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Brega, brego ‘lèvre...

Ce qui frappe en étudiant la répartition géographique de ces attestations est le fait qu’elles se trouvent sur une très grande étendue, des Cévennes jusqu’à St.Maximin et Hyères, avec une certaine concentration dans le triangle formé par Avignon, Nîmes et Arles. Le fait que brega est attesté à St.-André-de Valborgne, un village isolé des Cévennes, pourrait nous suggérer qu’il s’agit d’un mot fossile. Mais St.-Maximin et Hyères ne sont pas des lieux isolés.Pour en savoir plus, j’ai cherché le mot brego dans le Trésor de Mistral :

Dans les exemples et expressions qu’il fournit, on voit bien qu’ à la campagne c’est un outil, un brisoir de chanvre, sens qui a disparu avec la disparition de la culture du chanvre, en ville par contre le sens « bouche, mâchoire » est dominant.

Estront Estront « étron, fiente », attesté dans les Landes et les Pyrénées-Atl. avec...
Haricot haricot ragoût semences de phaseolus vulgaris Voir l’article ...
Trampelar Trampelar « chanceler, tituber; languir; traîner; grelotter ».  A trampoulados...
Lambrusquiero Lambrusquiero de vedigan « cep de vigne sauvage servant à fabriquer une badine...
Jazen Jazen,   fenno jazen « femme en couches » . Voir  jaïre

Feda

Feda « brebis ».

Le latin avait un substantif fetus ou fœtus « enfantement » et un adjectif fetus « ensemencé, plein, gros ». Au féminin feta a pris le sens « qui a accouché » et substantivé « mère ». Ce sens s’est conservé en gascon hedo « femme qui vient d’accoucher », comme en italien feta et fetare « accoucher ». Feta a pris le sens spécifique de brebis déjà en latin; sens qui s’est maintenu en occitan, franco-provençal et dans certains patois en Italie.

Après le Moyen Age feta a été remplacé par les représentants de vervex (> brebis) dans le Nord-Est du galloroman. Pour les différends noms de la brebis en occitan voir le Thesocs.v. brebis

Uniquement en galloroman nous trouvons dérivé feto, fetonem avec le sens « petit d’un animal » faon en ancien français, sens qui se restreint à « petit de la biche » au XVe siècle (1re att. 1360 DMF). De là anglais fawn avec lez même sens. En occitan nous trouvons fedon, fedou(n) « poulain » mais aussi « agneau » et le verbe fedouna « mettre bas en parlant des juments et des ânesses ».

            

               

Fato, fate

Fato, fata s.f. « chiffon », en français régional une fate « un bout de chiffon » (Manduel), . La fato cremado est  la « mèche pour faire du feu avec le fusil. » La mèche tient lieu d’amadou et prend feu plus aisément d’après l’abbé de Sauvages. Plus d’informations dans Wikipedia dans le paragraphe  Système de mise à feu

Pour l’étymologie voir l’article fataire.

Fartalio fartaille

Fartalio (fartaille en  fr.rég.) « menues herbes potagères »(déjà S ; Job). « vieilleries »(Andolfi).

  à Bruxelles

Du latin fartalia (dérivé de fartum le part. passé du verbe farcire) attesté au VIe s. chez le médecin Anthimus, avec le sens « farce, hachis ».

Le mot, ainsi que les dérivés fartaiaire « marchand de jardinage »(Mistral) et fartaiá v.a.« cueillir et parer les herbages d’un potager, les préparer pour la vente », semblent être typiquement nîmois. Pourtant dans le dictionnaire de 8 langues de Junius, Hadrianus (1511-1575): Nomenclator octilinguis j’ai trouvé :

mais je connais pas l’origine de cette traduction en grec.

Frigoulo, farigoulo

Frigoulo « thym », vient du latin fericula un dérivé de ferus « sauvage ». Un mot typique pour la région autour du golfe de Lion, cf. catalan frigola,  et  l’ancien occitan ferigola.

Normalement  fericula aurait dû aboutir à *fericla, mais c’est  peut-être sous l’influence des moines qui s’occupaient beaucoup des plantes médicinales et du latin, que l’évolution de la forme a été ralentie. Michel Chauvet me fait savoir que le mot se retrouve dans les parlers italiens (Penzig, Flora popolare italiana) :

Liguria : Ferrùgera (Bordighera); Ferùgula (Mortola); Ferigola, Frùgola, Figoli (Nizza); Frùgola, Furùgola (Escarena)… En italien, ces formes sont normales, l’accent étant sur la syllabe précédant le o / u. Pourrait-ce être une influence italienne, et alors pourquoi ?

En languedocien nous trouvons aussi le dérivé frigoulous « terre en friche rempli de thym ». Un autre dérivé, frigoulo, ou frigouleto  désigne le « serpolet » qui est très proche du thym. Depuis le XVIe siècle la férigoule se trouve dans des textes français mais toujours avec une référence au Midi, par ex. Pierre Larousse : « farigoule  nom du thym dans le midi de la France ». Il y a beaucoup de noms de lieu, par ex. :

L’abbaye St. Michel de Frigoulet. Magnifique!

Une recette trouvé sur internet : « Fricassée de volaille au pèbre d’ail et farigoule ». C’est devenu un nom de magasins, restaurants etc.

thym         serpolet

D’autres noms pour le thym pebrada, serpol, voir Thesoc.

Farda

Farda « habits, linge, hardes, robes » représente le mot arabe farda «balle de marchandise » ou plus précisément « la moitié de la charge d’une bête de somme ».

una mummia del Perù ancora avvolta nel fardo; circa XII sec.

esp., pg. fardo « paquet de marchandises »,

Italien fardo, cat. farda « ensemble de choses inutiles » et « paquet de nourriture pour un voyage d’une journée », comme à Pézenas fardo  « besace dans laquelle les journaliers portent leurs provisions de bouche ».  Dans le Tarn fardel « paquet  de tripes »  et en Rouergue a la fardoulho « en désordre, à la hâte » (M).

D’après le FEW le mot aoc. fardel « paquet », comme français fardeau 1, ont été empruntés à l’italien ou directement à l’arabe comme terme technique de commerce. Ensuite on a créé une ‘racine’  *farda  avec les mêmes sens. Le mot arabe farda signifie aussi « étoffe, habits »  car, quand on voyage le ballot  ne contient souvent que des habits. De là languedocien fardo « vêtements, hardes », Alès fardos « trousseau de la nouvelle mariée » (S), et des dérivés comme languedocien. fardetos « layette d’enfant », fardá « habiller, équiper, ajuster » Aveyron fardasses « chiffons ».

les anges boutis font partie des  fardos  à Alès.

La répartition géographique du  type farde « étoffe » est limité au gascon et languedocien.

Fargasse s.m. « homme négligé ». Dérivé de farda avec un –g- sous l’influence de quel autre mot ?

Petite excursion :

Au XVIe s. les soldats gascons ont introduit le mot farda dans le français de Paris  avec leur prononciation à eux : h- au lieu de f- : hardes et cette forme s’est répandue de la capitale vers les provinces du nord principalement. Le sens péjoratif  du mot  hardes qui au XVIe s. signifiait «  bagage, vêtements, linge et coffre d’une personne »,  n’est attesté que depuis 1771. Le dictionnaire de l’Académie de 1762 parle encore de « belles hardes » ! De nos jours c’est un terme historique comme dans « les hardes et uniformes de matelots ». Voir TLF.

  1. Les mots farde, fardeau et le verbe farder en français, ont la même origine; voir le TLF

Farandoulo

Farandoulo « farandole » est passée dans  le Dictionnaire de l’Académie depuis 1835 (TLF) . Le nom farandole n’est pas attesté avant le XVIIIe siècle.

L’étymologie d’après le TLF, qui suit le FEW , est  » incertaine; peut-être altération du provençal barandello, brandello « farandole »  un dérivé de branda « remuer, branler », de même origine que brandir*, sous l’influence de dérivés occitans tels que flandina « cajoler », flandrina « lambiner », flandrin « fainéant » 1

Je ne suis pas très convaincu par cette étymologie et ceci  d’autant plus que b(a)randello est définie comme une « farandole languedocienne »! Voir aussi mon article brandado.

Hector Rivoire Statistique du département du Gard, Tome premier, Nîmes, 1842, p.343 cette danse est décrite ainsi:

Dans un très petit nombre de communes des arrondissemens de Nimes et d Uzès et en traversant les cantons de St Quentin d Uzès de Montaren de Blauzac et de Lussan toute la musique se compose d un hautbois et d un très petit tambour qui sert d accompagnement Dans quelques unes de ces localités la danse y est appelée branle ou baran delle C est une sorte de valse russe extrêmement précipitée dans laquelle on tourne continuellement sur un même plan »

 

une  farandoles (en bas de l’image)

Catalan : farandola « Dansa popular que hom practica actualment encara a Provença, però que també havia estat ballada a Catalunya ».

______________

  1. FEW t. 15, 1, p. 252, note 14 et t. 15, 2, p. 136b; v. aussi Coromines.

Fanga, hagne

Fanga « boue ». L’histoire de ce mot est la même que l’histoire du fr. fange.Cf. TLF fange .

Des formes comme le gascon hagne, le pérgourdin et le limousin fagno reposent directement sur le gotique *fanja « boue ». On les retrouve dans les parlers plus au nord, jusqu’à la Loire. Un deuxième groupe, comme occitan fanga, fango vient d’un germanique fani- + ga. Le plus répandu en occitan est le dérivé expressif fangas « bourbier ».

A partir de ce dernier la créativité lexicale des Occitans ne connaît plus de frein : fangassié « celui qui se plait à marcher dans la boue; râle d’eau », fangassous « bourbeux », s’esfangassar « s’affaisser, s’aplatir comme de la boue » (Barcelonnette), etc.

Fatras

Fatras « haillon » (S). Probablement un dérivé de fato, voir fataire. A cause de l’attestation tardive du mot français fatras  au XIVe siècle seulement et du mot provençal et languedocien au XVIIIe , von Wartburg pense que l’occitan l’ a emprunté au français (FEW).

Vu le fort développement du mot et des  dérivés de fato, en occitan, je pense qu’il s’agit plutôt d’un dérivé de celui-ci. Les mots expressifs en –as  sont très nombreux en occitan  et l’insertion du –r- peut s’expliquer par l’influence de mots comme  pataras « sale ». Il est également possible que le  -r- a été inséré par association avec  des mots comme fatrassou « petite guenille ; petit marmouset ». Fatrassou vient   de *fatelassou   Occitan  fatras  a  ensuite été prêté au français.

Afatrassir 1. v.tr. »rendre mou, lâche » 2.v.r. « s’avachir » (Mathon ; Alibert ) composé de ad + fatras ‘rendre comme un haillon’.

Alibert mentionne  faterassa « chiffon; molène « . Connaissez-vous la molène? Cliquez sur le lien! La description « Ses feuilles sont épaisses et ovales, mais surtout laineuses au toucher » explique le nom. En Angleterre on en faisait des mèches de bougies et la plante s’appelle « candlewick plant »ou « flannel plant ».

Voir fato cremado ci-dessus s.v. fato.