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Panperdu

Panperdu. Toponyme du Gard.

D’après Mistral, il y a des Panperdus aux Saintes-Maries, à Chateaurenard, à Gaumont (Vaucluse), à Béziers, etc.

Panperdu signifie « mauvais pays »:  D’ounte siás? – De Pan-Perdu. « D’où êtes-vous? D’un mauvais pays. » Je ne suis pas sûr du sens du mot Rubina. Il faudrait vérifier s’il s’agit d’une bonne lecture du Cartulaire de l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, mais il s’agit probablement de Roubine, toponyme fréquent dans le Midi qui désigne une « ravine; longue coulée d’éboulis creusée dans les terrains friables et déboisés; canal de faible largeur » (Pegorier). J’ai pu trouver le deuxième vol. de l’édition du Cartulaire de l’abbaye de Saint-Victor par B.Guérard; dans l’index l’auteur renvoie de Rubina > Robina. Mais le premier volume avec la charte 156 n’est pas disponible sur le web.

Dans le Compoix de Sommières on trouve également un Panperdu. L’auteur ajoute qu’il y a d’autres graphies : Pan viel, panviel, pant vieil. Surtout le graphie pant est intéressante, parceque elle montre que le scribe ne confondait pas pain et pan. La graphie avec -t final se trouve aussi en ancien français. Voir le Godefroy.

L’étymologie doit être pannus « morceau, partie ». Voir pana(r).

 

Coulée d’éboulis

Panta

Panta « ventrée; farce, grimaces » (Quercy); « désir impérieux, inclination » (Toulouse) d’après Alibert.

En ibéro-roman a été formée une racine *pant- à partir d’une syncope de *pantica du latin panticem « ventre, panse ».  On le trouve par exemple en portugais panturra « gros ventre ».  Il a dû exister également en occitan : pantre « lourdaud » (gascon), pandalh « tablier » (Landes), pancarasso « grosse panse » (Bouche-du-Rhône), et même en franco-provençal pantarrou « panse des bovidés ».

Est-ce que Rabelais s’est souvenu de son séjour à Montpellier quand il a créé Pantagruel? Et que penser de l’archange Pantasaron, qui s’occupe des repas de fête, peint au XIIe siècle dans l’église de Vals dans l’Ariège1?


Photo Serge Alary, responsable de l’Association des Amis de Vals.

Pantasaron cum in conuiuio ueneris in mente habe et omnes congaudebunt tibi… « Aie Pentasaron à l’esprit lorsque tu prends part à un repas de fête, et tous feront la fête avec toi ». Suivez ce lien pour en savoir plus!

Un petit chemin de travers. En cherchant des mots en rapport avec panta « ventrée » je tombe sur Pantalon, qui en principe n’a rien à voir avec panta. Pantaleone est le nom propre d’un bouffon de la commedia dell’arte italien (XVIe s.) , vêtu d’un habit tout d’une pièce depuis le col aux pieds.  (TLF) Mais avant cette période, au Xe siècle déjà, San Pantaleone était le patron de Venise. Beaucoup de Vénitiens ont appelé leurs fils d’après ce Saint.  Dans les villes voisines, pantaleone est alors devenu un sobriquet pour  les Venitiens. Ce procédé s’appliquait à d’autres Saints, par exemple San Battista devient Baccicca pour Gênois,  et ce qui m’intéresse le plus   est le fait que  San Gregorio le patron de Genova  a  abouti à Gringo « Gênois ».

Or, pour les dictionnaires étymologiques anglais, gringo  serait une transformation de griego « grecque », parce que quand on dit c’est du grec , cela  veut dire « je n’y comprends rien ».  Américain  Gringo   « étranger » a été emprunté à l’espagnol mexicain gringo « étranger, Anglais  qui parle mal la langue espagnole » et qu’on ne comprend pas.

Et c’est ici que San Gregorio intervient! Un Gringo est un Gênois qui parle mal l’espagnol, comme par exemple Christophe Colomb le Gringo le plus connu du monde. Cette hypothèse demande plus de recherches.

           
San Gregorio                                         Le Gringo Colomb

Les indications bibliographiques données ci-dessous  ne sont pas sûres…Je n’ai pas pu le consulter.

  1. Un article sur l’église Notre-Dame de Vals et ses fresques restaurés se trouve en suivant ce lien

Pantais

Pantais s.m.« rêve, songe; râle (Foix); respiration pénible, oppression; asthme (Rouergue) ».  Une amie originaire de la région de Cannes, me précise qu’un pantais est un ‘rêve pénible’.

Pantais, attesté depuis le XIIe siècle, est un dérivé du verbe pantaisar ‘rêver’. L’étymon de pantaisar est le grec phantasioun ‘avoir des visions’. Le verbe n’est pas attesté en latin, ce qui s’explique par le fait qu’il s’agit probablement d’un mot de la langue populaire emprunté à une période ancienne et qui n’a pas été accepté par la langue latine classique.. De là aussi les formes avec un p- au lieu d’un f-, que nous retrouvons dans le nord de l’Italie pantezar (Venise) et en catalan panteixar ‘respirer péniblement’.


un pantais

En ancien occitan pantais a déjà les sens « inquiétude, souci, angoisse, trouble, confusion », et même « cauchemar ». Quand on a un vrai cauchemar, on a le sentiment de suffoquer, de respirer avec peine. Voir l’article cauchemar dans Wikipedia.  En occitan pantaisar est « faire un mauvais rêve », en ancien français panteisier, pantoiser devient carrément « avoir l’haleine courte, respirer avec peine ». Français rester, laisser pantois veut dire « rester hors haleine ».  Dans l’ouest de l’occitan la forme pantaissa prend aussi le sens de « haleter ». Béziers connaît deux formes pantaiá « rêver » et pantaissá « haleter ». A la même famille de mots appartiennent encore le toulousain pantegá « être essoufflé, aveyronnais pontugá , et en  français panteler comme les emprunts breton pantes « asthmatique »et basque pantatsj « poussif ».
Anglais to pant « haleter  » et le subst. pant  « halètement » ont été empruntés au français. to be panting for breath « être tout essoufflé ».  Cf. Harper.

 

cliquez sur l’image  pour (a)voir le cauchemar.

Panteno pantiero

Panteno s.f. « filet en forme de manche qu’on place à l’extrémité des bordigues; nasse ou verveux; poche qu’on met à l’entrée des terrier des lapins ».   Pour Raymond Jourdan ( voir Sources s.v. Montagnac)  c’ést « la bourse (panténo) que le chasseur a placée au biradou« .  La forme pantiero  vient de Marseille, Montpellier et du Béarn. D’après Wikipedia  la forme gasconne est pandéla / pandèle  et désigne  un grand filet vertical.

En grec existait le  πανθηρος « chasse-tout » dont les Romains avaient fait panther  « filet servant à capturer certains animaux ». Les Grecs avaient créé aussi la πανθηρα  un « grand filet pour attraper les oiseaux » de παν « tout’ et θηρα « chasse », dérivé de θήρ «bête sauvage»; devenue panthera  en latin. C’est ce dernier qui est à l’origine des formes occitanes  et françaises.

Panthera  est devenue  pantena  « sorte de nasse » en ancien occitan (1336)La fin du mot : –era  a été sentie comme un suffixe et remplacée par  -ena  qui était mieux adapté au sens du mot « grand filet ».  Il y a une description de l’utilisation de la pantière ici.

panteno

Chacun des chasseurs suivants en fait autant, à mesure que le vol avance, et pousse de grands cris qui retentissent jusque dans la ville [Campan – NDLR]. Effrayées par la vue de ces ennemis et par les cris qu’elles entendent, les palombes abaissent continuellement leur vol, et finissent par se précipiter au fond du défilé. Là les attend la pantière qui, au moment donné, glisse sur les poulies et les recouvre de son ampleur.Cette chasse est très productive ; aussi, est-ce la spéculation, et non un but d’agrément qui la fait entreprendre.

Comme toujours le mot s’adapte au terrain.  Filet pour la chasse, la pêche, les courses, etc; suivant les emplois, les régions etc.

 

paoumoulo, poumélo

Pamoûlo « escourgeon ou paumelle, espèce d’orge à deux rangs de barbes dont le grain sert pour les tisannes d’orge et pour faire de la bière » « (S 1756).  Etymologie : latin palmŭla « petit palmier », mais le mot n’a survécu dans les langues romanes qu’avec le sens « paumelle ». Le nom botanique est Hordeum distichum (L.).

pamoulo

pamoulo

La première attestation vient de la région nîmoise  palmola, XIIe siècle.  Dans les parlers occitans modernes nous trouvons plusieurs variantes comme paoumoulo, paoumouro (Marseille), palmoulo, etc. en provençal et en languedocien. En gascon et en limousin c’est le type balearicus > bailharc, balhart et balharga qui domine1 (FEW I, 214). Cette répartition géographique qui existait déjà au moyen âge s’explique par le fait que l’orge espagnol avait depuis l’Antiquité une excellente renommée. Pline parle de l’orge de Cartagena2

Les recherches archéologiques ont montré que l’Hordeum distichum  était inconnu dans le Nord de l’Europe. Il n’y a été introduit que beaucoup plus tard. Le nom français paumelle ne date que du XVIe siècle et a été emprunté au provençal ou le languedocien, avec une adaptation:  la finale –oulo étant pris pour un diminutif a été transformée en –elle.

Cette forme française paumelle a d’ailleurs influencé dans certains endroits le nom local, comme par exemple à Valleraugue (Gard) poumélo.
FEW VII, 517

  1. Ce mot a été emprunté par l’anglais barley, d’après le FEW, mais le Online Etymology Dictionary  cite un ancien anglais baerlic  adjectif  « d’orge » , dérivé de bare « orge ».
  2. La ville catalane dont le nom a été donné à la cartagène.

Paradelle "oseille des champs"

Paradelle  « oseille des champs, rumex des prés » Un visiteur m’écrit:

 je me souviens aussi qu’ils (les gens de Brive-la-Gaillarde) appelaient les Rumex dans les prés padarelles ou paradelles. Quand j’ai demandé si c’était l’un ou l’autre, on m’a répondu : c’est pareil…

En français cette plante s’appelait autrefois  parelle « Plante fort commune, & qui croît par-tout dans les terres incultes. Ses feuilles ressemblent à celles de l’oseille, mais elles sont plus longues. Sa racine est grosse comme le doigt, jaune & d’un goût amer. On l’emploie contre la jaunisse, le scorbut, & les maladies de la peau.  »  Ce nom a disparu depuis le XVIIIe siècle.  La définition donnée ici vient de la 4e édition du Dictionnaire de l’Académie française (1762) s.v. patience vers lequel il renvoie sous parelle.

Etymologie. Une première attestation date du Xe siècle et se trouve  dans un glossaire qui explique des mots difficiles  1: lapacinum parada. Lapacinum  est une sorte d’oseille. Dans mon dictionnaire latin est mentionné lapathium « patience, sorte d’oseille’ et lapathum  du grec λαπαθον de λαπαζειν « relâcher le ventre »; le lapathum « patience »  est un remède pour les estomacs fatigués.  J’en parle parce que d’après une recette de grand-mère  les paradelles ont des propriétés purgatives et reminéralisantes.  Le TLF écrit s.v. patience « Plante voisine de l’oseille (rumex vulgaris) utilisée pour ses propriétés toniques et dépuratives. » D’autres patiences sont utilisées dans l’homéopathie et la phytothérapie.  Ces connaissances nous viennent de loin! Le sens du mot grec le prouve.  Dans une note le FEW cite le médecin italien Matteo Silvatico (1285-1342) qui dans son Opus Pandectarum Medicinae décrit entre autres les bienfaits du lapathiumLe fait qu’il écrit lapatium … vel parella prouverait que  Matteo Silvatico  est passé par l’Université de Montpellier parce que le mot parella  est inconnu en Italie.   J’ai cherché (longtemps) le texte de Silvatico et je l’ai trouvé! Je suis toujours émerveillé par les vérifications qu’on peut faire grâce à Internet.  Ici vous trouverez la page de  Silvatico_parella de l’édition de 1526. C’est la chapître ccclxxvii (337).

Michel Prodel, spécialiste de la toponymie de la Corrèze,  s m’envoie le complément  que voici:

« On peut également consulter Macer Floridus « des vertus des plantes » – de viribus herbarum ; Chapitre LXIII ; « Herba solet lapathi volgo paratella vocari, «Le lapathum est appelé communément parelle ».« Herba solet lapathi volgo paratella vocari, «Le lapathum est appelé communément parelle ».v Disponible sur : http://remacle.org/bloodwolf/erudits/floridus/plantes.htm

Le jardin botanique de Matteo Silvatico

A partir de parada  a été formé  un dérivé *paratella qui n’est pas attesté en latin classique, mais  il se trouve  dans des textes en latin médiéval dès le XIIIe siècle.   Le type paradelle  est répandu dans tout le domaine d’oïl, dans l’ouest de l’occitan,  en catalan paradella, panadella  et dans des parlers flamands néerlandais  pardelle.

Les formes occitanes sont assez disparates: paradelo, panadelo (Castres), porodèlo, poryèlo, padriel, et même un pornozyélo  à Meyronne (Lot). Les habitants de Brive-la-Gaillarde avaient donc raison. Le  Thesoc ne  connaît pas le type paradelle,  mais atteste une   forme sanadelles qui a dû naître grâce à l’emploi de la plante dans la médecine populaire.

Les variétés de rumex  désignées par le type paratella   sont en général celles qui,  hâchées et cuites, servaient  comme aliments pour les animaux.  Ce qui ne se fait plus du tout.  La plante pose plutôt de gros problèmes.

Michel Prodel,

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  1. Le vol.3 du Corpus Glossariorum Latinorum publié par Georg Götz; Leipzig 1888-1901,  est consultable sur Internet Archiv

Paratge ‘égalité’

Paratge

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Arrêt sur images. Dans la chronique de ce matin intitulé Les migrants, les crêpes et le routier, il y a le commentaire que voici:

Ah, ce droit d’asile! Ce lieu inviolable ou une personne en danger trouve refuge…ce lieu qu’on ne peut piller, inverstir, pénétrer

Ce paratge cher aux Occitans,  » Le Paratge, ce terme intraduisible littéralement dans d’autres langues, était à la fois le sens de l’honneur, l’amour courtois, le respect de soi et de l’autre, quel que soit son sexe, sa race, sa religion ou son origine sociale, ainsi que la négation de la loi du plus fort. »

L’étymologie de paratge  est le latin pār « égal, pareil, convenable, juste » > pair en français.

Bernart de Ventadour :

paratge_Rayn

Le sens le plus courant de parage/ paratge en français et en occitan est  » extraction, noblesse, haute naissance ». Comme terme juridique paratge signifie : « égalité de conditions entre aîné et  puinés, malgré l’inégalité du partage de l’héritage ».

 

 

Parpalhejar

Parpalhejar « papilloter en parlant des yeux » parpaléger en français régional, est dérivé du latin papilio « papillon ». Michel Bendon donne pour Montélimar: « parpeiller : « cligner des yeux » et Parpeilles nf : paupières .

Voir l’article parpalhon.

Parpalhon

Parpalhon « papillon », représente le latin papilionem. La forme avec insertion d’un -r- occupe un large territoire qui relie le nord de l’Italie, le catalan et le galloroman  jusqu’à la Loire.  Le mot a été prêté au français  où parpaillaud désigne  les  « huguenots, calvinistes » par allusion à une espèce de chemise dont les protestants firent usage en Gascogne, dans une sortie, pendant le siège de Nérac (en 1620). Pierre Larousse consacre plusieurs colonnes à cette étymologie  et énumère les différentes propositions, tout en concluant :

« L’étymologie tirée de parpaillot « papillon » est la plus plausible et paraît avoir été adoptée très anciennement, témoin cette chanson poitevine, contemporaine des guerres de religion :

Qu’ils sont gens de peu de cervelle
Ces malotrus de parpaillaux,
De se brûler à la chandelle
Après qu’ils ont fait tant de maux!

Pour les intéressés, je joins la page concernée de l’Encyclopédie de Pierre Larousse en format PDF

Un visiteur me signale une réinterprétation populaire: « Selon un ami protestant des Cevennes, on appelait les protestants « parpaillous » parce qu’ils se réunissaient la nuit comme les papillons de nuit. ».

Honorat donne dans son dictionnaire une troisième variante, que vous pouvez lire dans le site de Georges Mathon,Parpaillot

A Barre en Cévennes (Lozère) lou parpalhou est le « billet de banque » ( comme en français le papillon qu’il faut joindre au règlement de certaines factures). Dans le Gard le même mot désigne le « grimpereau de murailles » d’après Rolland, Faune. Le grimpereau est un tout petit oiseau constamment en mouvement..


Deux parpalhous Un visiteur me signale que celui de gauche est un grimpereau des jardins et celui de droite un grimpereau des murailles.

Parran, parragine

Parran s.f., est attesté dans le Compoix de Valleraugue , mais uniquement comme nom de lieu : La parran de serre (T.1-29).

Etymologie : parran fait partie d’une famille de mots dont la racine *parra « barre » n’est pas attestée en latin, mais le  dérivé parricus « parc » à l’origine « enclos » est très répandu. La racine *parra est attestée à Camarès (Aveyron) : parro s.f. « pièce de terre de première valeur située près de la maison ».

Une forme parragine doit être à l’origine de parran s.f. « jardin près d’une maison, entouré d’une clôture » attesté en languedocien depuis le XIIe siècle. Parragine a dû exister aussi en provençal, puisque elle apparaît dans un texte provenant d’ Apt daté de 1040 : cum ortis et parraginis « avec des jardins et des enclos ».  Dans les différentes significations occitanes et ibero-romanes il y a toujours l’élément « barre » ou « enclos » : par ex.  espagnol parral « treille ».

Très proche aussi est le mot marseillais parriero « outil de bois ou de fer pour déboucher le trou par lequel la matière fondue doit couler ».

Ci-dessous les Parrans dans le Gard.