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Escandalh, escandilh

Escandalh, escandilh s.m.’peson; balance; étalon de poids et mesures; jauge; sonde (maritime); mesure de capacité pour la chaux et l’huile’.
Un visiteur me pose la question suivante: « Je trouve à l’instant un  qui me pose problème : une quantité de chaux dite « ….un escandal de chaux? Merci! Et j’ai pu lui répondre:
Bonjour!
Escandal se trouve dans l’Alibert écrit escandalh , escandilh avec le sens « peson, …etc. ». L’origine est le latin *scandaculum du verbe scandere « monter, s’éléver; gravir ». *scandaculum n’est pas attesté en latin, mais dans un texte de Genua en latin du moyen âge on trouve la forme scandaglium avec le sens « sorte de mesure de capacité ». On suppose que l’évolution du sens de « monter » > « mesure de capacité » est passé par l’utilisation de traits à l’intérieur d’un tonneau , d’un vase , etc. qui permettaient de controler les quantités. Le mot est indigène en occitan.

Le sens « balance » et plus spécialement une « balance romaine avec un seul plateau » s’est pobablement développé à partir de la montée rapide de ce plateau pendant l’utilisation. Avec ce sens on le retrouve dans le Piemont.

En français le même étymon a abouti à échantillon , mais c’est une autre histoire que vous pouvez lire en suivant le lien

Escaoumer ‘brûler’

Escaoumer « brûler » Lhubac1 vient du grec καυμα (cauma) « chaleur du soleil ».  FEW II,538b

Le premier sens attesté en occitan de cauma, caumo est « grande chaleur » . Le dérivé caumasso devient  » chaleur étouffante »,le verbe  escauma « échauder » et escaumarrado « chaleur accablante ».

Pendant la grosse chaleur on ne peut pas faire grand chose, même pas manger : chaoumar à Barcelonnette « cesser de brouter et se reposer à l’ombre (en parlant des moutons) », coumà dans l’Aveyron,  devenu chomer « se reposer  » en ancien français, et les jaloux qui ne peuvent pas faire la sieste appellent ceux qui la font chomeur « homme paresseux ».  Chomer perd ce sens péjoratif et devient « ne pas travailler faute d’ouvrage », mais ce sens est relativement récent, début du XVIIe siècle. Avant cette époque on ne chomait que pendant les jours de fête, féries ». Les deux sens co-existent en français moderne.

D’après le FEW cauma est devenu calma en italien et a pris le sens spécifique de « cessation complète de vent » comme terme de marine, emprunté au XVe siècle. Depuis le XVIIe siècle calme est utilisé au figuré avec le sens  « absence de passion », etc.

 

 

  1. Qui raconte une histoire d’un cuisinier qui vérifiait la température de l’huileescaouder avec son doigt sans s’escaumer. Un ami de Montagnac me confirme : « je me suis escaumé », pour dire « je me suis brûlé »

Escapoulaire ‘ébaucheur de jais’

jais brute

jais brute

Sans le vouloir, je pense, la dormeuse de Mirepoix me fournit  régulièrement des sources d’inspiration. Dans son dernier article, intitulé:Le diocèse de Mirepoix vu en 1776 par Antoine de Gensanne, ingénieur géologue, commissaire des Etats du Languedoc  elle cite  un long passage sur le travail du jais. 

Avant la retraite j’étais artisan lapidaire, un métier non réglementé  et très peu connu en France.  Cet article est un complément intéressant et utile à mon bouquin La taille des pierres fines pour débutants. 2012. 92 p. avec de nombreuses illustrations. (15 € pour mes lecteurs!) Le jais n’étant plus à la mode quand j’ai décrit le travail des pierres semi-précieuses , je n’y ai pas consacré une description détaillée.

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La voici:

Travail du jais ou jayet.

Le jais est une substance fossile, bitumineuse, très-noire, passablement dure, et d’un grain très-luisant, lorsqu’il est poli. On le tire de ces veines qui sont semblables à celles du charbon de terre, dont le jais est une espèce : en général plus ces veines sont fortes, moins le jais a de dureté, et moins il est précieux. On le tire par morceaux de différentes grosseurs, qui ne passent guères quatre pouces d’épaisseur, et souvent beaucoup plus petits. Les Mineurs le vendent en cet état à tant la livre, Il y en a de plusieurs prix, depuis quatre jusques à dix sous la livre, suivant sa dureté et sa finesse. Celui qu’on tiroit à une petite demi-lieue au- dessus des Bains de Rennes, sur la petite rivière qui descend de Bugarach au Diocèse d’Alet, passoit pour le meilleur qu’on ait vu ; mais le travail de ces Mines a cessé, quoiqu’elles y soient encore abondantes.

Les Négocians qui font commerce de cette espèce de bijouterie, achètent le minéral, et le remettent à des ouvriers qu’on appelle, dans le pays, Escapoulaires ; ce sont ceux qui dégrossissent la matière et donnent la première forme à l’ouvrage. Ils travaillent sur une espèce de billot ou forte établie, et se servent de couteaux dont la lame est large et fine. Ils ont à côté d’eux plusieurs petites sébilles de bois ; dans l’une ils mettent les boutons dégrossis ; dans une autre les grains de chapelets ; dans une troisième les grains de collier, et ainsi de suite, avec cette attention que chaque sébille ne contient que des pièces de même grosseur, soit en boutons d’habits, ou autres ouvrages.

Les sébilles remplies de ses ouvrages dégrossis, sont remises à des femmes pour les percer ; ce qui se fait avec des forets de différentes grosseurs, et dont quelques-uns sont extrêmement fins. Ils sont montés sur des petits tours à bobèche qu’on tourne avec l’archet. Chaque espèce de grosseur et d’assortiment est remise dans une petite sébille, après avoir été percé. Tout ce travail jusqu’ici se fait dans la chambre et dans des maisons particulières.

Les ouvrages ainsi préparés, sont portés au moulin pour y être polis, et recevoir leur dernière forme. I1 n’y a ici que des jeunes filles ou des jeunes femmes qui soient propres à ce travail, parce qu’il faut avoir la vue bonne. Il y en a, comme vous avons dit, quatre à chaque meule, deux à droite et deux à gauche : elles ont chacune deux sébilles de bois devant elles ; dans l’une sont les ouvrages dégrossis, et dans l’autre ceux qui sont finis. La planche qui forme la lunette dans laquelle la meule tourne, leur sert de table. Elles sont assises sur des scabelles ou petits sièges placés deux de chaque côté de la meule ; et par là deux travaillent de la main droite, et deux de la main gauche, afin d’avoir tout le jour de la croisée sur leur ouvrage.

La fille qui travaille de la main droite, appuie sa main gauche sur son genouil gauche ; et avec le pouce et l’index de la droite, elle prend une pièce dégrossie dans la sébille, et l’applique sur la meule, le coude appuyé sur la table ; elle forme de cette manière la première facette à la pièce ; elle n’a pas besoin de l’autre main pour former la seconde facette : l’habitude lui apprend à tourner sa pièce avec les deux doigts de la droite, et à lui donner toutes les faces dont elle a besoin, suivant la nature de l’ouvrage ; d’où l’on voit qu’il n’y a que la main droite qui opère ; la gauche reste toujours appuyée sur le genouil, afin d’affermir l’attitude de la fille. La pièce étant finie, ce qui est fait en très peu de temps, elle la met dans la sébille qui lui est destinée, et en prend une autre dégrossie dans la sébille qui est auprès, et ainsi de suite. Il n’est pas besoin de dire ici qu’a l’égard des deux filles qui sont à l’opposite et en face, c’est la main gauche qui fait ce travail, et la droite est appuyée sur le genouil.

Les ouvrages finis, sont ensuite remis à d’autres femmes qui les enfilent, et en font des colliers, des chapellets, etc. qu’elles arrangent très proprement sur du papier, et dont on fait des paquets pour être vendus.

Tout ce travail se paie à tant la grosse2 ou au cent, suivant leur qualité.

(sébille  est une orthographe de sébile « petit récipient creux et de forme ronde ». Genouil « genou ».)

jais_roules roulés jais_taillé_cab cabochon

jais_taillefacetté

Les trois méthodes de travail sont décrites dans « La taille des pierres fines pour débutants ».

Etymologie

Escapoulaire  est un dérivé du verbe escapoular, escapolar « ébaucher, dégrossir; hacher », composé de ex- + *cappare« châtrer ». Cappare  est dérivé de la racine *capar  qui avec le sens « châtrer »  est uniquement conservé à Barèges (Htes-Pyr), en catalan, en espagnol et en portugais capar et curieusement aussi dans des parlers allemands comme le Tirol et en Suisse kappen.  Le sens  généralisé « couper » a été conservé en néerlandais kappen « couper des arbres » et dans d’autres langues germaniques. En galloroman ce sens ne s’est maintenu que dans des dérives comme   à Die chaplar « hacher, couper menu », chaplaire « hache-paille (bac en bois mini d’un grand couteau) », chaplosa « coupe racines ». Languedocien chaplun « chapelures », chapladis « débris »(Sauvages S1).

La première attestation du verbe capolar « couper en petits morceaux » vient de l’Ariège ! Languedocien capoulado est un « hachis ». Escapoula « ébaucher, dégrossir » attesté à Puisserguer et dans l’Ariège signifie « couper les billots dont on fait des sabots », les autres attestations viennent également du travail du bois. Pierre Larousse l’a adopté pour le français escapouler « dégrossir (dans la forge) », mais ses successeurs ne l’ont pas retenu.

Escaravida et actualités

La dormeuse de Mirepoix, à qui on a enlevé le précieux Compoix pour des raisons de centralisation,  se venge en exploitant le Cartulaire de Mirepoix, numérisé par les Canadiens et  en libre accès au Canada à Toronto (Internet Archive).

Elle y a trouvé le Dénombrement des biens et valeurs de Jean V à Mirepoix en 1510  . Elle écrit:

Ce qui fait aujourd’hui l’intérêt de ce relevé, c’est moins l’évaluation de la fortune du seigneur que l’évocation de la cité de 1510, de ses ressources, de ses travaux et de ses jours ordinaires. Mirepoix passe pour avoir connu sous le règne de Jean V et sous l’épiscopat de Philippe de Lévis son âge d’or. En quoi consistait cet âge d’or ? On tirera du relevé reproduit ci-dessous une esquisse de réponse.

Le texte était une traduction de l’original  en latin avec quelques mots languedociens comme  guitou « canard »(guit, guito chez Mistral).   Je n’ai pas pu m’empêcher de feuilleter le livre. Comme historien de l’occitan je suis toujours à l’affût de mots nouveaux et  de datations nouvelles.  A la page 226 je tombe sur les  Tarifs et règlements de la leude (= taxe) à Mirepoix et à la Roque d’Olmes  daté de 13431 Ces tarifs nous donnent  un dessin aux gros traits noirs de la vie de tous les jours  à Mirepoix et ailleurs. Par exemple  (p.235)

« Juif  – chaque Juif ou Juive, qui passera par la ville ou le leudaire, doit payer, chacun, 8 deniers, par tête ».

Ce qui est toujours actuel et  n’ a pas changé depuis le début du XIVe siècle est la complexité des charges, taxes et autres impôts.   Un nom de marchandise  parmi les dizaines de produits de tous les jours qui étaient imposables, a fait tilt: Escaravidas

(Le jour de foire ou de marché une personne venant  de l’extérieur doit  donner une somada  sur 25 ,  les autres jours, rien.  Les  escaravidas  sont normalement transportées et vendues par somada  et si elles passent par le pays il faut payer. )

Qu’est-ce qu’une escaravida2  pour qu’elle mérite une taxe spéciale? Avec GoogleLivres j’obtiens un extrait d’un glossaire botanique de 1871 :

du « cumin des prés » donc mais  d’après  l’édition du  Ramelet Moundi   de Goudouli  (1re moitié XVIIe siècle) par Philippe Gardy (1984)  du « chervis ».

 Un tróc d’escaravida : un morceau de chervis, plante de la famille des ombellifères, autrefois largement cultivée, dont les racines étaient spécialement consommées pendant le Carême.

Mistral confirme: escarabi (gascon), escharavi et

L’attestation de  escaravida chez Goudouli était jusqu’à aujourd’hui la première  en occitan, maintenant elle  recule de trois siècles: 1343.

L’étymologie est le mot arabe  karawīya  « sium sisarum; carum carvi »,  devenu,    escaravi en occitan moderne, chervis  et beaucoup plus tard carvi en français.  L’histoire de ce mot arabe est assez compliquée.  Chez Lucius Junius Moderatus Columella ( AD 4 – ca. AD 70) et Pline le cumin s’appelle careum,  καρων en grec d’après le nom de la région d’origine Caria en Turquie. Le nom grec a été emprunté par les Syriens et ensuite par les Arabes, qui appelaient le chervis et le cumin des prés tous les deux karawīya. Les deux plantes se ressemblent beaucoup, leur utilisation par contre est très différente.  Le chervis est cultivé pour ses racines, le carvi pour ses graines.

Le chervis est une plante herbacée vivace de la famille des Apiacées, autrefois cultivée comme légume pour ses racines comestibles. Nom scientifique : Sium sisarum L., famille des Apiacées (Ombellifères). Noms communs : chervis, berle des bergers, chirouis, girole; allemand : Zuckerwurzel, anglais : skirret, espagnol : escaravía, italien : sisaro. (Wikipedia) néerlandais skirrei, suikerwortel. Suivez le lien vers la page de Rolland Flore pour les noms dialectaux du sium sisarum.

Le   carvi   est le cumin des prés (Carum carvi L.), une plante bisannuelle de la famille des Apiacées (Ombellifères), cultivée pour ses feuilles et surtout ses graines, utilisées pour leurs qualités aromatiques (comme condiment) et médicinales. (Wikipedia),  a la même origine, mais il nous est probablement venu par l’espagnol.

sium sisarum  chervis   carum carvi

racines de chervis    graines de carvi

 Il reste un autre problème de botanique. Les noms  qui viennent de karawīya  servent non seulement pour le chervis et le carvi, mais  aussi pour d’autres plantes.  Dans l’Ariège escarrabit et à Toulouse  escarabic désigne le « panais »  dans le Lot-et-Garonne la « carotte sauvage » est appelée  escarbichott.

Pourquoi Actualités dans le titre?  Vous avez vu que  l’histoire de   escaravida   illustre une fois de plus ma devise

« Parcourir le temps c’est comprendre le présent »

La centralisation des Archives dans l’Ariège date de 2012, le racisme ne date pas d’aujourd’hui,  les plantes oubliées sont très à la mode, les impôts toujours très compliqués;  les philologues occitans ont  toujours beaucoup de travail à faire, comme les ethnobotanistes et même les étymologistes.

 

  1. Leudaire: registre des taxes sur les ventes (leudes) de produits sur les foires et  marchés. Ces taxes peuvent être seigneuriales, royales (« leude majeure »), ou des communautés. Indirectement les leudes nous permettent de connaître la valeur de telle ou telle production agricole ou marchandise.
  2. Pasquier traduit erronément  par « écrevisse » en suivant de vieux dictionnaires. Erreur compréhensible; voir l’extrait de Mistral

Escarougner

Escarraunhar « égratigner, écorcher la peau », fr.rég. escarougner  est dérive de carraunha (Alibert) ou corrouogno « charogne » qui représente un latin *caronia « appât, charogne »  lui-même dérivé de carnem « chair ». Les formes avec -rr- se trouvent en occitan, catalan carronya et espagnol carroña, probablement à partir d’une  prononciation avec  double  -rr- qui augmente la valeur affective du mot  souvent utilisé comme injure. L’injure est même passé en néerlandais:  kreng « femme méchante; vieux « charogne », le k- s’explique par un emprunt aux parlers du nord-ouest (picard, normand).

Le sens « écorcher » qui est très vivant dans le Midi, s’est développé à partir du sens « mal couper, déchirer la viande; déchiqueter ».

L’étymologie  *caronia est à revoir; il s’agit d’une double étymologie du FEW: dans mon article escarrafi du germanique *skarrô,
j’écros: Le gotique *skarrôn  a donné le gascon escarrá « râcler, ratisser’, et plusieurs dérivés comme escarrat « individu qui n’a plus le sou », escarragná « érafler » qui vivent surtout en béarnais. Voir FEW XVII, p.102a-b.

Aujourd’hui le 16 janvier 2019 un visiteur m’écrit:

Bonjour,
Tout d’abord félicitations pour ce magnifique site d’étymologie occitane.
Je ne parle pas du tout occitan mais lorsque je vivais à Alès, mon grand père s »escarougnait pas mal les mains en bricolant et moi-même je m’escarougnais les genoux. Je voulais savoir si la forme pronominale d’escarougner était attestée.

Escarrafi ‘rider’

Escarrafi « rider, froncer », s’escarrafi « faire la grimace en mangeant ou buvant une chose acide ou amère » (Mistral),  escarafir  chez Alibert,   est composé de deux étyma d’origine germanique *skarrôn « râcler  » et raffen « recueillir, saisir rapidement ».

Le gotique *skarrôn  a donné le gascon escarrá « râcler, ratisser’, et plusieurs dérivés comme escarrat « individu qui n’a plus le sou », escarragná « érafler » qui vivent surtout en béarnais. Voir FEW XVII, p.102a-b.

L »étymon raffen a donné une grande famille de mots, dont nous parlerons dans l’article languedocien  rafi « rider, froisser ». Vous pouvez aussi jeter un coup d’œil sur l’article du FEW XVI, p.654-656, spécialement note 7

 

 

Escaume ‘dame de nage, tolet’.

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Escaume « tolet » ou « dame de nage » vient du grec σκαλμος  emprunté par les Romains scalmus   toujours avec le même sens. Le mot se retrouve dans tous les parlers marins de la Romania, sauf en normand qui a gardé un mot ancien nordique  þollr « arbre; poutre »,  cf. le danois et le norégien toll, le suédois tull « tolet ». (CNRTL tolet). Le type nordique a gagné du terrain sur la côte atlantique au détriment du type scalmus ( FEW scalmu XI,272b)

escaumo escaumos    escaumo2

Dans le travail inestimable du Commandant Noël Fourquin et de Philippe Rigaud :

De la Nave au Pointu

Glossaire nautique de la langue d’oc

Provence-Languedoc

Des origines à nos jours

Dans l’Édition sur CD de 2010, je trouve plusieurs attestations comme celui-ci:

1510: « …pour bois employe a faire pedagnes et escalmes… » Archives Départementales BdR. B 2551 f°148v°

et des dérivés :

Escaumado s.f « bordage qui porte les tolets et les toletières d’un bateau. »; Escaumot s.m 1636: « Plus en rombauds, encentes, escaumots… » A.D. BdR. 14 E 403 (n. fol.).

Cotgrave écrit dans son dictionnaire de 1611 scalme « a thowel »=  thole  en  anglais moderne1 c’est-à-dire « tolet ».

scalme_Cotgrave

et qu’en provençal un peis escomé est un « brochet de mer ».

peis_escomeCotgr

peis escomépeis escomé

Palavas escan « tolet » (faute de lecture  u>n ?), et escaumieira « petite pièce de bois placée sur le plat-bord pour recevoir le tolet »  sont placés par erreur  dans l’article  scamnum 11,278a 

  1. Contrairement au français, l’orthographe de l’anglais a bien évoluée.

Esclafidou

Esclafidou  « seringue d’enfant en sureau »(Puisserguier); Place des Esclafidous » « une placette à Nîmes », L’Esclafidou « gazette de Colognac ».

Michel Massol, auteur de « L’esclafidou et autres bélicoques » (Nîmes, Lacour), m’écrit:

« Il est évident que pour nous, habitants de Vauvert et de la région bas gardoise, l’esclafidou était une arme d’enfant à laquelle nous jouions encore dans les années 60. mais plus tard, terminus…Ce n’était pas une sarbacane, mais une espèce de pompe à vélo en sureau creusé et lorsqu’on emmanchait une branche dans ce cylindre préalablement garni de 2 petites boules provenant d’un micocoulier ( les bélicoques), sous l’effet de la compression, l’une des 2 partait, projetée par l’air ainsi comprimé dans un « pop » de bon aloi. L’arme avait une portée d’une quinzaine de mètres et, à bout portant, dans le lobe de l’oreille par exemple, ça faisait pas du bien !!! Arme saisonnière par excellence (il fallait attendre que le micocoulier veuille bien sortir ses fruits de la taille d’un petit pois), elle a été abandonnée rapidement, de sorte que la génération de mon petit frère (6 ans de moins que moi ne l’a pas utilisé ). »

Ci dessous un chasseur qui lance des projectiles d’argile sur les oiseaux avec un esclafidou. Dans un texte d’Avignon de 1646 est attestée la forme esclafadou avec le sens « mousquet ».

sarbacane

L’abbé de Sauvages connaît plusieurs expressions: « esclafi la parâoulo « articuler distinctement »,  lou lià tout esclafi « il lui a tout découvert » (S) et un esclafidou est « une bonde d’un bassin d’une pièce d’eau », la bonde étant un bouchon de bois.   Sous la forme esclafidor Alibert donne aussi le sens « canonnière de sureau ». Le premier sens donné ci-dessus doit être oublié puisque les enfants ne jouent plus à cela.  L e nom de la placette à Nîmes doit faire référence à une vanne.

esclafidou à Plantiers(Gard)

et le nom de la gazette de Colognac témoigne d’un esprit d’ouvert.

L’étymologie est une histoire ancienne et compliquée parce qu’il s’agit de mots qui viennent

  • 1) d’une onomatopée qu’on trouve dans les langues romanes et ouest-germaniques : klapp qui signifie « coup, claque ».De cette onomatopée viennent des mots comme ancien occitan clap « clapet’, et clapar « frapper »; par métonymie ancien languedocien clapa « tache »; français éclabousser. Voir aussi le mot clapo « sonnaille » et le lien vers néerlandais klappen « frapper, applaudir »/ le flamand klappen « parler, bavarder ». En allemand existe un groupe de mots avec des sens proche de « coup, claque; bavarder etc. » dont la base est une forme klaff, voir Grimm . Il n’est pas impossible que cette forme allemande klaff   soit à l’origine des mots franco-provençaux et occitans comme esclafar « écraser, giffler qn » et esclafir « éclater » et notre esclafidou.
  • 2) L’autre possibilité est qu’esclafidou  vient  de la racine préromane klappa « pierre plate ».  L’esclafidou des Plantiers ci-dessus est en fer, mais j’en ai vu beaucoup dans la Vallée d’Aoste qui étaient des simples pierres plates. Il me semble qu’une évolution sémantique « bonde, vanne » > « sarbacane » qui fonctionne avec un bouchon est  convaincante. L’étymon serait  plutôt la racine préromane klappa « pierre plate » , qui a donné aussi   esclapo « éclat de bois »; esclapa « fendre du bois » ancien languedocien esclapaire « bûcheron ».

Le fait que les dérivés de l’onomatopée klaff et ceux de la racine préromane klappa ont souvent des sens très proches rend le solution difficile.

Toutes les formes avec un  –f– comme esclaffar se trouvent dans le FEW dans l’article klapp onomatopée FEW II,734;

L’article  suivant klappa « pierre plate » est l’étymon d’une grande famille de mots commune aux langues ouest-germaniques et romanes. L’esclafidou des Plantiers pose donc un problème. La place des Esclafidous à Nîmes aussi?

Esclapaire

Esclapaire « celui qui fabrique des sonnettes » ou , »fendeur de bois; crabier vert, ardea virida » (Alibert), en ancien languedocien « bûcheron »et en français régional « personne de malhabile qui casse tout » (And), qui donne aussi le verbe s’esclaper « se blesser aux membres ».

Dans la course camargaise un barricadier est un biou qui se déchaîne et esclape tout dans l’arène. Cf. clapo et esclapeta ci-dessous.

ardea pupurea

Ceci est « ardea purpurea » et non pas le « virida »

Je n’ai pas (encore)  d »explication de ce nom du « crabier vert » et de « l’ardea virida » .  Un crabier est une  : « Espèce de héron d’Amérique qui se nourrit de crabes. « ,  cela nous n’avance pas.

Esclapeta

Esclapeta « petit éclat de bois; varicelle »; esclapeto « petite vérole volante » (S).

esclapeto

Etymologie : un dérivé » du verbe esclapar v.tr et intr. « briser en éclats, fendre du bois ». Voir Alibert pour d’autres dérivés de la même racine onomatopéique *klapp « coup, claque » et par métonymie ( cause>effet) « tache »,   clapar « frapper ». ou bien de la racine préromane  klappa « pierre plate » > « éclat de bois »

Voir ci-dessus esclafidou. Cf. aussi clapo. Déjà en ancien languedocien (1370)on trouve le mot clapa « tache » et en ancien provençal (1300) clapat « tacheté ».