Braietos, braïettes en français rég. ‘primevère », à Valleraugue (Gard) « narcisse des prés ». L’étymologie est le celte braca » pantalon ». Cette formulation est un bon exemple d’une étymologie de dictionnaire qui nous apprend rien. Par contre l‘histoire de ce mot qui nous vient de loin, nous renseigne entre autres sur l’évolution de l’habillement, bref de la Mode. (FEW I,482)
Les Romains n’ont jamais eu l’idée de couvrir les jambes avec du tissu, à Rome il faisait trop chaud pour cela. En conquérant la Gaule, où régnait un autre climat, les centurions, jambes nues, voyaient les Astérix et Obélix avec des bracae qui couvraient les jambes jusqu’aux chevilles. Malins, ces Gaulois!
Les centurions les ont certainement vite adoptées, en dehors des combats bien sûr, et parfois ils les portaient quand ils revenaient de la Gaule passer leur permission. A Rome c’était considéré barbare et ridicule. Au premier siècle on les montrait encore du doigt, mais on n’osait quand-même pas trop se moquer de ces soldats. Deux siècles plus tard tout le monde portait des bracae.
C’est comparable à l’histoire du jean en denim.
La Mode s’en est occupée et le pantalon gaulois, très long, a été de plus en plus raccourci. Au temps des Mérovingiens on portait un genre de « short’ qui couvrait les cuisses qu’on appelait chausses:
Ensuite au cours du Moyen Âge les chausses ‘s’allongent et couvrent les braies, qui changent de « classe sociale » et deviennent « caleçon, culotte, pantalon de travail, langes », bref, un vêtement qu’on ne montre pas ou peu.
Avant que les braies disparaissent de la vue et de la rue, on a comparé la fleur de la primevère à la jambe d’une braie :
Déjà au Xe siècle nom coculobraca se trouve dans une liste de plantes en latin, une combinaison de cŭcūlus + bracae, littéralement « braies de coucou » ou « braies de niais ». S’agit-il d’un souvenir que la braie n’était pas « classe »? En occitan braguet signifie aussi « canon de culotte.
Par abréviation braies de coucou ou coucu devient braies, braiettes, ou bien coucüt, coouguioulo etc1 un peu partout en France. D’après le Thesoc le type coucu est le plus répandu.
La primevère et la narcisse des prés ont deux traits en commun : elles fleurissent au printemps et elles sont jaunes. Cela suffit pour un transfert du nom. Par exemple à Saint-André de Valborgne, comme dans l’Aveyron et ailleurs (voir FEW II, 1454b) coucüt désigne aussi la « narcisse des prés ». A Valleraugue c’est l’inverse ce sont des braiettes.
Dans plusieurs parlers du Nord et dans les Ardennes le coucou/cocu a été remplacé par le chat : braille de chat à Maubeuge Ailleurs braies a été remplacé par chausses; toujours dans l’Aveyron la primevère est aussi appelée calsos de coucüt. 2
PS. Le Thesoc fournit 4 autres noms pour la narcisse des prés: coutèlo , courbadona, barbeluda et aneda.
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