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Canis

Canis « claie en roseaux fendus » mot est-occitan qui a des sens différents suivant la région ou l’époque. Autrefois la canis servait à étendre les feuilles de murier dans les magnaneries, à Nice c’était une « natte » et dans l’Aude « un grand panier à claire-voie pour prendre le poisson ». De nos jours on les trouve surtout dans les centres de jardinage, en plastique!

     

Un des nombreux dérivés du latin canna « roseau », emprunté au grec, qui vit dans toutes les langues romanes. Voir s.v. cana. Dans la langue d’oïl il a été remplacé par le type « roseau » d’origine germanique. Pourtant le mot canna a dû y exister puisque nous y trouvons beaucoup d’autres dérivés comme par ex. à Dijon chanette « chéneau pour la pluie », dans la Charente chenèle « petit robinet percé de 2 ouvertures à ses extrémités ».
Par contre on peut dire que toutes les formes avec can-, comme canne, canon, cannette, cannelle, cannetille etc.ont été empruntées aux parlers occitans, italiens ou espagnols..

Canis, en fr.canisse ou cannisse a été prêté au français au XVIe s., mais je ne le retrouve pas dans mon Petit Robert de 1967, mais bien présent dans le TLF comme provençal.
En flamand et moyen néerlandais on retrouve ce mot canis avec le sens « panier à poissons en roseaux » attesté depuis la deuxième moitié du 14e siècle (EWN). En néerlandais moderne kanis a pris le sens « tête ». Si vous avez une idée comment il a pu faire ce voyage, écrivez-moi!

Canorgue, canonge

Canonge, canorgue « chanoine; désoeuvré, mendiant », canorga « chanoinie » (A), La Canourgue (Lozère) repésente l’adjectif latin canonicus qui a été substantivé à partir d’expressions comme dignitas canonica. Une premère attestation provient de Nîmes cannonegue (1175) , plus tard canorgue à Avignon, Toulouse, Albi etc. toujours avec le sens « chanoine ». Le chanoine avait droit à des revenus de certaines terres qu’on lui payait annuellement. J’y reviendrai.

Canonicus est un dérivé de canon « règle » que les Romains avaient emprunté au grec. Le sens règle s’appliquait surtout en musique, à savoir à la monochorde, un instrument constitué d’une caisse de résonance et d’une corde unique sous laquelle coulisse un chevalet.

Le monocorde en tant qu’instrument expérimental est resté célèbre depuis que Pythagore a fait la démonstration que la hauteur du son est inversement proportionnelle à la longueur de la corde. Pythagore remarque qu’en plaçant le chevalet au milieu de la corde tendue donc en divisant celle-ci en deux, la corde en question donne alors l’octave supérieure du son initial ; de la même façon, ‘en plaçant le chevalet au tiers de la corde donc, en divisant celle-ci en trois , la corde en question donne alors le redoublement de la quinte supérieure du son initial ; etc….  cela devient de la mathématique…. Nos notes, do, re, mi etc.proviennent de cette trouvaille de Pythagore et c’est pourquoi la musique chinoise par exemple qui ne connaît pas cette division des sons, est tellement étrange pour nous.

Revenons à nos moutons. Le mot canon a pris différents sens suivant le domaine auquel il s’applique. Pour les jurisconsultes le canon signifiait « relatif à l’impôt annuel ». Le canorgue est un ecclésiastique qui a droit à l’impôt annuel. Il n’avait donc pas beaucoup de travail, de là le sens « désoeuvré ». Il y a beaucoup de toponymes Canonge, Canourgue, etc. Voir par exemple sur la carte Cassini ( cf. s.v. Toponymie.), Voici un extrait de la région Manduel/Rodilhan avec  Canonge  au nord de Rodilhan.

Carte Cassini

Le peuple confond tous ces noms des ecclésiastiques : capelan, curé, pasteur, moine, abbé, chanoine etc. Je pense qu’un moine mendiant a partir d’une certaine époque a été confondu avec un chanoine. Voir aussi les 3 articles canon dans le TLF

         
un canorgue                                            La Canourgue

cantels, de –

de cantels « posé de chant » voir  acantonar

Canto-perdris

Canto-perdris ou trantanel 

  • la bourdaine, le garou à feuille étroite, arbuste des landes, son bois est excellent pour faire la poudre à canon, son écorce est caustique, elle est employée dans les cautères lors qu’il faut donner un écoulement aux humeurs » (abbe de Sauvages);
  • pour Alibert le cantaperditz (m) est un « terrain aride et pierreux » et spécialement à Montpellier « un garou »;
  • ailleurs aussi un « appeau pour les perdreaux » , mais ce sens n’est attesté que dans l’Aveyron pour le contoperdise à ce que je sache.

.. ..

Bourdaine ………………………………………..garou…………………………..

ca

Le garou s’appelle aussi bois-gentil, sain-bois et officiellement daphne gnidium et il est très toxique. Dans l’Encyclopédie de Diderot vous trouverez :

« Ce purgatif est si violent, qu’on a fait sagement de le bannir de l’usage de la Medecine, du – moins pour l’intérieur. Ce seroit un fort mauvais raisonnement, & dont on se trouveroit tres – mal; de se rassûrer contre le danger que nous annonçons ici, parce qu’on sauroit que les perdrix & quantité d’autres oiseaux sont très friands de ce fruit, & qu’ils n’en sont point incommodés: l’analogie des animaux ne prouve rien sur le fait des poisons. »

Je crois que l’abbé de Sauvages confond le garou une plante des garrigues méditerranéennes et des sables atlantiques avect la bourdaine (Frangula alnus), qui est un arbuste que l’on retrouve communément en Europe, pouvant atteindre la taille de 5 à 6 mètres de haut,  et qui pousse dans les bois humides, les taillis, au bord de l’eau ou à la périphérie des marécages. La bourdaine est égelement laxatif et encore utilisée en phytoyhérapie. Dans la deuxième édition il a en effet corrigé l’erreur.

L’étymologie de cantoperdis ou canto-perdrix, ou francisé chante-perdrix est très simple, composé de latin cantare + perdicem accusatif de perdix. La forme avec un seul -r- est donc plus près de l’origine. Le mot que nous trouvons principalement dans la toponymie est typique pour le domaine occitan, mais on le retrouve en Espagne et en Italie. Mistral, suivant Diderot, écrit que les perdrix aiment manger les baies du garou. Si cela est vrai, le toponyme s’expliquerait par la présence des perdrix dans ce genre de terrain. Dans le Gard il est attesté depuis 1553 et dans les Bouches du Rhône depuis 1046.

Dans le site de l’IGN vous trouverez une centaine de lieux-dits canteperdrix (dont un à Manduel) et vous verrez que que le mot n’a pas toujours été compris et qu’il a subi diverses transformations, comme par exemple « champ de perdrix ». Dans le même site vous pouvez voir que les toponymes composés de cantare + un nom d’oiseau comme merle, alouette (cantalauda) corbeau (cantecorps) sont très fréquents.

Une des sept collines de Nîmes s’appelle le Cantoduc nom expliqué par Mistral comme cantare + duc , le duc étant le nom d’un hibou en occitan. Mais ce nom n’est attesté que depuis 1861. Avant 1861 cette colline a été successivement désignée sous les noms de Podium Combretum, cartulaire de St Sauveur de la Font,  Mons de Cumberto, en 1160, Puech Combret, compoix de 1761. Puech Canteduc, en 1861, suivant A. Pellet. Dans le site de Georges Mathon vous trouverez toute l’histoire de ces collines.

Une autre explication se trouve  dans un article de P.Skok   publié dans  Zeitschrift 32(1908) 434-444. Dans les département des Hautes Alpes il y a une forêt qui s’appelle Cantoduc et il suppose qu’il s’agit non pas du duc le hibou mais d’une transformation par étymologie populaire. Dans un document de 1428 la même forêt s’appelle Campum Ugonem et plus tard Champ dugon. Il pense qu’il s’agit d’un Campo qui appartenait à un certain (H)ugon qui au nominatif s’appelait (H)uc. Donc Campod’Uc > Cantoduc. D’autres Canteduc se trouvent à Marseille, en Auvergne et dans la Haute-Loire. Pour d’autres localisations, e.a. à Cheval Blanc (84) consultez le site IGN.

Il semble que près de Nîmes il y avait un lieu-dit Cantocougou du latin cuculus « coucou » (Mistral) mais je ne l’ai pas retrouvé. Peut-être Cantacoucou?

D’après l’IGN il y a un Cantecocu à Saint-Felix-de-Villadeix en Dordogne et même un Cantecocus à Saint-Sardos (82). La francisation des toponymes peut mener loin. . Le cri typique du coucou gris est un « ku-koo » qui porte loin, avec des variantes telles que « kuk-kuk-kuk-oo », ou parfois, juste un « kuk ». Vous voyez que l’étymologie populaire peut aboutir à des résultats inattendus.

chant du coucou Jugez vous-même!

 Le mot occitan trantanel ou trentanel avec le sens « garou » a été prêté au français. Pour ‘étymologie voir trantanel.

Canton, cantou

Canton, cantou « pierre d’angle; coin ; carrefour ; canton » cf. pour l’étymologie acantouna.

des cantouns à Manduel

L’expression Sap y faïre, touto peïro li fo contou (pour l’entendre cliquez), signifie pour mon informateur de Valleraugue « Il (sc.un maçon) connaît son métier, de toute pierre il fait une pierre d’angle ».

L’expression « au coin du feu » devient en nîmois ou cantoun dou fiò (Antoine Bigot) .

Dans le milieu de la bouvine camarguaise cantoun, cantounade signifie « terrain de prédilection ». Domergue donne l’exemple suivant: « Le taureau qui se tanque prend sa cantounade, le plus souvent dans un angle de la piste.

cantonier

cantonier « pierre qui lie deux murailles à l’angle » voir acantonar

Cantounade

Cantounade voir cantou

Caoucalla

Caoùcalla s.f. « corneille » (Hérault,Marcel de Serres d’après Rolland), déjà en ancien occitan : caucala (Rouergue, Raynouard, qui ajoute : cf. anc.catalan cucala); Cacouleto (Gers, Cénac-Montaut), Mistral donne pour le languedocien caucaleto « corneille ».

D’après le FEW il s’agit d’une onomatopée formée indépendamment dans ces localités. Mais caucalla ressemble phonétiquement beaucoup à un groupe de mots germaniques, comme néerlandais kauw « choucas » moyennl. cauw « corneille », ancien allemand kaa, norvégien kaje, anglais chough.
Le FEW suppose une origine franque*kawa pour les formes du Nord : ancien français choe « choucas », anglo-normand chouwe. En franco-provençal nous trouvons une forme tsawa « corneille » qui prolongée avec une suffixe –ia est aussi attestée en dauphinois et en provençal chauvio « corneille », chayo (Alpes Maritimes), chavo (Toulon, Rolland).

Nous avons ici un groupe de noms d’oiseaux internationaux; en plus des noms germaniques, il y a portugais cava, lithuanien kovas, russe régional kava, tchèque kavka, irlandais cág. Le nom le plus courant en occitan est gralha, graula .

Nous pouvons conclure que, comme pour le chant du coq, nos oreilles perçoivent certains sons à travers un filtre imposé par la langue. Un Français distingue difficilement les  [i] de l’anglais dans bit et beat . J’ai vu à Nîmes un restaurant qui s’appelle  IT! au lieu de EAT.
Cela vaut aussi pour les couleurs (pensez au vin rouge) et c’est un sujet d’études sémantiques très révélateur. L es Français distnguent marron, châtain, brun; pour un Néerlandais c’est tout du bruin.

Mais ce qui est plus important c’est que notre culture nous impose également des notions comme président, liberté, laïcité, sécurité sociale, et identité nationale … Le président  de la république française a une fonction totalement différente de celle du Presidente della repubblica  italiana, dont vous ne connaissez probablement même pas le nom. . Et les « valeurs de la République » ne sont pas les mêmes en France et en Italie.

Des sujets de débats interminables et un obstacle probablement infranchissable à la traduction automatique.

caoussido ‘chardon’

Caoussido caussido  ‘chardon aux ânes’ (onopordum acanthium) ou « chardon des champs »(cirsium arvense)  est répandu dans tout le Midi de la France. L’étymologie latin *calcita pose quelques problèmes.

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chardon des champs (circium arvense)

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et chardon aux ânes (Onopordum_acanthium)

Caoussido  comme chardon  en français est utilisé pour des plantes qui appartiennent à des familles différentes.

La première attestation du latin médiéval calcida date du début du XIIe siècle, dans le Liber floridus de Lambertus de Sancto Audomaro. (consultable chez Gallica). Un très bel article avec de magnifiques illustrations dans Wikipedia.

Arbres symbolisant les Huit Béatitudes

Arbres symbolisant les Huit Béatitudes

En latin on ne trouve que les mots chalceos, calcetum et chalca chez Pline qui les a emprunté au grec χαλκειος, χαλκη (chalkeios, chalkè) qui désignent une plante avec des épines.  Le petit problème qui se pose est la terminaison en -ido. Le fait que ce nom ne se trouve que dans le Midi permet de supposer qu’il y a été introduit  directement par les Grecs, surtout parce qu’il était très utilisé en médecine, en particulier pour le traitement des varices.

FEW XXI, 189 chardon

Capeirou

Capêirou (chaperon),«  filet de pêcheur fait en cône » voir rasal.