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Èstra "balcon"

Èstra « balcon, fenêtre » vient de  extera  la forme pluriel neutre de exterus   « ce qui se trouve dehors ».

Estre  a aussi existé en français et  se retrouve dans les parlers du nord et de l’est du galloroman. En occitan il est plutôt limité au provençal et l’auvergnat.

Suivant les localités  èstra  prend des sens plus ou moins spécifiques,  comme dans la haute vallée de l’Ubaye « balcon où l’on met sécher le bois à brûler », en Auvergne éstra, étra est la « petite terrasse en saillie, en haut de l’escalier extérieur en pierre et qui est couverte par un toit ».  En francoprovençal étre a pris le sens spécial de « aire pour battre le blé ».

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estro en Auvergne

Un  estroun  est un « petit balcon » à Barcelonnette,  et une « lucarne » en limousin.

A Die existe le mot esseis  « les êtres de la maison » , d’après le FEW un emprunt au français qui subi l’influence du verbe être   du latin essereUn peu étonné par cette étymologie , j’ai demandé à Han Schook, excellent connaisseur du parler de Die, ce qu’il en pensait. Il m’a répondu

« los èsses » (pron: louzèssei, avec vocalisation du s du pluriel)  son en effet  « êtres de la maison ».  A mon avis il n’y a pas de confusion entre  estro   et  èsses. En Diois le verbe « être » est  èsser (pron: èssé), ou le moins courant  « estre« . Comme en français  être,  diois  « èsse » peut servir comme substantif pour désigner des personnes.  Exemple:
Nosautres, sièm quatre èsses, e vosautres, siètz nòu a la meison.

Je suis sûr qu’il a raison. « los èsses » diois n’a rien à voir avec les balcons.

Escafit, -ida

Escafit, escafida adj. »étriqué » (Pan); « étroit, étranglé » (S2). En ancien occitan escafit signifie « svelte, allongé, élégant », comme eschavi en ancien français.  Raynouard le traduit par « potelé » , mais dans le contexte « svelte » est peut-être mieux. Il s’agit en tout cas d’une qualité. Jugez vous-même:

Le verbe de l’ancien français eschavir signifie « parer, façonner. »

Le FEW propose comme étymologie un ancien franc *skapjan « créer, former » , néerlandais scheppen, allemand schöpfen. (Cf. Grimm). Escafit, -da faisait partie du vocabulaire de la culture chevaleresque du Moyen Age.

Uniquement en provençal, notamment à Marseille, nous trouvons l’expression parlar d’escaffi « parler ironiquement à quelqu’un » et escaffi s.m. « chagrin, inquiétude », escaffiar « mépriser, rebuter, dédaigner ». Je ne vois pas très bien quelle évolution sémantique peut expliquer celà ??

Ebria, ebria

Ebri, ebria « ivre » du latin ebrius « ivre ». De nombreuse formes pour la voyelle initiale depuis l’ancien occitan: ibre, iure, ieure. Voir ebriago.

Le TLF en suivant le FEW remarque que : « Les parlers gallo-romans préfèrent, comme le fr. pop. des mots plus expressifs.. » Un coup d’oeil sur l’Atlas linguistique de l’occitan montre que cela vaut aussi pour l’occitan : acotrat, bandat, bombat, briat, choc, conflat, embriac, empegat, fin, fiolat, gris, ibronha, pete, pintat, plen, rede, sadol, tibat, tordos, torsut et je suis sûr que la liste est incomplète.

La preuve : un visiteur qui me signale que le chanteur languedocien Joanda dans la Gazette connaît le mot molan et qu’il explique dans la Gazette de Nîmes qu’on appelle le raisin un sac à mol, expression tiré du mot molan « ivrogne ». Molan se trouve dans l’Alibert avec le sens « pêche molle; personne molle: sorte de raisin » et est dérivé du latin mollis « mou ».

Potona,poutouno

Potona adj. f. « mignonne ».  Dans l’Alibert apparaissent au milieu des nombreux dérivés de pot « lèvre », les adjectifs  potonet (1), potoneta adj. MANIÈR « craquant, craquante » ainsi que potonta nom f. « poupée », potonton nom m. « petit poupon » loc., potontonejar v. intr. MANIÈR « pouponner ». L’idée que ces mots appartiennent à la même famille que poutou(n) est à première vue tentant. A qui d’autre donner un poton qu’à une potona?

Mais dans le dictionnaire de l’abbé de Sauvages sont mentionnés  poutoto (S1) et dans S2 poutouno « mignonne » et son diminutif poutounero. Mistral cite poutounto « poupée » en Rouergue, poutoutounéja « dorloter, faire sauter un enfant sur ses genoux ».

Un doute s’est installé et en cherchant je trouve que le latin connaît en effet un substantif pŭtus « petit garçon, enfant »,  une variante de pusus  (Gafiot) attesté chez Virgile, qui s’excuse de l’emploi de ce mot familier! Il n’apparaît pas dans d’autres textes classiques, mais seulement plus tard dans des glossaires. Putto est encore vivant dans les parlers de la plaine du Po comme dans les parlers occitans. Il y a aussi quelques attestations du lyonnais .

Titre :  Putto con vase di fiori

Le FEW a rangé dans le même article pŭtus, les noms provençaux de petits poissons comme le poutino « cepola » (Var), ou des « petites sardines », nom qui est passé en français dans la forme potinière « maille très serrée de certains filets avec lesquels on prend de petites sardines » (Littré). Poutiniero > français potinière « filet à mailles serrées » est resté dans les Larousse jusqu’en 1932.

poutino cepola rubescens

Plusieurs étymologistes (Diez, Dauzat) pensent que putana « prostituée » est aussi dérivée de putus. Le FEW préfère pour des raisons sémantiques et phonétiques l’étymologie putidus « pourri, gâté, puant, fétide ».

Acabar

Acabar, v.tr. et intr.  « finir » est dérivé du latin caput « tête » , et au figuré : « bout, extrémité ». En ancien occitan on disait issir a cap  » venir à une fin ». Acabar comme français achever, a probablement déjà été formé en latin tardif. Voir également d’autres dérivés de caput : capitelle, capejar et caput.

Acabaïre « dissipateur, prodigue » est limité à l’occitan. Voir ocobaïre  la forme de Valleraugue.(Gard)

acabaïre, ocobaïre

Acabaire, ocobaire « dissipateur, prodigue »(Valleraugue). Atger p.64: Oprès l’esporognaïré, ben l’ocobaïré « A père avare, fils prodigue ». Forme typique pour Valleraugue et environs : tous les –a– non accentués > o. Mistral nous donne les sens que voici:

Etymologie: acabaire est un dérivé du verbe acabar « achever ». Le sens « dissipateur » est limité à l’occitan , du dauphinois jusqu’en Gironde. D’après le FEW acabar vient par l’intermédiaire de l’expression issir a cap de (ancien français venir a chief de)   » venir à bout de  » d’un latin accapare1 dérivé de caput « tête, bout » mais pas tous les étymologistes sont d’accord; voir à ce propos le TLF. Le français connaît aussi le mot acheveur mais seulement avec un sens technique.

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  1. FEW II, 339a-340a

Bouf-

Boufadou, « soufflet rustique en sarbacane », dérivé de l’ancien occitan bufa « soufflet de forge ».  Un bouffadour  à Murat (Cantal) était un « canon de fusil avec lequel on allume le feu en soufflant dedans ». Un des nombreux représentants d’une onomatopée *bouf ou *pouf- qui désignent quelque chose de « gonflé », puis « souffler », aoc. bufar, bofar « souffler ». Bouffer, fr.rég. « souffler » dans l’expression « le vent n’arrête pas de bouffer. » (Mathon,2003).

Boufounados « facéties » dans le titre du livre du nîmois Roustan, Boufounados en vers patois ounté y a dé qué riré é dé qué ploura, Nîmes, Durand-Belle, 1829, fait partie de la même famille de mots, mais le sens a été emprunté à l’italien buffone comme le français bouffon.

En néerlandais existe le mot bof  « oreillons, maladie des enfants ». Le sens le plus ancien de bof est « coup, baffe » (ca.1350). Cf. EWN. Le résultat d’un coup est souvent que la partie du corps frappée *boffe « gonfle », sens attesté en moyen néerlandais. Mais à la fin du XIXe siècle l’évolution du sens a pris une tournure inattendue > « chance », et le verbe boffen « avoir de la chance » a été créé, probablement sous l’influence d’expressions een slag slaan comme français réussir un coup.

Boufarèou  « santon de la crèche, l’ange boufarèou » Ce dérivé de bouf est déjà attesté dans S. avec le sens « joufflu ». Dans la chanson des santons : « L’ange Boufareou qui sonne la trompette ».

Boufaire, « jeune lapin ». Le sens attesté est « grand mangeur », du verbe boufa « manger gloutonnement », dér. de l’onomatopée *bouf  « gonflé ».

Boufigue « ampoule dans les mains » . Dér. de *bouf-  En occitan le sens va de « petite enflure » jusqu’à « vessie ».

Anoublo

Anoublo s.m. »taureau d’un an » (Camargue) est attesté en occitan depuis le 16e s. Du latin annuculus (une transformation de anniculus) qui aurait dû donner anoulho, une forme qu’on trouve e.a.dans l’Aude. La terminaison -bl- s’explique par contamination du mot doublo « pouliche ou génisse âgée de deux ans ».

 

Il est évident que la notion « agé d’un an » est centrale. Le mot s’applique à d’autres animaux; cela dépend de l’élévage local: anolh« agneau d’un an » et ailleurs, « chèvre, vache d’un an » . Dans l’agriculture c’est une « jachère ».

Pounent

Pounent « vent d’ouest ». s.m.

Français ponant « ouest » est un « emprunt à l’ancien provençal ponen «ouest, vent d’ouest» (XIIes. ds RAYN. et LEVY Prov.) qui remonte au latin populaire sol ponens «soleil couchant» (d’où aussi italien ponente, espagnol poniente), expression. formée avec le part. prés. de ponere «se poser, se  coucher (en parlant des astres)», sens supposé d’après l’italien porre «se coucher (en parlant du soleil)» (à la place du latin occidere (occident*) » CNRTL

Acoquelar

Acoquelar, acouquli 1.v.tr. « mettre en grumeaux »(Mathon), 2.s’acoquelir « se grumeler, se rapetisser »(Alibert) a été créé à partir du substantif coquèl, du latin coccum. Latin coccum signifie « cochenille, excroissance d’un arbre ».

Coccum a pris les sens  » baie, noix, oeuf, coquille de la noix », par analogie avec la forme de ces excroissances et sous l’influence du mot câouquïo « coquille » issu du latin conchylium. En languedocien a été créé un diminutif couquel « flocon, grumeau; petit enfant; femme mal mise ».  Ensuite coquel désigne tout ce qui  ressemble  à une coquille, comme languedocien coucou « bouton de rose » ou « oronge en boule, non encore développé » ou « cocon du ver à soie »;  coquo « châtaigne »;   le verbe couquelá « mettre en grumeaux » et s’acouqueli « se mettre en grumeaux ».