Jaco, jaqueto
Jaco « ancien vêtement », marseille jaqueto « petite jupe », en languedocien « corps de jupe ». voir jacouti
Jaco « ancien vêtement », marseille jaqueto « petite jupe », en languedocien « corps de jupe ». voir jacouti
Jacouti « sorte de vêtement d’enfant qui ne couvre que le buste ». La dormeuse qui fouille dans les archives de Mirepoix, a relevé les textes suivants concernant des enfants trouvés: « J’ai soussigné et declare que paule est baptisée et née le 15 mai 1815 et non anregistrée. […] mauvais lange et pardessus un vieux morceau de sargue une bonne chemise et pardessus un jacouty en laine grise rayée de blanc.L’enfant a reçu le nom de Paule Robinier. » et l’année suivante : 23 mars 1816 enfant trouvé à l’entrée du vestibule de l’église en entrant à gauche par Louis Echau carrillonneur.enfant mâle enveloppé d’une mauvaise étoffe de couleur carmelité d’une ceinture de draps appelée vulgairement jacouti d’indienne mauve à petite mouche d’une chemise courte granie en mousseline rayée..
Il s’agit probablements d’un dérivé de Jacobus.
Quel est le lien entre St. Jacques et le jacouti ? La réponse est: la popularité du Saint. Le prénom Jacques, Jaqueme en ancien occitan, était tellement populaire qu’il est devenu synonyme de « paysan ». Les jacques étaient les paysans qui prirent part au soulèvement de 1358, les Jacqueries. Ensuite le nom a été transféré sur des vêtements que les paysans portaient habituellement : occitan jaque « pourpoint court et serré », jaco « ancien vêtement », Marseille jaqueto « petite jupe », en languedocien « corps de jupe ».
Le dérivé jacouti « jaquette » est attesté par Borel en 1655 et plus récemment à Pézenas avec une description plus précise: « gilet à manches pour les enfants », ou à Prades « brassière pour faire marcher les enfants ».
Par la suite d’autres traits de caractère attribués à tort aux paysans ont reçu le nom du Saint Apôtre: languedocien jacou « niais », et même au féminin : provençal jhacoumetto « simple, niaise ». La même évolution s’est produite en anglais : jackass » âne mâle; personne stupide » (Cf.Harper).
Le néerlandais jack « manteau court » (depuis 1929) a été emprunté à l’allemand Jacke, anglais jack (1345) qui a connu un riche développement, (voir etymonline), ancien néerlandais jacke , néerl. moderne jak, espagnol et portugais jaco sont des emprunts au français.J’ai failli oublier le jackpot qui vient d’une expression maintenant obsolète du poker, quand personne n’a mieux qu’une paire de jacks « valets ».
La forme provençale Jaqueme a donné le dérivé jaquemart « figure d’homme armé d’un marteau, qui battait les heures dans une horloge » attesté en franco-provençal en 1422 à Fribourg (Suisse), le berceau de l’industrie horlogère, et en 1472 en provençal. Dans le DMF est marqué qu’il y a de nombreuses occurrences du nom propre Jakemars, Jaquemart, Jacquemart, Jaquemars… datant du XIVe siècle.
D’après Alibert Jacomart signifie en occitan « »horloge de beffroi; nigaud, benêt; tête » dans l’expression es tocat del jacomard.
Jaïre « être couché, gésir » du latin jacere « idem ». En ancien occitan jazer, et en Septimanie yarer. En occitan la participe passé jacuda a pris le sens « femme en couches » (Aix), en languedocien c’est jazen, fenno jazen. Un visiteur très attentif me signale: » Le terme de jaç désigne aussi, , le « placenta des animaux » dans l’Ariège. Je pense qu’il s’agit d’un dérivé du verbe jazer avec le sens « accoucher ».
Jalenco « variété de châtaignes » mot cévénol d’après Mistral. Il est en effet dans la liste du XIXe siècle des variétés de châtaignes dans ma page Castagno : JALENCO, qualité :bonne; grosseur: moyenne; exposition : les bas-fonds; maturité : la plus précoce peu productive. Observations: D’un bon débit, on la mange fraîche, 8 jours avant que les autres tombent, feuilles luisantes jaunâtres. D’après le FEW jalenco est un dérivé du latin gelus « gel ». Le lien sémantique est peut-être le fait qu’elle est précoce.
Jaquees « espèce de monnaie aragonaise, ayant cours comme unité de compte du XVe au XVIIIe siècle’ en Gascogne. Jaques dans le FEW V, 10b, s.v. jacobus.
Image copiée du site Wikipedia s.v. Dinero jaqués
Tout à fait par hasard, je tombe dans les Archives historiques de Gascogne 1883, fasc.18 sur le Livre des syndics des Etats de Béarn, par Leon Cader, p.3, ligne 4, et la note n°2, sur le mot Jaquees
Dans une note, que vous pouvez lire ci-dessous, (ou mieux dans les Archives historiques de Gascogne, 1883 ici) l’auteur explique que la Jaquee n’a rien à voir avec Jaques < Jacobus mais que le nom vient du nom de la ville de Jaca en Aragon. Le texte date du 16 octobre 1488.
La cité de Jaca fut la première capitale du royaume d’Aragon (XIIe siècle), un des points de départ de la Reconquista. Jaca se trouve aussi sur le camino aragonés. (Wikipedia).
J’ai réussi à trouver le livre de Ysangas y Miranda mentionné dans la note et il confirme l’étymologie donnée:
Tout ceci pour montrer qu’il y a encore du travail pour les occitanistes.
Jaqueses dans Revue de linguistique romane, Volume 69,Numéros 275 à 276, p.454 : cinquanta soldos de dineros jaqueses, moneda buena.
Le Moyen âge,, Volumes 59 à 60, p.162 et p. 166.
Le nom de moneda jaquesa persista néanmoins après 1300 pour indiquer la monnaie de l’ Aragon. … deniers et des oboles i jaqueses » ; longtemps même on se contenta de compter les grands montants, non en livres, mais en sous de Jaca.
A la p. 162 est écrit que le pape Innocent III, s’intéressait à la monnaie jaquesa. Innocent III vécut de 1160 à 1216. La monnaie jaquee est donc bien plus ancienne que la première date que j’avais trouvée..
Il semble que la jaquesa a été créée par Pierre II d’Aragon, dit le Catholique, (le père e Jaime I d’Aragon) ,né v. 1174–1177, mort le 12 septembre 1213 à la bataille de Muret, fut roi d’Aragon, comte de Barcelone (sous le nom de Pierre Ier) et marquis de Provence de 1196 à 1213.
El documento que narra la confirmacibn, por parte de Jaime 1, de la moneda jaquesa acuñada por su padre prohibiendo la acuñación de cualquier otra, indicaque el rey consult6 a los personajes eclesiásticos más ele~ados, entre ellos elarzobispo de Tarragona, el maestre de Amposta y a fray Poncio hfenescalco cte-nente locum magistri milicie Templi in partihus E-lispanie)).
JAQUESA.- Moneda de vellón aragonesa, creada por don Jaime el Conquistador, que se acuñaba en Jaca.
De la condition de la femme mariée en Navarre d’après le fuero général (XIVe et XVe siècles):
Peu à peu l’usage d’avantager un enfant aux
dépens des autres fit réduire la part de ceux-ci à un strict
minimum, & la coutume fixa la légitime à cinq sous jaquais,
& à une robada »de terre prise sur les montagnes communales3.
Comme je n’ai pas de bibliothèque universitaire à ma disposition, je m’arrête là. Il est bien possible que quelqu’un a fait déjà l’étude complète.
Jas de mouli, jhas de mouli (S) « gîte du moulin : celle des deux meules d’un moulin qui est immobile. Synon. meule gisante. » La meule tournante et le gîte, appelé dormante de nos jours.. Déjà attesté en ancien occitan (1567) dans les Alpes Maritimes. D’un latin *jacium « gîte » qu’on retrouve en Italie. Voir aussi jas « bergerie »
Jas « litière, gîte » (Camargue), jasse, jaç . Les deux formes sont très fréquentes dans la toponymie. Dans le Compoix de Valleraugue: Maison geasse « bergerie ». Dans le classement « fonctionnel » de C. Lassure jas (m) : terme provençal (jaç en graphie occitane normalisée) employé pour désigner les grandes bergeries en pierres sèches (ou non) des Monts de Lure et d’Albion dans les Alpes-de-Haute-Provence. Ceci est confirmé par E.Fabre : « Le Jas est une grande hutte en pierres qui doit nous abriter la nuit, bêtes et gens. »
Jean Giono devant le jas de Bouscarle1
Dans le site de l’IGN on trouvait 474 noms de lieu composés avec le mot jas ! J’ai parcouru un peu cette liste et constaté qu’il y en a beaucoup dans les départements 04 et 05 , mais également dans la Loire (42), et 341 fois la graphie est jasse.
En latin le verbe jacere signifie « jeter, lancer, envoyer », mais aussi « poser », par exemple dans jacere muros « construire des murs » ou jacere fundamenta urbi « jeter les fondements d’une ville ». Il a dû exister un substantif dérivé *jacium « gîte » qu’on retrouve dans de nombreux patois italiens et galloromans au sud de la ligne Loire-Vosges ainsi qu’en catalan, avec 3 groupes de significations:
Ajassá « coucher, enfermer le bétail », verbe réfléchi « se coucher ». En ancien occitan jatz signifie « gîte d’un animal sauvage » et il y a des attestations dans tout le domaine occitan, de Nice jusq’au Béarn. A partir de ce sens a été formé le dérivé ajassá « coucher », verbe réfléchi « se coucher », également très répandu.
Déjà en ancien occitan (1208) jas prend le sens de « parc où l’on faisait coucher les troupeaux de chèvres et de moutons dans les pâturages de montagne » et de là « bercail; bergerie ». Ce sens se trouve principalement en provençal, y compris les vallées provençales de l’Italie, mais aussi en Ariège : « pont d’étable » et à Apinac (Loire) » habitation rudimentaire avec étable et grange où le bétail séjourne en été ».
En languedocien nous retrouvons ce sens dans le dérivé jasso « petite métairie » (Alès) ou « bergerie » ( Alzon, Valleraugue, Lasalle) et le verbe ajassá « renfermer le bétail » (St André de Valborgne).
Le sens « litière » est provençal et languedocien. La zone continue en catalan.jaç « litière; lit ». En languedocien le mot jasses au pluriel était également utilisé pour la « litière des vers à soie » et ensuite a été créé le verbe desenjassá « déliter des vers à soie ».
Les sens jas « partie du melon qui repose par terre » (Pézenas) ou « bourbe » (Languedocien) font partie de la même famille.
Jaç « placenta des animaux »(Ariège), voir jaïre.
De très belles photos du jas La Bouscarle et d’autres monuments en pierre sèche du Plateau de Contadour dans le pays de Haute Provence dans ce site ↩