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Gard, Gardon

Gard, Gardon 1. nom de plusieurs rivières dans le département du Gard:  « Durant ces trois derniers millions d’années, deux Gardons très profonds se creusent : le Gardon d’Alès et le Gardon d’Anduze, qui se rejoignent à Vézénobres, formant le Gardon ou Gard. Le Gard(on) s’étend sur 71 km de long. Après être passé sous le fameux pont-aqueduc romain du même nom, il retrouve le Rhône en rive droite à l’endroit où il atteint son maximum de puissance. »

Une Cobla de Peire Cardinal (suivez le lien pour la traduction et l’interprétation (erronée du mot Gardon?)

Domna que va ves Valénsa
Deu enan passar Gardón;
E deu tener per Verdón
Si vol intrar en Proénsa.
E si vol passar la mar
Pren un tal guvernadór
Que sapcha la Mar majór,
Que la guarde de varar
Si vol tener vas lo Far.

 Gardon d’Alès
   
Gardon d’Anduze


le Gard et le Pont du Gard

L’étymologie des toponymes est un domaine spécial dans lequel je n’ose pas m’aventurer.Vu la configuration du terrain, avec beaucoup de sommets qui permettent de surveiller les passages, je ne serais pas étonné que les noms de ces rivières viennent du verbe germanique *wardon qui a donné gardar en ancien occitan avec le sens « avoir l’oeil sur, soit pour protéger soit pour empêcher de nuire ». Une interprétation plus poétique serait que les Germains en voyant la beauté de cette région, ont dit: Das müssen wir wardon! «     Nous devons  sauvegarder cela! ».

D’après le TLF gardoun,gardon est un mot employé par les Cévenols pour désigner un petit torrent aux crues violentes (cf. lou Gardoun d’Alès, lou Gardoun d’Anduzo). Gardoun est issu du bas latin Wardo/Vardo, -onis « rivière de la Narbonnaise [le Gardon] », mais l’origine de ce mot reste inconnue.

D’après Germer-Durand, la première attestation se trouve dans un texte de Sidonius Apollinaris (Ve siècle) sous la forme Vardo.

2. poisson (leuciscus ). Le mot gardon pour ce petit poisson n’est pas occitan mais français. Je ne sais comment il s’appelle en occitan. Pour l’étymologie voir le TLF s.v. gardon 1. : « Probablement . dérivé du radical de garder* (du verbe germanique *wardon) soit au sens de « surveiller » parce que le gardon aurait l’habitude de retourner aux endroits d’où on l’a chassé comme s’il avait à y garder quelque chose (FEW t. 17, p. 524b, note 46); soit au sens de « regarder », les yeux rouges étant une caractéristique de ce poisson (cf. l’all. Rotauge littéralement ‘oeil rouge’ et les dénominations rousse, roussette, rouget dans Rolland . Faune t. 3, pp. 142-143; DEAF, col. 178); suff. -on ».

 
gardon

Garou "sainbois"

Garou  synonyme de sain(t)bois, bois gentil, daphne gnidium1.

Etymologie d’après FEW suivi du TLF:

Mot empr. du prov., cf. Nice garoupa bot. (FEW t. 14, p. 169), Nice garoup bot. (Risso ds Roll., loc. cit.), garou bot. (Mistral), et qui est entré dans le fr. général lors de la diffusion des noms de plantes du maquis. Garoupa est formé du préf. préindo-européen *war- et du suff. préroman -uppa (cf. ang. jaroupe bot., issu du m. lat. garropa, jaroppa, xie s. ds Orbis t. 4, p. 220). Pour garou, il faut sans doute supposer une forme préromane warúbo- ou warōbo-, ce qui fait difficulté, car il n’existe pas d’autres noms de plantes de formation analogue, v. FEW t. 14, p. 170a-171a.

Hubschmied écrit dans le FEW XIV, 170 :

Que le français  garou  a été emprunté à l’occitan, ne ressort pas seulement des attestations anciennes qui viennent principalement du Midi, mais aussi du fait que les plantes désignées par les représentants de la racine *war- sont caractéristiques des maquis.

Garou  et les dérivés de la racine *war-   désignent d’après les  données du FEW :  le daphne gnidium, le cucurum tricocon2 (?), une euphorbe, le daphne laureola, le veratrum album  (Véraire , Ellébore blanc , Varaire  en français),  la  gentiane jaune, le rhododedron,  une plante grimpante non identifiée.

Pour enjoliver un peu cet article, je vous les présente:

                         Daphne laureola                     Cneorum tricoccon               gentiane jaune              véraire              daphne gnidium

Si la phytothérapie vous intéresse, cherchez la:

Pommade de garou Elle est composée d axonge de porc préparée 3 20 parties cire 32 parties écorce de garou préparée 1 28 parties3

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  1. Vous trouvez une description dans le Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes : avec un atlas de 200 planches lithographiées (3e édition, revue et augmentée par le docteur Henri Cazin,…)  par F.-J. Cazin, pages 365-366

    ou tout le chapitre sur les daphnes  dans Plantuse

  2. probablement le n° de ma source:  4o63 Camélée à trois coques Cneorum tricoccon Cneorum tricoccon Linn spec 49 Lam Illstr t 27 Chamelaea tricocon Lam Fl. fr. p. 682 – Cam. Epît. 973 ic .
  3. Manuel Des Pharmaciens Et Des Droguistes, Ou Trait Des Caractères Distinctifs, Des Altérations Et Sophistications Des Médicamens Simples Et Composés, |…, Volume 2 page 566  par J.B. Kapeler, Caventoun Ebermaier.

Garrel 'bigarré'

Garrel « bigarré, de plusieurs couleurs ».   Garél ou garil   « bigarré » se dit surtout animaux, pourceaux, brebis et chèvres.  L’abbé de Sauvages donne l’exemple de Jacob qui arrive à faire des brebis bigarrées en mettant des bâtons bigarrés dans l’abreuvoir (Bible, Genèse 30).

garrel

Garrel avec ce sens est un dérivé d’une racine mystérieuse *garr- « bigarré, tacheté ». Cette racine garre ne se trouve que dans la Haute-Bretagne et la région voisine en bordure de la Loire.  Des dérivés se trouvent un peu partout dans le Centre et le Midi. En ancien rouergat est attesté le verbe  garrezir « rendre gris » et en provençal lou garroun est « le mâle de la perdrix ». D’après le FEW le provençal garre « gris fauve » et le substantif la garro « entrée de la nuit » (Mistral) appartiennent à la même famille et la racine *garr- aurait pris le sens « gris » en occitan.

perdrix

J’étais  étonné que des mots  comme berrichon rat gariau « loir »  et gariau, -elle « de couleur bariolé » sont rangés dans l’article *garr-  du FEW et que les mots provençaux  garri, gari « souris »(Thesoc), ou « rat » (Thseoc) et  garrioun « petit rat »  n’y sont pas mentionnés1.

Dans l’article *garrium « souris » von Wartburg explique que la répartition géographique, notamment le fait que le type *garrium « souris » est limité à l’est de l’occitan et au piémontais, rend l’étymologie *garr-  improbable.

Garrél « boiteux, pied-bot, détraqué »,  de garrel « de travers » vient d’un gaulois *garra « partie de la jambe, jarret ».

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  1. Si cela vous intéresse voir l’article dans la Zeitschrift  40, p.644 et 51, p.558

Garrél "boiteux"

Garrél « boiteux, pied-bot, détraqué » ,  de garrel « de travers » vient d’un gaulois *garra « partie de la jambe ». Cette racine qui correspond à des mots celtiques comme le breton  gâr « jambe », garr  en cymrique, gairri  en ancien irlandais, a eu un riche développement en galloroman et les langues voisines.

Le FEW  distingue trois groupes de significations:

  1. Jambe ou partie de la jambe; le creux poplité, le creux du genoux comme ancien occitan la garra  « jarret »,   et le dérivé  jarrut « bien noué des jarrets (Languedocien). boiteux, cagneux »,  comme garrél  « boiteux », garrelà « boiter », garrelejà
  2. grande ongle courbée chez les animaux.
  3. branche courbée, tige.

Garrèl « bigarré »  a une autre étymologie. Suivez le lien.  Alibert mélange les deux famille de ùmost dans son article garrél?

Garri, jarri "souris, rat"

Garri « souris »  est attesté en provençal depuis le XVe siècle. L’étymologie est un *garrium « souris », non attesté. Dans l’article *garrium « souris » von Wartburg explique que la répartition géographique, notamment le fait que le type *garrium « souris » est limité à l’est de l’occitan et au piémontais, rend l’étymologie *garr-  « bigarré »  improbable. Je ne suis pas 100% convaincu.

Garri , prononcé  jarri à Die par exemple,   avec les sens « souris, rat, loir, gros rat » est très vivant dans les parlers provençaux. Voir le Thesoc  à ce propos.

Voir les nombreux sens et composés dans le Trésor du Félibrige de Mistral. Voici un extrait :

garii chez Mistral

Un jeu presque oublié  est  faire kou garri-baboou « projeter sur quelqu’un avec un miroir les rayons de soleil ».

garri-babaou

Garriguette, la benjamine de la famille Garric

Garric « chêne kermès; chêne blanc; chêne nain; chêne en général » (Alibert). Garriga « garrigue, terre inculte où poussent les garrics; chênaie rabougrie ». Garriguettes, gariguettes  « variété de fraises créée en 1978 ».  L’étymologie est une base préromane *karr« chêne » ou  *karri- « pierre » sur laquelle les avis des étymologistes divergent.

Garric « chêne kermès » est attesté en occitan depuis 1177  en Rouergue(TLF).  Son dérivé garriga « (terrain avec) des taillis de chêne »  se trouve  en latin médiéval dans tout le domaine occitan. La première attestation vient d’un texte de 817  fait dans le  Couserans, une province gasconne dans l’Ariège.

Extrait de Niermeyer, Jan Frederik, Mediae latinitatis lexicon minus;  2 vol. Leiden, 1976. Vous pouvez consulter des extraits, dont la suite de celui-ci,  avec Google Livres.

Une comparaison de la carte de l’Atlas Linguistique de la France (ALF)  avec l’article de Mme J. Ubaud  sur les noms des chênes en occitan, montre clairement l’effet catastrophique de la normalisation voulue par les  « occitanistes ». Un exemple.  Même les rares  occitanophones dont l’occitan est la langue maternelle, doivent chercher dans un dictionnaire pour savoir comment appeler un « chêne kermès ». Mme Ubaud veut imposer  avaus, mot plutôt rare.  Le mot garric  ne se trouve même pas dans son article.  Pour connaître la réalité, mieux vaut de consulter le Thesoc s.v. chêne.

Carte extraite des   Lectures de l’ALF  de Gilliéron et Edmont. Du temps dans l’espace. par G. Brun-Trigaud, Y. Le Berre et Jean Le Dû. Voir Sources, liens, s.v. ALF 

Ces données sont à compléter par celles, incomplètes hélas, du Thésoc, qui montre que la zone garric   est ou était plus étendue. Il y a  une attestation de garric  pour la Charente!  L’article *karra  du FEW a été publié en 1940 et beaucoup de données manquent bien sûr.

Plus sur l’étymologie de garric et  garriga  dans le TLF s.v. garrigue.

La garriguette par contre n’a rien de préroman. Sa naissance date de 1978. Son histoire romancée :

Ou et quand est née la première gariguette?

– La première gariguette a vu le jour en 1978 dans les laboratoires de l’INRA à Avignon après 16ans de mise au point.1

se trouve dans le blog « Les Végétaliseurs ».  Cette histoire montre que la recherche peut créer du travail et de  la richesse. Intéressant dans la situation économique et politique actuelle.

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  1. Pour éviter que la suite se perde, je l’ai copiée et vous pouvez la  lire ici gariguette tirée_de Les Vegetaliseurs.

Gasa, gasar, gasaire

Gasar « passer à gué, agiter le linge dans l’eau, guéer, promener un cheval dans l’eau »; v.intr. « se baigner »; ga « gué »; gasaire « qui passe à gué » (Alibert). Etymologie : germanique *wad  « un endroit peu profond ». FEW XVII,438a.

Le Midi Libre du 14 oct.2009 consacre un article à la gasa à Aigues Mortes. Dans le Thesoc gasier (Corrèze) et gassotier (Creuse) « flaque d’eau ».

Je pense qu’il faudra ré-étudier l’histoire des mots gasar et gafar « guéer », parce que je ne peux pas croire qu’ils aient une origine différente.

Waddenzee, Pays Bas

Le  Waddenzee  est la mer entre les îles et le continent.  Une réserve naturelle importante pour les oiseaux.

 

Gasanhar "gagner"

Gasanhar, guasanhar « gagner ».  Article écrit  en septembre  2011 avant les élections présidentielles !

Bertrand Boysset, géomètre à Arles au XVe siècle,  demande conseil à Dieu, qui lui donne le conseil suivant :

A quascun son dreg donares
La destra non ulh(as rem)-embrar
Per la senestra guasanhar
1

Gasanhar   a été remplacé dans la majorité des parlers occitans par la forme française gagner, occitanisé en ganhar.

L’étymologie est d’ailleurs la même : un ancien francique*waidanjan  « faire paître le bétail » un dérivé de waida « pré » qui existe toujours en allemand et en néerlandais weide « pré » et  comme le verbe weiden ‘faire paître le bétail’.

gasanhar pour un berger

L’emprunt doit être très ancien puisque le -d- intervocalique a suivi l’évolution typique de l’occitan, le dintervocalique qui passe à -s- , prononcé -z-. Il est même possible que le mot n’a pas été emprunté au français mais directement aux gotique. Il a également  été introduit en Italie par les Longobardes : guadagnare. Les formes catalan guanyar, espagnol ganar et portugais ganyar viennent peut-être du français, mais vu les très anciennes attestations, il est plus probable qu’elles viennent également du gotique ou ont été emprunté même avant les Grandes Invasions  (400 – 600 après J.-C).

L’évolution sémantique est intéressante. Comment arriver au sens « gagner » à partir du sens « faire paître le bétail »? C’est Charlemagne, qui ne s’est pas uniquement occupé de l’école, qui a joué un rôle important.  A l’époque de l’introduction de la charrue,  au début du IXe siècle, il a donné ordre d’appliquer l’assolement triennal ( Wikipedia) sur les terres impériales.  Après une année de repos, la terre devait être utilisée comme pré et l’année suivante elle était labourée. Cette troisième année waidanjan prenait le sens « cultiver la terre, labourer »‘ ensuite « semer ».  Ces sens sont  conservés en ancien occitan et jusqu’à nos jours en franco-provençal. En ancien français gagnable signifiait « cultivable, labourable ». Michel Chauvet, ethnobotaniste, me rappelle que le sens originel subsiste dans le mot regain, qui en agriculture désigne la repousse de l’herbe en été dans un pré après une première fauche au printemps.

gasanhar pour un fermier

Quand plus tard ce sont pas des paysans mais des soldats qui vont gagner il y a un changement radical de sens qui devient : « faire du butin, piller » attesté depuis 1140. Pour d’autres métiers plus pacifiques gagner, occitan gazanhar prend à partir du XIIIe s. le sens « acquérir de l’argent ou une récompense par son travail, par son initiative » et à la même époque « l’emporter au jeu ».


gasanhar pour un soldat .

                                          

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  1. A chacun tu rendras son droit. Tu ne léseras pas la droite, Pour faire gagner la gauche… Arles XVe s. voir le poème s.v. destre

Gaubi

Gaubi s.m. « adresse, aptitude, savoir faire » (Trièves), « esprit, adresse, bonne grâce, savoir-faire » (Die). Mistral donne une colonne de mots qui appartiennent à la même famille.  Les sens sont assez abstraits et difficiles à classer.

D’après le FEW l’étymon est le verbe gotique *garwon « arranger, préparer, décorer ».

La grande majorité des attestations vient du provençal et du languedocien, mais on le connaît aussi en béarnais gaubi « aisance naturelle, maintien ». D.Martin, Dictionnaire du patois de Lallé. Gap,1907-1909, donne plusieurs composés: gaoubi   « biais, l’habileté des mains ». – deigououbiar  » se dégourdir, se débrouiller » .- deigououbia , deigoubiaire, deigoubieira » . J’ai cherché l’attestation dans le texte, parce que le sens « biais » m’intriguait. L’abbé de Sauvages (S2) me fournit l’explication en  donnant  trois mots différents :

  1. gâoubi « adresse, etc. »
  2. gâoubi ou galbé « maintien »
  3. et le dernier qui correspond à  « biais » :  gâoubi  « tortu [sic!], de travers, déjété » et gâoubià  « se dit du bois qui se tourmente pour avoir été mis en oeuvre avant d’être bien sec ». Il rattache ce troisième sens à l’italien gobbo « bossu ».

Le mot biais a également un très riche développement en occitan. Dans quelques significations  il est passé au français, mais il est difficile de saisir l’élément sémantique  central  comme pour le mot gaoubi .  L’article est à approfondir.

Pour le Panoccitan on a inventé le mot gaubissen « soutien-gorge ». Encore un effort et plus personne ne comprend l’occitan.

J’ai quelques problèmes à admettre les évolutions sémantiques et par conséquence les étymologies données pour ces mots.

Gavach, gavatch, gavot

Gavot « paysan haut cévenol ou lozérien » , gavatch, gavach désigne toujours des habitants des montagnes1 . L’étymon est une racine *gaba« gorge, jabot, goitre » qui vit en Italie et dans les parlers galloromans. (FEW IV, p.4)  Dans le TLF gavache  est défini comme « vieux » ou « régional ». Dans le DMF est signalé un sens spécifique pour la Provence : « celui qui fqit le métier de portefaix ».

Pour l’abbé de Sauvages un gavo est un « montagnard du Gévaudan » et il dit que les

Espagnols appliquent le mot gavacho aux montagnards du Gévaudan qui vont faire leur moisson et à tous les François.

Un visiteur me signale: « En Roussillon un gavatch est un habitant de l’Aude. Il semble donc qu’un Gavatch vienne toujours du nord et pas nécessairement de la montagne. » Je pense que c’est la nuance péjorative qui a pris le dessus. C. Achard donne une dizaine de sobriquets provenant de plusieurs départements dont gaba est la base .

Nous retrouvons gaba dans les parlers du nord de la France p.ex. en picard gave « jabot de volaille ». En ancien provençal existe le dérivé gavaych « goitre » qui existe toujours dans les parlers modernes, p.ex.  à Aix gavagi « gosier » et languedocien s’engavachà « s’obstruer en parlant de la gorge » (S), à  Manduel c’est « avaler de travers » (ALLOr 1181).

Le dérivé gavaych orthographié gavach en occitan et français régional est très vivant, nommé par ex. dans  le  ML 8-2004 comme son cousin gavot, mais le sens a bien changé! Au XVe siècle il y a des attestations de l’occitan gavag ou gavach « ouvrier étranger ». Le mot est même passé dans les dictionnaires français gavache « injure que les Espagnols adressent aux Français des Pyrénées et du Gévaudan, qui vont exercer en Espagne les emplois les plus vils ». Nous voyons que les temps changent!

Je ne peux m’empêcher d’énumérer les autres définitions données, parce que cela vaudrait une étude sociologique approfondie! A Lasalle (Gard) gavache « montagnard, homme grossier », à Puissergier « montagnard de la Lozère, du Tarn, de l’Aveyron »; dans l’Aveyron « un habitant du Gévaudan », et dans le Gers « une personne étrangère au pays ». Dans les vallées de la Seudre et de la Seugne dans le dép. de la Charente on appelle gavache « l’idiome saintongeais des environs de Blaye » qui est peut-être Occitan ???. A La Réole gavache est  « la population de langue d’oïl installée dans le pays du bas Dropt , la Gavacherie ».

Le dérivé gavot désigne depuis les premières attestations en provençal du XIVe siècle « un habitant de la partie montagneuse de la Provence » et en languedocien « un montagnard » avec une nuance péjorative de « homme grossier, individu gauche » etc.

Ménard traduit gavotus par « montagnard » dans son Histoire civile, ecclésiastique  et littéraires de la ville de Nismes, vol.IV, p.332

Un texte du XVe siècle, dit simplement que M. Claude Lantelme  est un gavot:

La  relation sémantique entre la racine  *gaba « gorge, goître » et gavot, gavache « montagnard »  est la maladie du goitre.  Le goître étant plus fréquent en montagne que dans la plaine: « On parle d’endémie goîtreuse lorsque 10 % au moins de la population est goîtreuse; Certaines aires géographiques sont électivement représentées notamment mais non exclusivement les zones de montagne). Les facteurs étiologiques sont multiples et peuvent être associés : – carence iodée surtout ( mais non constante) avec iodurie inférieure à 50µg/jour ». Les exemples donnés  par le TLF comme illustration du mot goitre  montrent que le  goitre endémique est souvent associé au crétinisme.

Un gavot ou gavach est donc littéralement « un goitreux » et ensuite un « crétin ».

S’egargavatšar, s’engavachà « Avaler de travers ». Dans les villages autour de Montpellier les témoins pour l‘ALLor ont traduit « avaler de travers  » par  s’egargavatšar, s’engargalhar etc. probablement par confusion avec le type garg-; dans le Gard c’est le type s’engavachà qui domine presque partout.

Dans un site en espagnol, il y a un résumé d’autres explications : http://www.1de3.com/2004/12/29/Gabacho/

Un visiteur, bon connaisseur de l’espagnol, a suivi le lien et m’écrit: Sur le site espagnol que vous donnez en lien, je découvre la locution « hablar en gavacho« . Il me semble que les Français ont rendu aux Espagnols la monnaie de leur pièce ! L’étymologie de « parler [français] comme une vache espagnole«  est donnée comme une corruption de « parler comme un basque espagnol » ; mais il me semble qu’il est plus convainquant de dire que c’est une adaptation de l’espagnol « hablar en gavacho » ! Une explication plus convaincante que celle qui propose le confusion de basque et vache.

Les dernières compléments d’informations viennent du Chili! gabacho

A mon avis il n’y a pas de contradiction entre le toponyme Gave, anciennement Gaba « rivière » en Béarn, et le sens « goitre ». (Voirgaba) Surtout en montagne, les rivières passent souvent par des gorges. Cf. Wikipedia  Gave  .  Mais d’après le TLF des recherches récentes montrent qu’il s’agit plutôt d’un mot préroman gabatro* :

D’apr. leur forme et celle de leurs dér. Gabarret, Gabarrot (v. Raymond, op. cit.), ces mots semblent reposer sur une base préromane *gabaru, *gabarru (Rohlfs Gasc.3, § 69, 479; cf. fin viiie-début ixes. lat. médiév. gabarus Théodulfe d’apr. Dauzat Topon. éd. 1971, p. 138); v. aussi J. Hubschmid, Pyrenaënwörter vorrom. Ursprungs, § 42 qui rapproche les termes pyrénéens de l’a. prov. gaudre « ravin, ruisseau » reposant sur une base préromane *gabatro à laquelle il rattache le lat. imp. gabata, gavata « jatte, écuelle » [v. jatte] – et Id., Sardische Studien, § 23. Une base préromane *gava « cours d’eau » (FEW t. 4, p. 83a) paraît moins satisfaisante. Bbg. Pégorier (A.). À travers le Lavedan. Vie Lang. 1962, p. 468.

 

  1. D’après René Domergue, les Gardois disent gavot. Du côté de l’Hérault le mot gavach ou gabach est préféré. (article à paraître