cat-right

Lagasto, langasta

Langaste « tique qui s’accroche sur la peau de nombreux animaux » (Camargue), langasta « tique; sauterelle; brocard » (Alibert). Dans un glossaire anglosaxon du VIIIe siècle se trouve ladasca: piae. Piae est une sorte de tique. Le type ladasca se trouve dans différentes formes dans toute la Galloromania.

En occitan domine un type *lacasta. La métathèse (c-à-d. échange de  leurs places  du -c- et du -d-) et le remplacement de -d- par -t– serait dû à l’influence d’un autre mot qui désigne des insectes: locusta. Nous trouvons le même type en catalan llagasta et en basque lakasta.

L’origine du gallo-latin ladasca est probablement un gaulois *laus daska « puce qui mord ». La forme avec insertion d’une nasale se trouve en provençal et en languedocien jusqu’en Aveyron. La forme lagasto se rencontre partout en Occitanie

La vie d'une tique

Lar

Lar « âtre, foyer » vient du latin lar « dieu du foyer domestique »: à côté des pénates, se placent dans la demeure des lares, humbles divinités qui furent des âmes humaines, et qui, n’ayant point été souillées, ont obtenu la permission d’habiter toujours leur demeure et de veiller sur leur famille.  MICHELET, Hist. romaine, t. 1, 1831, p. 54.

Dans le domaine galloroman, le mot n’a été conservé qu’en occitan pour désigner le foyer et par extension la maison où l’on est ‘chez soi’, sens qu’il avait déjà en latin : Ad larem suum reverti « revenir à la maison ».  Mon témoin pour Manduel, me dit que le mot lar désigne non seulement la maison mais aussi les entours de la masion, donc là où l’on habite.

En dehors du galloroman le mot vit aussi en Italie et en catalan llar « foyer » et espagnol llares « crochet de la crémaillère ». Le domaine occitan fait, comme c’est souvent le cas, le lien entre l’italien et les langues ibéro-romanes.  En occitan nous trouvons plusieurs dérivés: Val d’Aran laré « foyer »,  Aveyron laras « rocher mise à nu par les eaux », Castres lará « carreler un four ».

Le mot français lares « dieu tutélaire, généralement du foyer domestique; statuette le représentant » ne s’applique qu’à l’Antiquité et a été emprunté au XVe siècle.

Un visiteur corse m’informe:

En Corse, à laru signifie « qui affleure » ou « à ras bord ». Il s’agit d’une expression que l’on trouve dans l’extrême sud et qui est ancienne, peu employée.

Lambrusquiero

Lambrusquiero de vedigan « cep de vigne sauvage servant à fabriquer une badine souple et légère utilisée par les manadiers » (Camargue)  vient de l’ancien languedocien lambrusquieira « cep de vigne sauvage » (Béziers, XIIIe s.) dérivé du latin labrusca, lambrusca, « vigne sauvage » qui a  peut-être été  emprunté à l’étrusque1

Ancien occitan lambrusca va signifier en occitan « grappillon » et « plante quelconque qui n’a pas poussée ». On retrouve la lambrusque dans quelques toponymes de Provence, comme le mas des Lambrusques, à Maussane-les-Alpilles, Bouches-du-Rhône, ou le quartier Lambrusque, à Forcalqueiret,Var2.

Tout le monde connaît le Lambrusco italien.  Dans le Breviari d’amor de Matfre Ermengaud de Bezers ( = Manfred …. de Béziers)   du XIIIe siècle nous trouvons:

Quan Noe de lambrusquieira
Plantet la vinha primeira
(d’après Raynouard)

Voir aussi l’article  vedigan.

Les Egyptiens l’avaient fait déjà, mais en Occident  c’est au XIIe siècle qu’on commence à décorer les plafonds et les parois des maisons avec des sculptures représentant des sarments: lambruschier. Les revêtements en bois, en marbre etc. qui garnissaient les murs d’une pièce étaient appelés des lambris, emprunté par le néerlandais : lambrisering.

Lambrusco

Abbaye de Vauclair                                                      Lambrisering aux Pays Bas

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  1. Si vous voulez tout savoir sur l’étymon  protoroman  */la’brusk‑a/ ~ */la’brʊsk‑a/ s.f. « vigne grimpante … » consultez le Dictionnaire Étymologique Roman. Un grand projet de linguistique romane.
  2. Source

Laire, lairon

Laire, lairon « voleur, larron » vient du latin latro, latronem « voleur, larron ». Rien de spécial, vous direz. Mais la forme laire rattache l’occitan au dialectes du Nord de l’Italie. Nous le retrouvons en catalan lladre, et dans le Val d’Aran. L’accusatif est à l’origine du français larron, de l’espagnol ladrón et du portugais ladrão. Normalement c’est la forme de l’accusatif latin, ici latronem, qui est conservée dans les langue romanes, laire par contre vient du nominatif. Il a existé aussi en ancien français lere.

Quelques dérivés : leirou « rejeton au pied d’un cep de vigne » (Drôme) laroun « provin »(Vaucluse) et layrous det pa « dents de lait » (= larrons du pain) dans le Val d’Arrens.

L’abbé de Sauvages (S1) mentionne le dicton : Lou praire fai lou laire « l’occasion fait le voleur ».

Ladrot

Ladrot s.m.est le nom languedocien de « l’anchois » d’après Joubin., appelé en catalan aladroc. L’origine est   l’arabe azraq « bleu » (FEW). Le lien sémantique est le fait que l’anchois devient bleu foncé quand on le sort de l’eau. Le mot est confirmé pour le bassin de Thau par Rolland et divers sites sur le Web, p.ex. celui-ci.

Le dictionnaire Panoccitan donne anchòia ce qui est manifestement un gallicisme.

Lac

Lac 1.maie de pressoir; cuve (ancien occitan) 2. lac.

Même les panneaux routiers en Ecosse n’ont pas de secret pour ceux qui s’intéressent à l’étymologie: Gaelic Loch c’est notre lac bien sûr et Loch Ness est le Lac Ness, et Inbhir Nis c’est « l’embouchure de la rivière Nis’.

monstre Loch Ness
Ci-dessus une photo que j’ai prise du fameux monstre du Loch Ness.

Latin lacus  » bassin, auge, fontaine ; lac » a la même racine que le grec lakkos « creux » et lacuna « fosse, fossé, trou où l’eau s’amasse ». Le sens « bassin » s’est conservé en ancien occitan « cuve » et en occitan moderne « maie de pressoir ». Voir aussi l’espagnol lagar « pressoir ». Le sens « fossé, sillon » est passé en basque lako « gouttière ». A Castres est attesté le dérivé laco « ados de sillon » par métonymie. Les pentes d’un fossé, d’une colline, ou les versants d’un vallon, ayant les mêmes caractéristiques et la même fonction que les ados des potagers.

En très ancien français lacus est devenu régulièrement lai, mais la forme occitane lac l’a remplacé dès le XIIe siècle.

Lacus se retrouve en roumain lac, italien, epagnol, portugais lago, catalan llac, anglais lake, gaelic et irlandais loch.

Labech

Labech s.m. « vent du sud-ouest » (Alibert) est un mot méditerranéen d’origine arabe labag « vent du sud » (en marocain lebach, en syrien labach), emprunté au grec lips « vent du sud » c’est-à-dire « vent de Libye », devenu libs en latin. La première attestation occitane date du 13e siècle, dans un texte provenant de Béziers. Nous ne le trouvons qu’autour de la Méditerranée: provençal labesc, labet, labe. Labechada « coup de vent du sud-est » (Panoccitan) est un dérivé existant ou une création  en –ata .

Un visiteur me signale: Le labech, à Pézénas est appelé « lo vent de las damas« , parce que c’est un vent plutôt agréable.
Pendant une balade  autour du bassin de Thau, nous avons trouvé un point d’attache dans le camping Lou Labech, après avoir tourné en rond pendant une heure à Sète pour trouver une place de parking. Un lieu de calme et de repos que je peux vous recommander. Tous les emplacements ont un nom en occitan, dont une dizaine un nom d’un vent, d’autres un nom d’un type de  filet ou d’une manière de pêcher.


Voir les articles Palalngre et /ou Arseilhera

Jostar, justar

Jostar, Justar, « jouter; se cosser en parlant des béliers » a la même étymologie que français jouter : « Du latin vulgaire *juxtare (avec un -u- court) proprement « être attenant, toucher à » (v. jouxter), dérivé de juxta, voir jouxte. » (TLF). Joustaire « jouteur » est dérivé de joustar.

La graphie avec un -u- de Mistral, suivi d’Alibert et par le Panoccitan est probablement influencée par une  fausse étymologie, à savoir latin justus « juste ». Le -u- court de juxta était devenu -o- (-o- fermé) à l’époque du latin vulgaire.

Ancien occitan jostar signifie d’abord « rassembler, réunir », mais il est vite remplacé par ajostar. Dans le terminologie de la chevalerie féodale, jostar est un terme technique et a pris le sens « combattre à cheval, d’homme à homme, avec des lances » à partir du XIe siècle.. Le mot n’est pas très vivant en occitan exception faite pour  Sète.


Chevaliers-Jostaires Deux apprentis-jostaires

jostaires à Sète


Jupa

Jupa s.f. « jupe; cotte; souquenille; sarrau ou blouse de travail ample à manches longues, portée par-dessus les vêtements. » (Alibert). L’abbé de Sauvages écrit jhipo ou jhipou avec en plus le sens « estomac » et il cite Goudouli « …për më fair’ un jhipou de fusto » (pour me faire un estomac de fût). L’étymologie est un mot d’origine arabe « veste de dessous ».Voir à ce propos le TLF

D’après les données du Thesoc la forme avec un -i- attesté en occitan depuis le XVe siècle, a complètement disparue sous l’influence du français. Cela s’explique par le fait que les données reposent sur la demande  des enquêteurs : « jupe » sous-entendu « vêtement féminin ». Je n’y ai pas trouvé des représentants du mot arabe avec un autre sens. Dans les dictionnaires par contre,  la forme avec –i- est fréquente pour les mots qui désignent des « pourpoints, des veste, des gilets ou d’autres vêtements masculins » et la forme avec –u- pour les mots qui désignent des vêtements féminins. L’influence de Paris est évidente.

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jupa de paysan13e s.                          jupe 16e s.                          corps et bas de jupe 17e s.

Il ressort des attestations très anciennes (Xe-XIe siècle) que le mot arabe a été introduit  probablement avec le vêtement via la Sicile en Italie et de là en France, dans les deux formes, avec –u- et avec –i-. Dans la péninsule ibérique nous ne trouvons que la forme avec –u- : aljuba qui a été empruntée directement à l’arabe.

Jusqu’au XVIe siècle la jupe est surtout un vêtement d’homme, un genre de blouse qui est portée sur la chemise et qui est recouverte d’un autre vêtement. La longueur varie de la mi-cuisse jusqu’aux genoux, ou même jusqu’aux chevilles. Il y a des images dans Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carlovingienne à la Renaissance. 6 vol. 1858-1875.

La première attestation de jupe « vêtement féminin dont le haut est ajusté à la ceinture, et qui descend plus ou moins bas selon la mode » ne date que de 1603.(TLF). En 1623 une nouvelle mode a prescrit aux femmes une « jupe » qui était ouverte sur le devant. Le vêtement porté en dessous était rallongé et embelli. Le haut de ce vêtement s’appelait corps de jupe et le bas bas de jupe , plus tard abrégés en  corps et jupe. Le TLF s.v. corps note : « La robe se compose de la jupe et du buste ou corps de la jupe : ensuite toutes les femmes ayant la prétention d’être minces, le corps de la jupe est devenu par courtoisie un petit corps ou corset et il deviendra sans doute un corselet. GOURMONT, Esthétique de la lang. fr., 1899, p. 207.

Le jupon suit la même évolution que la jupe qui est descendue physiquement de l’épaule vers la taille, mais est montée socialement des « petites gens » à la cour de Versailles. Le cotillon par contre a perdu la bataille : « on le dit particulièrement de celle [la cotte] des enfans, des païsannes, ou des petites gens » Trévoux 1704 d’après TLF. `

Jolverd

Jolverd. En occitan, à l’exception du limousin, de l’auvergnat et du gascon, le composé de jōlĭum + viride littéralement « ivraie verte » sert à désigner le « persil ». Le catalan jolivert également. Les premières attestations (Nîmes, Arles, Sisteron) datent du 14e siècle. En français régional de Gignac tchaubert. (Lhubac). Le Thesoc fournit une seule attestation dans les Alpes Maritimes. Une explication de cette dénomination n’a pas encore été trouvée. Si vous avez une idée, contactez-moi svp.
Il y a une suggestion dans le Diccionari etimològic qui pense à une confusion avec un représentant de jilium déformation de lilium attestée en occitan de la Lozère jusqu’aux Alpes. Il existe aussi une « fausse ivraie » (Catapodium loliaceum) et un « faux persil » (Aethusia cynapium L.), qui contient des faibles quantités d’alcaloïdes = toxique.  Pourrait-il  y avoir une confusion entre la fausse ivraie (un bon fourrage) le faux persil (toxique) et le persil frisé. ???
Panoccitan : jòlh, jolheta ; jolverd, : ~ salvatge jolverdar, jolverdassa, jolverdat, jolverdada, jolverdina.

Allemand lolch « ivraie; nielle des blés », basque loilo; catalan jull,julivert, espagnol joyo, portugais joio. Moyen néerlandais lolic, néerlandais dolik

cigue
Ivraie                           Persil                                       Persil frisé                                   Cigue, faux persil