemand de Mozin, ed. de 1859). – Metz….
Lorrain (source J.F.Michel Dictionnaire des expressions…)

…2. Nice …………

 

 

 

 

L’étymologie.

Du gotique bandwo  » signe  » est dérivé le verbe BANDWJAN « donner un signe. » Celui-ci vit en occitan et en franco-provençal. (En haut I), en plus en italien bandire, catalan bandir. Espagnol et portugais. bandir, qui sont attestés relativement tard, ont été probablement empruntés au catalan ou à l’ancien occitan. L’extension du mot sur le nord du franco-provençal rend un emprunt au burgond vraisemblable pour cette région.
Le développement sémantique « proclamer » > »exiler » attesté pour la première fois au XIVe siècle , est probablement dû à l’influence du fr. bannir.
En italien, le part. parf. bandito a pris comme substantif la signification « bandits, voleurs ». De là les emprunts II.1. Le subst. fem. bandita signifie « riserva di pascolo ». De là les emprunts 2. – Meyer-Lübke n°930.

Comairèla

Comairèla « belette » (dans l’Aude, Hte-Garonne, Tarn, Thesoc) et le Gers (FEW II, /2, 945b et n.3) vient du latin commater « marraine, sage-femme ».

Le sens courant de comaire, coumaire est « marraine ». A Toulouse une coumayre est « une femme qui aime à se réjouir ». A Avignon une coumaire est « une bouteille de 3 litres » d’après Mistral. Tout cela est compréhensible. Mais la belette??. Et sans lien   avec ces régions, nous le retrouvons en Espagne: comadreja, en Sardaigne camedrenga (< *commatricula ),  à Naples , Molise, et Campobasso en Italie au sud-est de Rome cummatrella , ainsi qu’en Silésie  en Pologne. (AGl2, p.50). Voir mon article moustèlo sur le rôle de la belette dans la mythologie et une explication de la grande variété des noms de cet animal domestique.

Foriscape: un crime devenu un droit

Foriscape « droit aperçu par le seigneur en cas de mutation » Ce mot  composé de capere « saisir » + le préfixe  foris « for- »  (comme dans  forfaire) est né dans le latin  administratif du haut Moyen âge.

(Source A. Thomas,  Essais de Philologie française.  Paris , 1897. p.87).

Il semble qu’au début du IXe siècle foriscapium  (Du Cange ) avait encore le  sens d’un  « don » illicite, contraint par la force, exaction : per vim vel contra jus captum…..  « saisi par force ou conte le droit » et  tributul haud debitum  « une contribution vraiment pas due » :

(DuCange, et la p. suivante)

Nous voyons qu’une infraction ou un crime peut devenir un droit.

 

Besal, bezaou

Besal « canal, rigole, bief d’un moulin » est un dérivé en –ale d’une racine celtique *bedu « canal, fossé ». *Bedu est un des nombreux mots celtiques dans le domaine de l’agriculture que les Galloromains ont repris aux Gaulois. Gallois (pays de Galles) bedd « tombe », breton bez « tombe » appartiennent à la même famille. En plus on le retrouve en Piémont et en Ligurie des régions autrefois habitées par les Celtes.
Si vous voulez tout savoir sur les formes piémontaises et ligures il faudra aller à Toronto, Canada,

ce qui ne pose plus de problèmes grâce à internet, pour consulter l’Archivio glottologico italiano, vol 14(1898), page 358 où Nigra discute l’étymologie de béal.

D’après les données du Thesoc, le mot besal a pratiquement disparu de l’occitan actuel : 2 attestations dans l’Ariège (« fossé; rigole ») et une dans la Creuse (« rigole »).
Deux visiteurs me renseignent : 1) « Bésal = canal d’arrosage était (est ?) le mot utilisé pour désigner les canaux situés dans la partie haute des près servant à les arroser dans la région de Brassac (Tarn).   Le mot y a pris un sens spécifique. 2) besal: il y a à Siran-34 un tènement « le Béal » sur la rive gauche de l’Ognon le long d’un ancien « besal » qui alimentait un antique moulin à eau devenu tannerie au XIXe siècle. Ce moulin est porté sur la carte de Cassini sous le nom de « Mn Siran ». Voir aussi un site Le Béal concernant la commune d’Ollioules ( Var) : « 1825 : Le Béal n’est pas à la charge de la Commune , mais à celle des arrosants et des usiniers . »

Un troisième visiteur me renvoie vers Frank R. HAMLIN, Toponymie de l’Hérault Dictionnaire Topographique et Etymologique, éd. du Beffroi, Etudes Héraultaises, 2000, XLII + 449 pages, qui donne plusieurs toponymes héraultais. Lui-même a entendu le mot « béal » utilisé pour un petit canal parallèle à un ruisseau au domaine de Saint-Ferréol (commune de Nizas), ce canal alimente une « pansièira« , une réserve d’eau. Il devait y avoir là un moulin.

Pourtant d’après le FEW il y a de nombreuses attestations dans les dictionnaires dialectaux anciens, surtout pour les parlers franco-provençaux et occitans, et cela depuis le Moyen Age : ancien lyonnais: bessal « canal, endroit creux », ancien occitan bezal ‘bief d’un moulin; rigole ». Dans certains dialectes provençaux et surtout en franco-provençal, le -z- intervocalique est tombé (comme dans asinus> ase > ay ) et le résultat a été une triphtongue: Marseille byóu « fossé d’écoulement ». Presque partout et cela depuis les copains d’Astérix le sens est resté « rigole ou canal d’arrosage ».

L’abbé de Sauvages écrit : bezaou ou boutado, le bief d’un moulin et non pas béal qui est un barbarisme.

Une page poétique est consacrée au Béal du moulin de Mirepoix (Ariège), dans le blogue de la dormeuse: « Du Contirou au pont de Raillette » et avec beaucoup de photos prises pendant une promenade Du Pont de Raillette au moulin.
Dans une nouvelle promenade au chateau de Bonrepos à Bonrepos-Riquet, elle raconte que Pierre Pol Riquet, …Instruit par l’observation du Béal à Mirepoix, ….il conçoit le projet d’utiliser les eaux de ruissellement pour assurer par dérivation l’alimentation de son futur Canal [du Midi].

besal

Canal du Midi

Gavach, gavatch, gavot

Gavot « paysan haut cévenol ou lozérien » , gavatch, gavach désigne toujours des habitants des montagnes1 . L’étymon est une racine *gaba« gorge, jabot, goitre » qui vit en Italie et dans les parlers galloromans. (FEW IV, p.4)  Dans le TLF gavache  est défini comme « vieux » ou « régional ». Dans le DMF est signalé un sens spécifique pour la Provence : « celui qui fqit le métier de portefaix ».

Pour l’abbé de Sauvages un gavo est un « montagnard du Gévaudan » et il dit que les

Espagnols appliquent le mot gavacho aux montagnards du Gévaudan qui vont faire leur moisson et à tous les François.

Un visiteur me signale: « En Roussillon un gavatch est un habitant de l’Aude. Il semble donc qu’un Gavatch vienne toujours du nord et pas nécessairement de la montagne. » Je pense que c’est la nuance péjorative qui a pris le dessus. C. Achard donne une dizaine de sobriquets provenant de plusieurs départements dont gaba est la base .

Nous retrouvons gaba dans les parlers du nord de la France p.ex. en picard gave « jabot de volaille ». En ancien provençal existe le dérivé gavaych « goitre » qui existe toujours dans les parlers modernes, p.ex.  à Aix gavagi « gosier » et languedocien s’engavachà « s’obstruer en parlant de la gorge » (S), à  Manduel c’est « avaler de travers » (ALLOr 1181).

Le dérivé gavaych orthographié gavach en occitan et français régional est très vivant, nommé par ex. dans  le  ML 8-2004 comme son cousin gavot, mais le sens a bien changé! Au XVe siècle il y a des attestations de l’occitan gavag ou gavach « ouvrier étranger ». Le mot est même passé dans les dictionnaires français gavache « injure que les Espagnols adressent aux Français des Pyrénées et du Gévaudan, qui vont exercer en Espagne les emplois les plus vils ». Nous voyons que les temps changent!

Je ne peux m’empêcher d’énumérer les autres définitions données, parce que cela vaudrait une étude sociologique approfondie! A Lasalle (Gard) gavache « montagnard, homme grossier », à Puissergier « montagnard de la Lozère, du Tarn, de l’Aveyron »; dans l’Aveyron « un habitant du Gévaudan », et dans le Gers « une personne étrangère au pays ». Dans les vallées de la Seudre et de la Seugne dans le dép. de la Charente on appelle gavache « l’idiome saintongeais des environs de Blaye » qui est peut-être Occitan ???. A La Réole gavache est  « la population de langue d’oïl installée dans le pays du bas Dropt , la Gavacherie ».

Le dérivé gavot désigne depuis les premières attestations en provençal du XIVe siècle « un habitant de la partie montagneuse de la Provence » et en languedocien « un montagnard » avec une nuance péjorative de « homme grossier, individu gauche » etc.

Ménard traduit gavotus par « montagnard » dans son Histoire civile, ecclésiastique  et littéraires de la ville de Nismes, vol.IV, p.332

Un texte du XVe siècle, dit simplement que M. Claude Lantelme  est un gavot:

La  relation sémantique entre la racine  *gaba « gorge, goître » et gavot, gavache « montagnard »  est la maladie du goitre.  Le goître étant plus fréquent en montagne que dans la plaine: « On parle d’endémie goîtreuse lorsque 10 % au moins de la population est goîtreuse; Certaines aires géographiques sont électivement représentées notamment mais non exclusivement les zones de montagne). Les facteurs étiologiques sont multiples et peuvent être associés : – carence iodée surtout ( mais non constante) avec iodurie inférieure à 50µg/jour ». Les exemples donnés  par le TLF comme illustration du mot goitre  montrent que le  goitre endémique est souvent associé au crétinisme.

Un gavot ou gavach est donc littéralement « un goitreux » et ensuite un « crétin ».

S’egargavatšar, s’engavachà « Avaler de travers ». Dans les villages autour de Montpellier les témoins pour l‘ALLor ont traduit « avaler de travers  » par  s’egargavatšar, s’engargalhar etc. probablement par confusion avec le type garg-; dans le Gard c’est le type s’engavachà qui domine presque partout.

Dans un site en espagnol, il y a un résumé d’autres explications : http://www.1de3.com/2004/12/29/Gabacho/

Un visiteur, bon connaisseur de l’espagnol, a suivi le lien et m’écrit: Sur le site espagnol que vous donnez en lien, je découvre la locution « hablar en gavacho« . Il me semble que les Français ont rendu aux Espagnols la monnaie de leur pièce ! L’étymologie de « parler [français] comme une vache espagnole«  est donnée comme une corruption de « parler comme un basque espagnol » ; mais il me semble qu’il est plus convainquant de dire que c’est une adaptation de l’espagnol « hablar en gavacho » ! Une explication plus convaincante que celle qui propose le confusion de basque et vache.

Les dernières compléments d’informations viennent du Chili! gabacho

A mon avis il n’y a pas de contradiction entre le toponyme Gave, anciennement Gaba « rivière » en Béarn, et le sens « goitre ». (Voirgaba) Surtout en montagne, les rivières passent souvent par des gorges. Cf. Wikipedia  Gave  .  Mais d’après le TLF des recherches récentes montrent qu’il s’agit plutôt d’un mot préroman gabatro* :

D’apr. leur forme et celle de leurs dér. Gabarret, Gabarrot (v. Raymond, op. cit.), ces mots semblent reposer sur une base préromane *gabaru, *gabarru (Rohlfs Gasc.3, § 69, 479; cf. fin viiie-début ixes. lat. médiév. gabarus Théodulfe d’apr. Dauzat Topon. éd. 1971, p. 138); v. aussi J. Hubschmid, Pyrenaënwörter vorrom. Ursprungs, § 42 qui rapproche les termes pyrénéens de l’a. prov. gaudre « ravin, ruisseau » reposant sur une base préromane *gabatro à laquelle il rattache le lat. imp. gabata, gavata « jatte, écuelle » [v. jatte] – et Id., Sardische Studien, § 23. Une base préromane *gava « cours d’eau » (FEW t. 4, p. 83a) paraît moins satisfaisante. Bbg. Pégorier (A.). À travers le Lavedan. Vie Lang. 1962, p. 468.

 

  1. D’après René Domergue, les Gardois disent gavot. Du côté de l’Hérault le mot gavach ou gabach est préféré. (article à paraître

sansogno ‘cornemuse’

Sansôgno « cornemuse; chant monotone et intermittent »  vient du grec συμφονια (symphonia)  « concert » dans le sens le plus large possible. Zambonha ‘concert’, zambonhaire ‘musicien’ ont a même origine.  Cette forme du mot nous est venu de l’Italie du Nord.  L’évolution sémantique de « concert »  vers « instrument de musique s’est produit très tôt au IIIe siècle.  La forme sampogna  se trouve déjà en ancien italien chez Dante et nous le retrouvons dans les parlers du Nord de l’Italie et dans les Alpes.

Dans les parlers occitans existe une grande variété de formes et de sens. Je cite les principaux:

  • Champòrgna à Barcelonnette  »  lyre de fer qu’on fait sonner entre les dents »,  champòrni « guimbarde » Marseille, zambougnaire « joueur de vielle » à Alès.
  • samphogno « orgue de Barbarie » à Limoges
  • fanfounià « faire résonner de bois, du métal ou du papier comme si l’on jouait de la mandoline » provençal
  • founfoní « mandoline (vieux), objets d’amusement des enfants » provençal
  • sansogno  « cornemuse », sansougnarié « répétition monotone, radotage » à Montpellier.

Vous trouverez plus de formes et de sens dans le FEW XII, 489  ainsi que des explications sur la naissance de toutes ces formes à la fin de l’article du FEW.

cornemuse GrandMa soeur  Carla a eu la bonne idée d’enregistrer un orchestre  da joueurs dans les environs  de La Romieux dans le Gers.

Cagnard

Cagnard « lieu chaud, endroit en plein soleil« . Dans notre région où le soleil peut taper fort , nous trouvons une grande famille de mots qui viennent tous du latin parlé *cania  « chienne  ». Quelques exemples: à Alès encagna « exciter, envenimer  » , l , cagno  » paresse  » , cagnotte  » coiffe de femme en indienne « , cagnoutà   » être la cagnoto à qn. »  Acagnarda « abriter une plante » , ou comme verbe réfléchi « se blottir au soleil » une expression qui se trouve déjà dans le Dictionnaire languedocienfrançais  de l’abbé de Sauvages paru à Nîmes en 1756.
En français cagnard  » paresseux, fainéant «.  A ce propos l’ abbé fait deux remarques :  » le François n’a pas de nom propre pour rendre cagnar  » et plus loin il écrit  » ceux qui prennent le soleil au cagnar sont des gens désœuvrés à qui on a donné probablement pour cela le nom de cagnar, qui est François dans ce sens, lorsque le Languedocien étoit la langue courante d’une bonne partie du Royaume & celle de la Cour.  » Voir ci-dessous n° 6.

Le mot *cania a été formé probablement déjà en latin. Nous le retrouvons en italien cagna et dans les patois du Nord de l’Italie cania a donné de nombreux dérivés, comme dans le Midi de la France. Dans le domaine de la langue d’oïl c’est le type chienne dérivée du masculin chien donc pas de cania qui domine.

*cania

Une question peut se poser : Pourquoi cania et pourquoi pas vacca ou n’importe quel autre animal? La réponse nous est donnée par l’astronomie: L’apparition de Sirius, l’étoile la plus importante de la constellation du Grand Chien, tombait dans l’antiquité en même temps que la solstice de l’été le 21 ou 22 juin.Un autre nom pour Sirius est Canicula. En Occident, la canicule était censée survenir au moment où Sirius se lève et se couche en même temps que le Soleil, c’est-à-dire grosso modo, au Moyen Âge , pendant le solstice d’été. Canicule ou Sirius se lève et se couche pendant cette période précisément avec le soleil et elle n’est donc pas visible.. Les croyances populaires attribuaient à la présence de Sirius les chaleurs plus vives de juin. Par métonymie cette période de grande chaleur est nommée ‘canicule‘.

La constellation  Canis major

La canicule tombe actuellement plus tard,  en juillet, parce que le soleil ne se retrouve pas exactement au bout d’une année à la même place dans le ciel ; il est en retard par rapport aux constellations, et ce retard augmentant tous les ans, le soleil se lèvera dans la constellation du Grand Chien successivement en août, en septembre, en octobre, et enfin en plein hiver. De telle sorte que, dans quelques milliers d’années, nos descendants accuseront peut-être la canicule de ramener sur la terre les froids rigoureux de l’hiver ! Pour tout savoir suivez le lien.

Cagno, cagne. A partir du sens « chienne », nous trouvons le mot cagne et ses dérivés avec des significations qui reposent soit sur la ressemblance physique d’un chien avec des objets comme par exemple des chenets, soit sur les traits de caractère des chiens qui cherchent un endroit au soleil pour ne rien faire (français cagnard  » paresseux « ), qui sont lâche, etc. Cagne et ses dérivés sont indigènes en occitan et ils ont été empruntés massivement par le français et les patois de la langue d’oïl. En occitan nous trouvons entre autres les groupes sémantiques suivants:

1. Descendance: Languedocien de la bono cagno « de la bonne sorte » (Mistral), mais en ancien occitan n’existent que des expressions péjoratives: de puta canha. Cette expression a dû naître dans un contexte comme « né(e) d’une chienne ».
2. Mauvais caractère : Languedocien faire la cagno  » faire la grimace, dédaigner » et provençal cagno « mauvais humeur ». A ce deuxième groupe appartiennent aussi acagna « irriter » (Var) et marseillais encagnar « provoquer », Alès encagna « irriter ». Emprunté par le français: caigne « femme de mauvaise vie ».
3. Qui a les genoux tournés en dedans : Marseille cagnous
4. D’autres animaux: ancien occitan canhot « milandre, chien de mer » ; argot parisien cagne  » cheval « .
5.Plantes. cagnots « petits chiens »,Orlaya grandiflora.
6. Divers objets creux : ancien occitan canha « genre de machine de guerre », plus précisément sorte de nacelle comparable à celle de l’E.D.F. d’aujourd’hui pour réparer les lignes en hauteur;  le tonnelon comportait un bras qui s’élevait en hauteur. A l’extrémité de ce bras était installé une grosse plate-forme sur laquelle les archers se plaçaient pour pouvoir tirer au-dessus des remparts. Celle-ci, au moyen d’un contrepoids ou d’un treuil, élevait au-dessus des fortifications des arbalétriers ou archers qui criblaient de flèches les défenseurs des courtines, puis étaient déposés sur celles-ci dans le but d’abaisser le pont-levis. Je pense qu’au Moyen Age cet instrument faisait penser à une « chienne », mais je n’ai pas encore trouvé d’images.

   

cagnotos

Languedocien cagnotte « coiffe de femme en indienne » a fait penser à une sorte de nacelle. Le français cagnotte a été emprunté à l’occitan, plus spécialement à l’agenais cagnoto « petite cuve utilisée pour écraser le raisin », de là « tirelire » et « somme recueillie dans une tirelire  »
6. Endroit ensoleillé cagnard , qui en français a pris le sens de « paresse, flemme » , mais pas en occitan comme l’a déjà remarqué l’abbé de Sauvages. Le mot cagnard est mentionné dans le TLF avec la mention « provençal et languedocien  » en ce qui concerne le substantif, l’adjectif cagnard « paresseux  » par contre est limité au nord du gallo-roman.

A Fleury dans l’Aude  cagnard a pris un sens sympathique:

Suivant le vent, s’il souffle comme aujourd’hui et qu’il soit fort, je connais des combes à l’abri du CERS où on retrouve ces petits bonheurs que les paysans appellent des cagnards, des petits pays en soi parce qu\’il y a la falaise derrière, que tout d’un coup on se sent comme un lézard sur la roche chaude… » Gaston Bonheur / Radioscopie 8 mai 1978. http://www.ina.fr/audio/PHD99229022

Voir le FEW II, 183

Français régional, la Cigale et la Fourmi

Plusieurs visiteurs ont eu la gentillesse de m’envoyer la  fable  LA CIGALE ET LA FOURMI façon provençale !!!  écrite par Caldi Richard . Je crois qu’elle voyage librement sur le web. Une excellente occasion pour moi de m’en servir pour illustrer la notion de français régional.

Mode d’emploi :
gras rouge = lien vers l’article dans mon site.
gras bleu = note en bas de page.
gras marron = lien vers le Trésor de la langue française TLF.

 CIGALE ET LA FOURMI façon provençale ! par Caldi Richard

Zézette, une cagole de l’Estaque, qui n’a que des cacarinettes dans la tête, passe le plus clair de son temps à se radasser la mounine au soleil ou à frotter avec les càcous1 du quartier.

Ce soir-là, revenant du baletti2 où elle avait passé la soirée avec Dédou, son béguin, elle rentre chez elle avec un petit creux qui lui agace l’estomac.

Sans doute que la soirée passée avec son frotadou lui a ouvert l’appétit, et ce n’est certainement pas le petit chichi  qu’il lui a offert, qui a réussi à rassasier la poufiasse. Alors, à peine entrée dans sa cuisine, elle se dirige vers le réfrigérateur et se jette sur la poignée comme un gobi  sur l’hameçon.
Là, elle se prend l‘estoumagade3 de sa vie.
Elle s’écrie :
–  » Putain la cagade! y reste pas un rataillon4, il est vide ce counas.
En effet, le frigo est vide, aussi vide qu’une coquille de moule qui a croisé une favouille. Pas la moindre miette de tambouille.
Toute estransinée5  par ce putain de sort qui vient, comme un boucan, de s’abattre sur elle, Zézette résignée se dit :
–  » Tè vé, ce soir pour la gamelle, c’est macari, on va manger à dache6 « .
C’est alors qu’une idée vient germer dans son teston.
–  » Et si j’allais voir Fanny ! se dit-elle.
–  » En la broumégeant un peu je pourrai sans doute lui resquiller un fond de daube « .
Fanny c’est sa voisine. Une pitchounette brave et travailleuse qui n’a pas peur de se lever le maffre7

 Aussi chez elle, il y a toujours un tian qui mijote avec une soupe au pistou ou quelques artichauts à la barigoule.
Zézette lui rend visite.
–  » Bonsoir ma belle, coumé sian ! Dis-moi, comme je suis un peu à la dèche en ce moment, tu pourrais pas me dépanner d’un péton de nourriture ! Brave comme tu es, je suis sûre que tu vas pas me laisser dans la mouscaille.
En effet, Fanny est une brave petite toujours prête à rendre service.
Mais si elle est brave la Fanny elle est aussi un peu rascous (= rascas « teigneux »?) et surtout elle aime pas qu’on vienne lui esquicher les agassins quand elle est en train de se taper une grosse bugade; ça c’est le genre de chose qui aurait plutôt tendance à lui donner les brègues.
Alors elle regarde Zézette la manjiapan8 et lui lance:
–  » Oh collègue ! Tu crois pas que tu pousses le bouchon un peu loin ? Moi !!!, tous les jours je me lève un tafanari comaco pour me nourrir ! et toi pendant ce temps là, qu’est-ce que tu fais de tes journées?
–  » Moi !!???? « , lui répond la cagole
–  » J’aime bien aller m’allonger au soleil ! ça me donne de belles couleurs et ça m’évite de mettre du trompe couillon.  »
–  » Ah ! Tu aimes bien faire la dame et te radasser la pachole9  au soleil, et bien maintenant tu peux te chasper.
–  » Non mais ???!!!! , qu’es’aco ? C’est pas la peine d’essayer de me roustir10 parce que c’est pas chez moi que tu auras quelque chose à rousiguer, alors tu me pompes pas l’air, tu t’esbignes et tu vas te faire une soupe de fèves.

Texte de Caldi Richard

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  1. Cacou (ou kakou) : Jeune qui veut se montrer. Orthographe incertaine. on voit aussi caique, quèque, kaike. »Les bandes jaunes sur la carosserie noire, ça fait cacou! »
  2. Dérivé récent de ballare « danser »
  3. « douleur d’estomac » et puisque  l’amour passe par l’estomac « serrement de coeur »
  4. en provençal : retaïoun  « petit morceau, rognure » de re– + tailler
  5. du verbe estransinar « harasser; v.r. se dessécher d’inquiétude, pousser des cris perçants » d’après Alibert;  du latin ex + transire passer au-de là
  6. Voir Wiktionnaire à dache
  7. Terme d’origine obscure qui désigne le postérieur dans l’expression : se lever le maffre. « Mon père, y s’est levé le maffre toute sa vie aux Chantiers ». tous les jours pour remplir son cabas. Marius Autran
  8. manja  « mange » + pan « pain »
  9. D’après Alibert « pot-pourri, tripotage; potée pour la volaille ».  D’après le Wiktionnaire :(Provence) (Marseille) (Vulgaire) Sexe féminin (organe sexuel).(Marine) Filet de pêche en forme de poche pour attraper les petits poissons
  10.   Occitan  rostir  « escroquer » du germanique raustjan

Darnagàs

Darnagàs, darnégas, « pie grièche » ; animal mythique qui sert à faire peur aux enfants. » (Camargue),tarnagas  » pie grièche; nigaud » (abbé de Sauvages, qui décrit plusieurs oiseaux de cette famille), tarnagas « imbécile » (Mathon).

et il ajoute s.v. tarnagas :

de très belles photos ici

En fr.rég.tarnagas « imbécile » est attesté par And et Joblot.  Darnagas  « imbécile » est aussi piémontais.  Pour Lhubac c’est un « enfant turbulant » (peu usité), et je le retrouve dans une site consacré à Marseille : « Darnagas : oiseau passereau peu méfiant. Par extension : nigaud, qui fait des bétises (utilisé surtout pour qualifier un enfant) » .

La forme avec un t- initial est limité aux départements Gard / Lozère et les régions voisines, mais un visteur de la région Vias – Agde vient me signaler que chez lui on dit également tarnagas pour désigner « une femme dans le sens de femme pas fréquentable ».

En franco-provençal et en provençal on trouve plutôt des formes avec d- comme en Camargue.  Frédéric Mistral écrit dans LI DARBOUN ENGENIAIRE :

Sabès que se travaio à-n-un camin de fèrri que, partènt d’Avignoun e remountant Durènço, dèu ana finqu’à Turin en travessant lou Mount Cenis. Mai aquéu Mount Cenis fau que se trauque, e, lou pertus aura delong mai de tres lègo. Tres lègo souto terro, dins la roco ! fai trambla. Certo, li engeniaire soun pas de tarnagas e an pre sis amiro e si mesuro.

Un Anglais  a étudié la pie grièche qui utilise pour son nid une certaine herbe. Il écrit :

« This is the Filago spathulata of the botanists; and the bird also makes use, though less frequently, of the Filago germanica, or common cotton-rose. Both are known in Provencal by the name herbo dou tarnagas, or Shrike-herb. This popular designation tells us plainly how faithful the bird is to its plant. »

herbo dou tarnagas

A Montfavet (84) il y a le chemin du Tarnagas. D’après ces citations il semble que la forme avec t- est également connue en provençal.

Le tarnagas a une mauvaise renommée. En français : Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio). En allemand elle s’appelle Würger littéralement « étrangleur », en néerlandais worger « étrangleur »; dans certaines régions de l’Angleterre butcher bird  « oiseau boucher » parce la pie-grièche embroche sa nourriture, des souris, de gros insectes etc, sur de grandes épines ou sur du fil barbelé, comme le boucher fait avec la viande. Le sens « animal mythique qui sert à faire peur aux enfants » de darnagas, tarnagas  y est probablement lié. Une autre attestation du même sens se trouve dans ce site : « Darnagas : Animal mythique comme le loup-garou « .

Un bourdon embroché par un darnagas.  Source Photos Merci !

 Dans le monde des oiseaux par contre,  elle a une bonne renommée d’après le Dictionnaire Languedocien- Français de l’abbé de Sauvages. La pie grièche est connue comme un farouche défenseur de son nid, en faisant beaucoup de bruit et de mouvements, à tel point que d’autres oiseaux aiment faire leurs nids près d’elle pour être protégés.

L’étymologie du premier élément darn- ou tarn- n’est pas très clair. Le FEW le rattache à un élément germanique très ancien *darn- « ébloui, étourdi », mais les attestations de cette racine en occitan, en dehors de darnagas etc. sont très rares.
Le deuxième élément vient d’un ancien haut allemand agaza « pie » dont nous parlons à propos des mots languedociens agasso, agassin etc.