cat-right

Tibat "ivre"

Tibat « ivre », tibé   en français régional (Lhubac). Etymologie : latin stipatus « entassé » le participe passé du verbe stipare  « mettre dru, entassé ». D’après Gaffiot ,  déjà les Romains  utilisaient surtout le part. passé. Tibar est attesté depuis 1400 et courant dans tout le domaine occitan.

En occitan stipare  aurait dû aboutir régulièrement à estiba mais le préfixe es- était compris comme  ex- et  a été senti dans certains endroits  et  comme contraire  au sens « entasser », de sorte que estiba  est devenu tiba.  Il y a pas mal de variantes dans les formes occitanes.  Fréquemment on trouve  l’insertion d’un –l- : tiblà ,  d’un –m-  et d’un –r-: timbrar  « tendre fortement une corde  d’un instrument, un lambeau » (Alès).

tibla "gonfler" Mistral

L’abbé de Sauvages (S1) cite les deux  formes :

  1. tiba « tendre, étendre »  tiba lou lînjhë   « détirer ou dérider le gros linge  » ; tiba « mourir, roidir les membres ».
  2. estibla, terme de lavandière, tendre le linge, le dérider; estiblassa « étriller quelqu’un, lui donner une volée de coups de bâton »

Tibat  peut prêter à confusion dans le domaine languedocien. A Puisserguier  il signifie « gonflé, ferme », à Aniane  « soûl » et en Rouergue « mort », d’après les données du FEW.   Une visiteuse du Tarn m’écrit:

Je ne connaissais pas « tibat  » dans le sens d’ivre qui doit être une image. Tibat = Tendu, tiré. Destibat = détendu, cool, (hum !!!). Pour ivre je connaissais : bandat , et en plus imagé « madur  » ( à point ). Dans le Tarn près de Castres on emploi couramment l’expression « Aquela tiba ! »=Celle-là elle est bien bonne ! ou c’est bien extraordinaire !
tiba "ivre-mort"

tiba "ivre-mort"

Un habitant d’Aniane en Rouergue?

Cf. « Ivre » dans l’Aude  Thesoc. Les deux formes  tibar  et  estibar   se trouvent aussi en catalan.   L’ italien  stipare  signifie « remplir ».

Il y a un lien avec l’allemand steif « raide », néerlandais stijf « raide », anglais stiff « raide » , mais il s’agit là d’un niveau plus profond, l’indo-européen.

La même évolution sémantique  ‘tendu, gonflé’  vers ‘ivre, soûl’ s’est produite  dans le verbe banda se  « s’enivrer » et dans  coufle.

 

goudjo ‘courge’2

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Goudjo « courge à sel »à Valleraugue (Auge). Pour l’étymologie voir mon article coujo, coja « courge ». Je veux revenir sur le mot grec κωδια (kodia), qui était aussi le nom de la clepsydre«  l’horloge à eau, un transfert est motivé par la forme arrondie des vases qui servaient pour ces horloges et faire un peu de publicité pour Noria  la Maison  de l’eau à  St-Jean de Bruel (Aveyron) oùvous pouvez voir des clepsydres anciennes et modernes.].clepsydre     WasseuhrHerophilusClock

En plus j’ai retrouvé le livre de Charles Atger qui nous donne un dicton de Valleraugue:

Sa pa dé qués qué tené sal en goudjo  » Il ne sait pas ce que c’est que de tenir du sel dans la courge (soucis ménagers).

Ils étaient économes les Cévenols!

goudjo

Cette forme goudjo   est assez rare, seulement attestée dans dans le haut canton du Gard, (Cf. Thesoc),  auquel il faut ajouter trois points dans l’Hérault1 (ALF d’après FEW II, 833 ).

Cogorda, cogorla sont des formes de l’ancien occitan, coucourdo, cougourlo en occitan moderne.cŭcŭrbĭta « citrouille ». FEX II, 1458

Courge poire à poudre.   La courge poire à poudre est une variété non comestible (Lagenaria sicerana) du genre Gourde. D’après Rolland Flore,  le Cévenol coujo n’est pas la plante mais l’objet  poire à poudre.

gourde-poire-a-poudre-ab.netA Campan (Hautes-Pyr.) couyo est le nom d’un panier rond et profond, en Lozère goujo « un entonnoir pour tonneaux ».

Cojada « claterium; bryone » (Alibert).   Claterium est un nom  du  concombre sauvage ou concombre d’âne. (Ecballium elaterium Wikipedia) – claterium. Appelé aussi cojarassa ,

claterium

concombre d’âne Ils mesurent quelques centimètres.

La bryone est une plante grimpante Bryone dioïque (Bryonia dioica) (Wikipedia).

bryoneblancheavec une racine spéciale. Elle s’appelle aussi « navet du diable, herbe de feu, rave de serpent, coja de serp, etc.La bryone est toxique.

Cojassa, « aristoloche »,  Cojanela dans le parler de Guyenne (Alibert). Image dans mon article faouterno. .

Et bien d’autres plantes, coja d’aiga  » le nénuphar jaune  appartient à un autre famille (voir Wikipedia) ; coja melona « citrouille iroquoise » (cucurbita pepo); cojarassa de bosc  « tamier » (tamus communis).

 

  1.  Je suis très content que Charles Auger n’a pas regardé le Dictionnaire d’Alibert et qu’il a écrit comme il prononçait: goudjo. Ortografia est d’ailleurs absent du Dictionnaire d’Alibert.

Roumégo "ronce" et ronçar "lancer&q...

Roumegá,  romega « couper des ronces »  (sur roumega fig. « maugréer, râler » voir cet article  ce n’est pas la même histoire!), rouméco s.f. « ogre dont les nourrices font peur aux enfants » (S), Alès « être fantastique malfaisant, personnifiant le remords », dans le Bouche-du-Rhône raumeco (M) .

Dans le FEW je trouve d’autres dérivés: Alès s’enrounza « se prendre dans les ronces » à Castres idem + s’enroumega. (Mistral) et pour le Gard arrounzi adj. « plein de ronces ».

L’origine de cette famille de mots est le latin rumicem « forme de lancet ».  Déjà en latin rumex désignait « l’oseille »à cause de  la forme de ses feuilles.  Au Ve siècle on trouve également le sens « ronce » également à cause de la forme des feuilles.

                             

                               Oseille                 ronce

Dans le Gard rúmex a abouti à róumi (M), Alès, Nîmes aroundze, Cevennes rounze, Gard arrounzi adj. « plein de ronces »(M), Alès rounzas « broussailles de ronces ».

Le substantif rúmex « forme de lancet » n’a survécu nulle part, mais un verbe ronsar « jeter, lancer, renverser,bousculer » existe en occitan depuis le XIIe siècle. En occitan moderne nous trouvons  à Alès et  Toulouse rounsá « jeter », Alès rounsado « agression, rossée », languedocien ronçar et ronzar « jeter » (Alibert ), en corse arrunzà « pousser, jeter de côté ».

Dans tout le domaine occitan existent  aussi des formes avec un déplacement de l’accent :  rúmicem > rumícem, ce qui a abouti à roumego, roumec « ronce » et au figuré rouméco  qui est un « ogre dont les nourrices font peur aux enfants ».

De la forme rumícem est dérivé le verbe romegar « couper des ronces », (que Alibert donne comme languedocien mais dont je n’ai pas trouvé d’autres attestations), béarnais arroumega « se prendre dans les ronces » , Grasse romeguié « haie de ronces » (Thesoc).

arganel ‘gros anneau en fer’

Florian Vernet a eu raison de suivre le TLF en classant  arganeau dans la liste des mots français empruntés à l’occitan. Il écrit:

Arganeau, subst. masc. Arganèl {arganèu}argan”l argan”w]Gros anneau de fer placé à l’extrémité de la verge d’une ancre pour y étalinguer un câble, ou scellé dans le mur d’un quai, et qui sert à amarrer les bateaux. Le même terme existe en espagnol :arganel.

Le CNRTL qui écrit toute l’histoire en traduisant le FEW VII, p.411.:

Empr. prob. par l’intermédiaire du prov. arganèu ourganèu « organeau, puis anneau de fer auquel on passe un câble » (seulement ds Mistral) issu d’une forme diminutive (-ĕllu-)d’un b. lat. *arganum, lat. class. organum « instrument, outil », empr. au gr. ο ́ ρ γ α ν ο ν « id. » Le changement de voyelle initiale remonte prob. au plur. gr. τ α ̀ ο ́ ρ γ α ν α prononcé τ α ́ ρ γ α ν α compris comme τ’α ́ ρ γ α ν α. L’évolution de sens « outil » > « anneau » est vraisemblable. L’explication du passage de org- à *arg- sous l’infl. d’un lat. médiév. argata (attesté au sens de annulus en 1349, Du Cange) qui représenterait le gr. ε ̓ ρ γ α ́ τ η ς « travailleur » (attesté au sens de « levier de serrage d’une vis », Biton [3es. av. J.-C.] Math., 110eds Bailly) paraît peu solide. L’hyp. de l’empr. d’arganeau au cat. arganell issu d’un croisement entre le cat. anell « anneau » et argolla « anneau de fer » (art; .), Vidos 1939, p. 209 fait difficulté car le cat. arganell ne paraît pas présenter le sens de « anneau » (Alc.-Moll.). L’hyp. d’après laquelle le fr. arganeau serait une forme métathétique pour *orengueaudiminutif de *orenc (pour orin xves. « cordage qui attache une bouée à une ancre »), Barb. Misc. 2, 1925-28, p. 123, ne présente aucune base solide.

L’étymologie est le mot latin : organum  FEW 7,409  411

Pour les germanophones voici l’explication du FEW

arganeau FEW7p41  et plus loin :

Explication du FEW

avec cette différence que le  CNRT approfondit la note du FEW sur Barb. comme complètement à côté de la plaque.  On sait que les lexicologues sont des copieurs/colleurs, tous sans exceptions; moi le premier.  Ils restent humains.

la raison de cet article est le complément d(information que nous fournit un travail inestimable, le  Glossaire nautique du

du Commandant Noël Fourquin et de Philippe Rigaud:

De la Nave au Pointu

 

La première attestation deans le FEW et CNRT est le  moyen français de  1382. Dans le Glossaire nautique c’est bien plus tôt : provençal . 1301 !   Vous savez que les étymologistes attachent beaicoup d’importance aux datations.

Glossaire nautique.
Arganel, arganellus, arganeau s.m. (lat. organum). Formes: arganel, arganot, arganeaul, organel. Sorte de bossoir basculant utilisé sur les galères et les chaloupes annexes de plus grands navires pour déraper l’ancre. 1301: « Item, arganellos barcharum de parescalmo veteres sex. » A.D. BdR. B 1936 f°114. 1477: « Item,… l’argil a proa cum duobus arganells.. » A.D. BdR. 351 E 451 f°42v°. 1510: « Per un arguinel per l’esquifo et lo bronse tot gr. VIII » A.C. Marseille HH 509 Bul. 106. 1512: « ung arganel… l’arganel de l’esquif… » A.D. BdR. B 1487 f°63v°. 1571: « Plus fault deux arganeaulx dedans lesquels se mettent les poulies pour mettre les fers dedans la gallaire. Lesdits arganeaulx se mettent à proue et sont de chesne ou de noyer servant pour serper ou lever les ancres. » B.N.F. Ms. fr. 3174 f°24v°.

 

 

.

Surge,surja

Surge « suint », lana surja « laine en suint ». Vous allez me dire « c’est un terme technique, sans intérêt, ! » Moi, je suis ébahi par le fait qu’un terme aussi spécial que le latin sucidus « sale », a survécu pendant plus de 2000 ans dans quelques régions séparées les unes des autres comme la Wallonie, le Vaud suisse, le Béarn et la Provence,  le Nord de l’Italie, en rhéto-roman, en catalan sutze, surdz’a « sale », espagnol sucio, portugais sujo .

Sucidus, -a a abouti à  soz « sale » en ancien béarnais  et à  sous à Aix et Marseille.

Bien sûr, nous ne prononçons plus comme les Romains;  sucida est devenu surja, dans la combinaison lana surja.

La combinaison lana sucida est attestée pour la première fois chez Marcus Terentius Varro (116 av. J.-C – 27 av. J.-C) et survit telle quelle dans le centre de la Sardaigne avec la forme lana súkida ! (u = ou français). Elle domine dans tout le domaine occitan.

lana surja

A Narbonne au XIIIe siècle est attesté  lana sulza. Mais à la même époque et dans la même région nous trouvons la forme lana surga, lana surjo ce qui suppose une forme *surdica comme base, c’est-à-dire une inversion du -d- et du -c- et l’insertion d’un -r- . La première se comprend facilement et pour la deuxième il y  la combinaison sucidas sordes ou l’adjectif sordidus ‘sale’.

Je ne veux pas vous faire manquer  deux recettes à base de lana surja: une contre les mites et une autre contre les glandes sous l’aisselle:

      

Carchofa

Carchofa « artichaut » plutôt que « grande joubarbe ». En plusieurs endroits cachofa. Les deux plantes se ressemblent, la confusion est compréhensible, mais elles n’appartiennent même pas à la même famille. Voir l’article barbajaou  « joubarbe ».

L’origine de la forme occitane et de la forme française est l’arabe haršûfa « artichaut »(TLF), mais l’histoire du cheminement des deux formes n’est pas la même.

La forme française, dont la première attestation d’artichault « la plante » date de 1538, a été empruntée au piémontais ou au lombard où il est appelé articiocco,articiocch, probablement un emprunt à l’ espagnol alcachofa. Les formes germaniques allemand Artischocke, néerlandais artisjok (1545), anglais artichocke reposent également sur la forme italienne. Ces dates i correspondent à l’histoire de l’importation et diffusion de la plante dans le Nord de la  France. Voir à ce propos, notamment l’influence de la gourmandise de Catherine de Medicis, l’article artichaut de Wikipedia. L’Italie est d’ailleurs resté le plus grand producteur d’artichauts.

Le mot occitan carchofa est venu de l’arabe par le catalan carxofa, escarxofa , espagnol alcarchofo, portugais alcachofra. La première attestation connue en occitan date de 1544, mais  en catalan carxofa  est déjà attesté en 14901. L’artichaut était donc connu dans la cuisine méridionale  bien avant que Catherine de Medicis devienne reine de France.

 

La planche de l’Encyclopédie Artichaut

  1. L’occitan et le catalan étaient considérés comme une seule langue à l’époque

Ferratge

Ferratge « fourrage en vert », en ancien occitan « terrain planté en fourrage »; pour l’abbé de Sauvages c’est de l’escourgeon, une espèce d’orge qu’on fait manger aux chevaux en verd ». (L’escourgeon est une orge hâtive, que l’on sème en automne.) Il ajoute que le feratge n’est pas du tout la même chose que le fourrage français, qui est un mélange.

Le ferratjal est un « terrain en fourrage », et « mettre un cheval au vert » est l’ afarrajà.

Dans un compoix mirapicien daté de 1766, on trouve les formes ferratjat, ferrageat.(communication personnelle). Deux autres graphies à Mirepoix : ferraxchail et feratjeal dans le registre des contributions foncières de l’an 3. Un visiteur fidèle de l’Hérault confirme: « Le compoix de Pézénas de 1775 on trouve  souvent qu’il y a autour des anciens remparts « patus et ferrajal« , pour indiquer des enclos où l’on parquait des chevaux. »


Extraits du Compoix de Mirepoix : ferratjat ou firratjat mais sans · sur le i .


Le deuxième est intéressant par la spécification jardin ou ferraxchail.

Le mot ressemble beaucoup au mot français mais son étymologie est bien différente. Le mot occitan vient du latin farrago « mélange de divers grains pour les bestiaux »: il est devenu très tôt ferrago Français  fourrage est un mot d’origine germanique, à savoir  foder « nourrir » ( food en anglais moderne, voer en néerlandais).

En occitan ferrago a abouti aussi à ferouche, foroujo, ferouge, faroutcho pour désigner le « trèfle incarnat », prêté au français sous la forme farouche..Il semble que la culture du farouche vient de la Catalogne farratge et qu’en français on l’appelle aussi « trèfle de Roussillon », une dénominaton d’après l’origine de la plante . La couleur de la fleur explique que par-ci par-là comme dans l’Aude, la feratge est devenu la feroutge

farouche, trefle incarnat

Magnin

Magnin « ferblantier, chaudronnier ambulant » (Camargue).  Magnin  est la forme typique de l’occitan à l’est du Rhône et du francoprovençal. La forme magnin  a été introduite par les chaudronniers ambulants provenant des vallées alpines du Piémont italien où magnin a été formé à partir de la forme magnan par changement de suffixe. Il est devenu assez tôt un nom de famille, attesté dès le XIVe s. à Grenoble. D’après un site il y a actuellement plus de 6500 Magnin‘s en France.

Magnan est la forme de l’ancien français et des patois de la langue d’oïl.

L’étymologie de magnin n’est pas tout à fait clair. Je résume l’article *manianus > ancien français magnan dans le FEW qui discute les différentes propositions parce qu’il montre que l’étymologie moderne doit tenir compte des facteurs historiques, géographiques, phonétiques et sémantiques. Les attestations  jouent également un rôle important.

  • Diez « Etymologisches Wörterbuch der romanischen Sprachen » 1887, a proposé machina Une étymologie impossible pour des raisons d’ordre phonétique : Quelles règles pourraient décrire la transformation machina >magnin ?
  • Horning Z 9, p.510 propose comme origine le nom de la région auvergnate la Limagne, avec déglutination de li- compris comme l’article, mais il n’y a pas d’indications historiques que les Auvergnats parcouraient comme marchands ambulants ou ferblantiers non seulement toute la France mais aussi l’Italie (italien magnano).
  • Wiener pense à *maskinanus ou un dérivé de mango qui posent également des problèmes phonétiques.
  • Sainéan pense qu’il s’agit du participe présent magnant du verbe moyen français maignier « manier », dérivé de manus « main », mais un manianus est déjà attesté en 1250 à Bologna. Italien moderne magnano « serrurier ».
  • L’hypothèse la plus probable à mon avis est celle de  H.-E. Keller dans le FEW qui suppose qu’il s’agit d’un dérivé de *mania une forme secondaire de *manua « anse ». En occitan existe en effet le mot manha « propriété, qualité propre de qch. », et en catalan manya f. « Destresa, habilitat. | Pressa. | donar-se manya « Enginyar-se » (DIEC), espagnol maña, portugais manha avec le sens « habilité » qui viennent d’une forme mania, comme catalan manyà « serrurier », manyana « serrurière ». Le problème qui reste est qu’en occitan *manianus n’est pas attesté et qu’en italien *mania non plus.
  • On pourrait encore supposer que *manianus a été formé en occitan par changement de suffixe à partir de manuarius, mais il n’y a pas d’attestations anciennes d’une telle forme.

Redable "tire-braise"

Redable « tire-braise » vient du latin rutabulum « fourgon 1 , râble de boulanger, spatule » surtout avec le sens « tire-braise ».

Dans un site marchand, je trouve la description suivante:

Les outils du boulanger : Râcle, écouvillon, pelles. Vous les connaissez peut-être déjà sous des noms différents de ceux que je donne ici. Pas d’affollement !! Ils ont un nom par village… ou peu s’en faut. Le râcle (râble, etc.). Une plaque de 25 x 6 cm taillée dans les chutes de la tôle qui a servi à fabriquer la porte, 40cm de fer à béton de 8, quelques points de soudure et 2m de bambou. Le râcle sert à étaler les braises pendant la chauffe et à les retirer dur four après la chauffe.

 

La voyelle de la première syllabe varie dans les parlers locaux : ridable, radable, roudable et le -b- devient souvent -p-.

Le FEW suivi par le TLF rattachent le mots râble (surtout en parlant du lièvre et du lapin) à rutabulum.  Le Bloch-Wartburg suivi par A.Rey,  écrit que

le mot  râble (du lièvre) est probablement une extension de rable « fourgon spatule » par analogie d’aspect; certains instruments appelés râbles étant munis de fourchons fixés dans la barre comme l’échine est munie de ses côtes « .

Dans le FEW von Wartburg est beaucoup plus nuancé. Il y suggère la même comparaison, mais les formes occitanes avec -e- au lieu de -a- posent un problème d’ordre phonétique. La forme rièble se trouve déjà dans le Miroir de Phébus (1390) de Gaston comte de Foix.

Von Wartburg pense que râble  en parlant du lièvre est un mot de chasseurs, qui est passé  dans la langue générale au cours du XVIe  siècle. La première attestation en français de râble (1532) vient de l’auteur de Pantagruel et Gargantua! Le mot s’est répandu ensuite dans les dialectes. Il y a donc deux histoires.   Rutabulum > redable en occitan, ou  rouable, roable en ancien français avec le sens « tire-braise » qui a eu une évolution à partir du latin.  D’autre part  râble (de lièvre) qui s’est répandu à partir du XVIe siècle dans tout le domaine galloroman.  Les formes occitanes avec –e- s’expliquent peut-être par une influence du mot rèble(s) « de la blocaille: petites pierres pour remplir entre les parements d’un mur »(S1), du verbe reblar « remplir, garnir de blocaille » (S1) du latin replēre « remplir ». Cette explication ne me convainc pas à 100%. Une autre explication de C. Nigra dans l’Archivio Glottologico 14, p.374.

Pour le moment aucune étymologie est vraiment satisfaisante. Si vous avez une idée…

A Die et à Trièves les formes sont identiques: riable s.m. « dos » et « rivet du boulanger ». (Schook)

  1. Fourgon « Longue barre métallique ou longue perche garnie de métal utilisée pour remuer la braise ou la charge d’un four, d’une forge, d’un fourneau, ou pour attiser un feu. » (TLF). Le fourgon « automobile » doit probablement son nom à cette barre;  même mot que fourgon 1, ce mot ayant dû désigner successivement le « bâton de la ridelle » puis la « ridelle » et enfin la « voiture à ridelle » (ces deux derniers sens étant attestés en prov. mod. : MISTRAL, s.v. fourgoun) TLF

Fau, fag ‘hêtre’

Fau « hêtre », fag en gascon. D’après le Thesoc on trouve en Occitan les types suivants: fag, fajàs, faja (Aveyron seulement), fau, fayard, fayau, feinard, hêtre pour désigner le hêtre. Les types fag et fau sont les plus répandus, fag en Gascogne, fau en languedocien. Il s’agit d’une différence d’évolution phonétique. L’étymologie pour les deux est  fagus « hêtre ».

Le type fagus > fau, fag  est concurrencé par l’adjectif dérivé fageus, -a qui donne faja, fajo « 1.faîne; 2. hêtre » en occitan,  fajo « forêt de hêtres » . Voir Thesoc.s.v. faine. Le masculin fageus est devenu hay « hêtre » en béarnais.

Les représentants de fagus sont très fréquents dans tout le domaine gallo-roman comme toponyme. Voir à ce propos Pégorier. et pour le Gard Germer-Durand. Un dérivé : Fageda « hêtraie », fagede dans le Compoix de Valleraugue1 .

Excursion dans le domaine d’oïl. L’évolution phonétique de fagus en français > fou a créé un problème, même si un fou < fagus ne peut pas être (un) fou < follis  » « soufflet pour le feu; outre gonflée; ballon; bourse de cuir ». Ce follis employé comme adjectif a pris à basse époque  le sens de « idiot, sot » (TLF). La forme  follis  est devenue fou, folle  en ancien français. Fayard dérivé de fou < fagus est considéré comme français par le Thesoc, mais régional, franco-provençal par le TLF fayard .

Je ne crois pas  que cette homonymie en soit la cause, mais  fou « hêtre »  a été remplacé dans le Nord par hêtre. Je cite le TLF avec quelques changements typographiques : 1301 hestre (doc. ds Gay). De l’ancien bas franque *haistr (cf. néerl. heester « arbuste »), dérivé , à l’aide du suffixe -tr, servant à former les noms d’arbres (cf. apholtra), du radical de *haisi « buisson, fourré » qui est entré en gallo-roman sous trois formes différentes (v. hazier). *Haistr est devenu roman plus tard que haisi et haisia (v. hazier), de sorte que ai y était devenu e. Il a éliminé l’ancien français fou (v. fayard, fouet) désignant les grands arbres, tandis que hêtre était le nom donné aux jeunes troncs qu’on coupait régulièrement et qui repoussaient généralement sur les souches. Cette distinction s’est perdue par la suite et hêtre, remplaçant fou, a fini par désigner l’arbre adulte (b).

 

       
fau
              et                      faja

Voir l’article Wikipedia pour en savoir plus.

  1. Supprimé du site généalogique et devenu introuvable.